Wauquiez s’en va

le résultat logique de la défaite
(Photo AFP)

Les partis politiques ont salué la démission de Laurent Wauquiez, président des Républicains, dimanche soir à la télévision. Il a pris le temps d’y réfléchir et il s’y est résolu avec dignité. Les candidats à sa succession sont nombreux, mais LR doit comprendre deux choses : que la reconstruction d’un parti prend beaucoup de temps et que le choix d’un candidat est aussi celui d’un programme.

LA DÉROUTE de LR ne résulte pas en effet de la seule personnalité de Laurent Wauquiez. Sa première cause est que sa direction n’a pas compris qu’elle avait une responsabilité non pas envers le Rassemblement national et ses idées délétères, mais envers ses propres électeurs, lesquels comprennent un grand nombre de centristes, peu séduits par les extrêmes. Elle n’a pas compris non plus que, si le pouvoir d’achat reste la première préoccupation des Français, l’écologie est devenue la deuxième. Elle n’a pas compris que le reflux de l’immigration en Europe a déjà affaibli le mouvement identitaire, sans compter que, dans ce domaine, LR ne battra jamais l’extrême droite dont elle continuera, à s’obstiner ainsi, à nourrir les rangs.

Les successeurs possibles.

Les centristes, en France, sont plus nombreux que ne le montrent les mouvements qui prétendent les représenter. Ils sont au MoDem, certes, ils sont à l’UDI, ils sont aussi à la République en marche. Mais s’il y avait un mouvement centriste avec un programme comprenant une forte dose d’écologisme et une autre dose de compassion pour les classes moyennes, avec un leader charismatique, il rassemblerait bien un tiers des suffrages. Valérie Pécresse, Xavier Bertrand, François Baroin pourraient-ils devenir le nouveau patron dont LR a besoin ? Bien sûr. On ne choisira pas à la place des militants, mais il faut écarter les idées dangereuses.  Un Républicain envisageait ce matin que LR fît appel à Nicolas Sarkozy. C’est un retour au passé, non que l’ex-président ne soit devenu, dans l’oisiveté, très populaire, mais il devrait, pour incarner le leadership, réviser ses dossiers. LR souffre de ne plus être l’UMP, c’est-à-dire un mouvement qui rassemble des gens dont la droite est la référence et une touche de centrisme ou de gauche la personnalité.

Le chemin le plus long.

Pour le moment, et parce que les élections générales de 2017 l’ont largement prouvé, la REM semble séduire ces électeurs effrayés par l’autoritarisme de Jean-Luc Mélenchon, par l’inspiration néo-fasciste de Marine Le Pen et par des LR qui, en quelque sorte, auraient dû reprendre à leur compte le slogan « en même temps ». Pour qu’un parti prospère, il doit ouvrir ses portes à quasiment tout le monde, à la droite modérée, au centre, à la gauche modérée sur la base du respect des institutions (après tout, les Républicains sont les descendants des gaullistes), du patriotisme et de la réforme. La tâche de LR se révèle aujourd’hui d’autant plus compliquée qu’il existe un parti rassembleur qui s’adresse à des tendances opposées, c’est la REM. La démission de M. Wauquiez ne saurait résoudre à elle seule le problème d’un parti qui, au fond, et malgré son expérience, cherche son identité. Le mouvement de M. Macron n’a ses chances que parce que, même s’il gouverne dans le désordre, il gouverne, et il apprend. Il a donc appris qu’il était réformiste, de tendance libérale, qu’il penchait à droite alors qu’il voulait s’adresser aussi à la gauche. Il peut encore modifier sa trajectoire et quoi qu’il en soit, il a sur LR quelques coudées d’avance.

Le Pen n’est pas rassurante.

Accablé par à peu près tout le monde, vilipendé, harcelé chaque jour, considéré comme le seul épouvantail à abattre dans le paysage politique français, M. Macron n’a pas perdu une once de sa superbe. Le voilà dans tous ses atours : gaulliste en majesté, de droite,  plus libéral que social, mais avec la ferme intention d’aller grappiller des suffrages à gauche, plus écologiste que lui tu meurs, et muni de deux ans de mandat utiles qui lui permettent théoriquement d’achever les grandes réformes qu’il a commencé à mettre en place. La presse et les oppositions, si promptes à le diminuer, devraient se rendre compte, au lendemain de ces élections européennes, qu’il dispose d’un socle électoral capable, une fois encore, de battre Marine Le Pen. La vitalité du macronisme est d’autant plus étincelante que Macron a probablement commis le plus grand nombre d’erreurs que peut faire un président en exercice. Deux éléments expliquent cette suprématie d’autant plus inattendue que l’on craignait dimanche dernier un écart plus grand entre le RN et la REM.

Un Français sur trois.

