Une élection chasse l’autre

Mounir Mahjoubi
(Photo AFP)

Secrétaire d’État au Numérique, Mounir Mahjoubi a annoncé officiellement sa candidature aux élections municipales de Paris. Le candidat de la République en marche tente ainsi de couper l’herbe sous le pied de ses amis et de ses adversaires politiques.

IL N’EST jamais trop tôt pour sortir du bois, mais M. Mahjoubi, passionné par la mairie de Paris, a oublié les élections européennes du 26 mai prochain, soit une bonne année avant les municipales. Son annonce semble donc prématurée. On sait pourquoi il a décidé de prendre de court tous les autres candidats potentiels. L’affaiblissement, supposé ou réel de la maire PS de Paris, Anne Hidalgo, a entraîné des appétits insoupçonnés dans la classe politique ; le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, n’a jamais caché qu’il était intéressé par la fonction ; à droite, Rachida Dati, ancienne ministre de la Justice, déclare qu’elle ne sera pas candidate aux européennes et qu’elle se réserve pour les municipales. Bref, on imagine que les candidats vont se bousculer au portillon et il se peut que M. Mahjoubi ait voulu prendre une longueur d’avance sur la meute déchaînée de l’année prochaine.

Partir à point.

Mais rien ne sert de courir, il faut partir à point. Non seulement, la concentration sur les européennes, étape essentielle pour la macronie (et pour les oppositions) va s’éroder dès aujourd’hui parce que l’initiative de M. Mahjoubi en entraînera d’autres, avec les commentaires habituels, mais la campagne des municipales démarrera dès le mois de juin, après les européennes. La République en marche, si critiquée par ailleurs, contient quelques estimables talents. Il est dommage qu’ils se consacrent à la bataille politicienne avant d’avoir fait leurs preuves au gouvernement, dont la tâche est particulièrement ardue. On aura bien sûr remarqué que, si la REM est en bonne position aux européennes et a même une chance d’arriver en tête, la nécessité de rassembler les démocrates de ce pays pour tenir tête aux nationalistes et aux populistes constitue un travail à plein temps et que, en attendant la mairie de Paris, M. Mahjoubi n’eût pas été de trop pour apporter sa pierre à l’édifice européen.

Le pouvoir toujours dans l’ornière.

Il donne en outre l’impression, convoyée par les enquêtes d’opinion, que le gouvernement est sorti de la crise des gilets jaunes, ce qui n’est pas vrai. L’inquiétude provoquée par leur sédition incite Emmanuel Macron à poursuivre le grand débat au-delà du 15 mars, de sorte que l’opinion publique est soumise à deux expériences interminables, les gilets jaunes, toujours vaillants et tout aussi irréductibles, et un débat qui, certes, a quelque peu renfloué le président, mais dont on sait déjà qu’il ne suffira pas à satisfaire les gilets. D’un autre côté, dès lors qu’il ne faut plus, désormais, s’étonner de rien, et les jeunes caractères de la REM réagissant à la crise par le volontarisme et la détermination, d’aucuns seront séduits par leur optimisme affiché, qui les conduit à mélanger les séquences. Le macronisme, c’est ça en quelque sorte. Il s’est heurté aux durs pépins de la réalité, mais il a gardé son dynamisme, surmontant quelques périodes de frayeur et de défaitisme, partiellement résorbées par la capacité du président de la République à ne se laisser abattre dans aucune circonstance. Ce n’est d’ailleurs pas M. Macron qui ira dire à M. Mahjoubi qu’il va trop vite.  Voilà un ministre très conforme à une méthodologie bien définie et qui, tout en accomplissant son travail, n’hésite pas à créer la surprise.

Un recours.

Ni à droite, ni à gauche, ni chez les extrêmes, on n’a assisté à un tel déploiement d’activisme politique. Les Républicains ont conçu une liste qui mêle le trio de tête, marqueur de la jeunesse, à de vieux militants, un peu comme si Laurent Wauquiez ne voulait fâcher personne, sauf Mme Dati. La tête de liste de la REM n’a pas encore été désignée. M. Macron a pensé à Agnès Buzyn, ministre de la Santé et des Solidarités, elle ne semble pas vouloir du job. Ce pourrait donc être Nathalie Loiseau, ministre des Affaires européennes, bonne polémiste et qui saura tenir tête aux provocations habituelles de l’extrême droite et de l’extrême gauche. Pour le scrutin du 26 mai, la REM a ses chances : les ralliements de la droite républicaine et démocratique (MM. Raffarin et Juppé) sont nombreux et des écologistes (Pascal Durand) ou personnalités de gauche, qui ont parfaitement compris l’enjeu, se déclarent en faveur d’un parti finalement rassembleur, et unique recours contre un basculement du pays dans le populisme.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à Une élection chasse l’autre

  1. JEAN l medecin dit :

    Très utile commentaire et pour résumer ce sera pour M. Macron : moi ou le chaos et, après tout, tant mieux.

  2. chretien dit :

    Heureusement nous lisons vos articles très pertinents car les pouvoirs publics nous saôulent avec leurs bavardages !
    Tous les jours ils nous « balancent un impôt nouveau alors que 80 % des Français demandent une baisse de la fiscalité ! Ils sont tombés sur la tête!

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