Le blitzkrieg macroniste

Michel Barnier
(Photo AFP)

Une des particularités de la politique d’Emmanuel Macron s’appelle « battre le fer quand il est chaud ». On ne peut pas dire que la température soit très élevée depuis le scrutin des européennes, mais le chef de l’État fait comme s’il n’avait pas une seconde à perdre.

SUR LE PLAN intérieur, le clan « Agir », anciens républicains ralliés à la République en marche, annonce, par la voix de Frank Riester, qu’ils vont demander à tous les élus centristes de rallier le camp de la majorité. C’est une sorte de lancement de campagne par effraction, mais c’est aussi la leçon que M. Riester tire des élections de dimanche dernier : le vote d’une partie de la droite en faveur de la REM indiquerait que les Républicains n’auraient pas dans l’immédiat l’espoir de reconquérir leurs territoires. Si, contrairement à ceux de LR qui ont rejoint le Rassemblement national, ils veulent conserver une chance de voir leurs idées traduites dans la réalité, ils doivent prendre leur courage à deux mains. Ce n’est pas fair play, mais c’est la réponse du berger à la bergère : la droite classique n’ayant cessé de harceler le pouvoir en créant des scandales, en dénonçant avec une virulence grotesque ses initiatives, en dressant de la situation politique en France un tableau sinistre, la REM répond : que le meilleur gagne.

Barnier seul contre tous.

Sur le plan européen, Macron exige que le prochain président de la Commission européenne soit un Français. Angela Merkel veut un Allemand. Le froid franco-allemand se transforme en affrontement. La chancelière pense à Manfred Weber, rompu au travail européen, mais qui n’a jamais été membre de la commission. En lice, le Belge Frans Timmermans et la Danoise Margrethe Vestager, également d’excellents candidats, mais il se trouve que Michel Barnier a acquis une envergure exceptionnelle depuis qu’il a conduit la négociation sur le Brexit. Macron est un Don Quichotte qui s’engage dans beaucoup de batailles. Il en perd quelques-unes, mais pas toutes. Par un nationalisme un peu rétrograde, tous les Français sont en faveur de M. Barnier, mais avec de bonnes raisons : c’est un formidable négociateur, qui, d’ailleurs n’est pas un macroniste mais un gaulliste. Si, par extraordinaire, il était désigné à la tête de la Commission, le président de la République aurait un allié dans la place pour la réforme tant attendue des institutions européennes.

Risque de conflit entre PPE et centristes.

Réforme dont Mme Merkel ne veut pas entendre parler parce qu’elle est très contestée dans son pays et qu’elle cherche surtout à ne pas faire de vagues, alors qu’il faut évidemment un système en béton pour protéger les pays membres contre une nouvelle crise financière toujours possible et se lancer dans une politique sociale beaucoup plus généreuse. On voit ainsi que le danger ne vient pas de l’extrême droite européenne qui, en dépit de ses succès aux élections de dimanche dernier, n’aura pas un poids suffisant pour orienter la refondation de l’Union, mais d’un possible conflit entre la droite conservatrice, logée au PPE, parti populaire européen où siègent également les Républicains français, et ce nouveau centre réformiste dont M. Macron a favorisé l’avènement.

Le président peut échouer dans toutes ses tentatives. Il a gagné du temps grâce au délai d’un mois que les Européens se sont donné pour choisir un président de la Commission. Il ne lui sera pas facile de convaincre les États-membres qu’un Français mérite le poste ; il ne lui sera pas facile de damer le pion à la droite classique lors des municipales. Ses adversaires ne sont pas des bras cassés et ils disposent de ressources humaines et de talents que la REM n’a pas forcément. Mais les élections européennes, au delà de la confirmation de la suprématie de l’extrême droite française, ont montré très clairement l’ascension de l’écologisme comme mode d’action politique et un soutien à ce réformisme qu’incarne Macron.

J’ajoute que l’éparpillement des suffrages français en une foule de micro-partis pose la nécessité des rassemblements, par exemple celui pour lequel M. Riester a lancé un appel, mais aussi l’hypothèse d’un rapprochement entre écologistes et réformistes européens.

RICHARD LISCIA

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