L’emploi, avec parcimonie

Muriel Pénicaud
(Photo AFP)

Les pouvoirs publics se sont félicités de la baisse de 0,3 % du taux de chômage en France.  A 8,8 % de personnes sans travail, on ne peut pas dire pour autant que tout va pour le mieux. S’ajoute à ce chômage massif l’incapacité des syndicats et du patronat de réformer le système d’assurance-chômage, pour lequel le gouvernement est appelé à prendre la main.

LA PROPORTION des demandeurs d’emploi en France est l’une des plus élevées d’Europe. Emmanuel Macron, prudent, s’est engagé à ramener le taux de chômage à 7 % au terme de son mandat, en 2022. C’est un pari plutôt réaliste, mais peu satisfaisant, qui montre surtout que le chômage de masse est devenu endémique en France. Cette longue crise de l’emploi a mis en difficulté l’ensemble des chômeurs et des salariés. Les salaires sont bas, les personnes qui restent sans travail plus de deux ans sont de plus en plus nombreuses et les offres d’emploi sont assorties de conditions parfois draconiennes. Si une forte majorité de salariés disposent d’un contrat à durée indéterminée, qui garantit la stabilité de leur emploi, les nouveaux arrivants sur le marché n’obtiennent le plus souvent que des contrats courts, un mois, une semaine, un jour, qui ne leur permettent pas, même s’ils les cumulent , de louer ou d’acheter un logement ou d’avoir, en général, de souriantes perspectives d’avenir.

Une vie instable.

Le recours aux CDD (contrats à durée déterminée) par le patronat a créé des millions de foyers instables sur le plan matériel. Le président Macron, conscient de cette injustice sociale, par ailleurs largement dénoncée par les syndicats, souhaite pénaliser les entreprises qui utilisent le CDD pour licencier sans avoir à payer de lourdes indemnités. Il a certes confié aux syndicats et au patronat le soin de trouver un compromis sur le sujet, mais les représentants des patrons sont vent debout contre une réforme qui les priverait, au moins partiellement, de la flexibilité du marché de l’emploi. Les négociations syndicales ont abouti mercredi à un échec, de sorte qu’il appartient maintenant au gouvernement de dire ce qu’il va faire. La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, a froidement affirmé qu’elle prendrait des décrets. Résultat : personne n’est content, ni le patronat qui ne veut pas être contraint de renoncer aux contrats courts, ni les syndicats, qui se méfient évidemment d’une réforme gouvernementale visant aussi à faire de substantielles économies (3,9 milliards en trois ans) sur l’assurance-chômage.

Un chômage structurel.

Les pouvoirs publics s’appuient sur une analyse selon laquelle quelque trois cents mille emplois ne trouveraient pas preneurs, ce qui indiquerait que beaucoup de chômeurs ne cherchent pas activement un emploi. Pourtant, quand on constate qu’il y a au moins trois millions de chômeurs en France, on devine qu’ils ne sont pas tous des paresseux et que notre dynamisme économique ne suffit pas à les absorber. Bien sûr, les entreprises françaises doivent être compétitives, mais les coûts de revient ne peuvent pas être abaissés au point que les salariés soient privés de leurs droits élémentaires. On entre donc dans une phase des discussions qui va soulever de vives querelles. Le gouvernement, déjà confronté à une crise sociale sans précédent, ne peut pas s’offrir le luxe de l’aggraver. De son côté, le patronat devrait réaliser que les salariés et les chômeurs ne peuvent pas accepter d’être indéfiniment taillables et corvéables à merci. Et que, s’il veut éviter de nouvelles révoltes ou une révolution, il lui faudra accepter de faire quelques concessions.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à L’emploi, avec parcimonie

  1. Michel de Guibert dit :

    Excellent article.
    Cela nous change des diversions aberrantes de Marlène Schiappa !

  2. admin dit :

    LL dit :
    Preuve que les réformes doivent avoir lieu.

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