Le premier élément c’est que depuis vingt ans, sous Jean-Marie ou sous Marine, le Front, puis Rassemblement national n’a jamais rassuré l’opinion, qui défend farouchement les principes démocratiques et républicains. Le deuxième élément, c’est la force du programme : si la crise des gilets jaunes a perdu de son intensité, c’est parce que les revendications raisonnables qu’ils ont exprimées ont été satisfaites. Du coup, ils se sont placés globalement dans une situation intenable. Ils ne peuvent pas continuer à réclamer la démission du président et la dissolution de l’Assemblée. La politique des folles illusions bénéficie certes d’un soutien dans l’opinion : un Français sur trois. C’est le plafond. Les deux autres tiers, quand ils auront le choix, voudront, comme en 2017, éloigner le danger.

RICHARD LISCIA

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3 réponses à Wauquiez s’en va

  1. D.S. dit :

    Le problème n’est pas vraiment Laurent Wauquiez, mais l’existence d’un espace très restreint entre RN et REM. Après la déroute de Fillon à la présidentielle, François Baroin avait également perdu tout son crédit, en essayant de sauver LR, Par ailleurs, un autre centriste avant Macron avait gouverné la France entre 1974 et 1981. Mais Giscard, allié de la droite de l’époque, n’a pas pu éviter la victoire de la gauche en 1981. Macron en a tiré la leçon et s’est donc allié à la gauche. Ses chances de réélection sont donc excellentes. Bien sûr, les gilets jaunes sont passés par là, mais on peut dire aujourd’hui que la bonne gestion de la crise a plutôt renforcé notre président.

  2. sBONNET dit :

    Effectivement l’escrologie est devenue la seconde préoccupation de nos concitoyens, un vrai lavage de cerveau. Je resterai méfiant à en faire un fer de lance d’un programme politique. Un de ces quatre matins, la population se rendra en partie compte de l’escroquerie intellectuelle de l’écologie, qui permet à très bon compte d’instaurer des taxes et réglementations ni équitables, ni mesurées. Cette fiscalité « CO2 » plombe* une bonne partie de notre industrie et le pouvoir d’achat, des mesures à l’aune de l’incompétence notoire de la classe politique française.
    Je ne crois pas que le CO2 soit une priorité pour les 2,8 milliards de Chinois et d’Indiens, encore moins pour le milliard d’Africains subsahariens (qui deviendront 2 milliards à l’horizon 2050 et pourraient atteindre plus du double à l’horizon 2 100, explosion démographique en cours).

    Est-il utile de préciser que nos voisins allemands, pourvus d’une force écologiste influente depuis des décennies, ont vu leur industrie photovoltaïque de pointe massacrée en quelques années. Ah oui, ils ont aussi une balance commerciale excédentaire de 250 milliards, ont des portions d’autoroutes où la vitesse n’est pas limitée et une mortalité routière contenue à 4,4 décès/100 000 habitants/an (France 5,6; Europe 8,8). Et à l’heure ou j’écris ces lignes, les constructeurs allemands d’autos alignent une bonne cinquantaine de modèles dont la puissance dépasse 500cv. Ils ne sont pas fous, ils ne tirent pas sur leur industrie, eux.
    Réponse
    On né résoudra aucun problème si on nie la réalité. Sans compter que vous êtes hors sujet.
    R.L.

  3. Sphynge dit :

    Le Rassemblement National aujourd’hui a autant à voir avec le fascisme ou l’extrême droite que le parti socialiste avec les bolcheviques. Il est le composant principal de la droite et a, évidemment, vocation à gouverner un jour. Les communistes l’ont bien fait à deux reprises avec De Gaulle puis avec Mitterrand, et pourtant les communistes ça a été quand même 100 à 110 millions de morts. On ne pourra pas utiliser indéfiniment l’artifice électoral et la propagande désuète pour le tenir à l’écart du pouvoir. Charles Pasqua a dit un jour à J. Chirac, du temps du RPR, qu’il faudrait s’allier au Front National maintenant, en position de force, que plus tard quand ce sera lui qui le sera. Et Charles Pasqua, a qui l’on peut reprocher beaucoup de choses, était un résistant, un vrai de la première heure que l’on ne peut accuser d’extrême-droitisme ou de fascisme. L’astuce de Mitterrand que continue d’utiliser Macron pour se retrouver en 2 022 au deuxième tour opposé à Marine Le Pen sera efficace si toute la droite, libérale et sociale, ne parvient pas à se coaliser, sous une forme non encore déterminée, pour battre le centre au pouvoir où il se maintient en changeant d’électorat grâce notamment aux grosses ficelles du maintien d’un ordre qu’il a mis a mal lui-même tout en le rendant terrifiant pour le petit-bourgeois grâce aux supplétifs de l’extrême gauche et à une propagande médiatique effrénée. L’analyse fine des sondages d’opinions et des élections montre que M. Macron n’a été élu et ne serait réélu en 2022 que en tant qu’antidote de Marine Le Pen. Et non par une adhésion politique. Cela le maintient au pouvoir (et peut-être pour longtemps), mais sous la forme d’un président faible dont les réalisations restent quand même marginales quoi qu’en disent ses thuriféraires.

    Réponse

    Votre sous-estimation du danger que le RN représente pour la démocratie ne sert pas à autre chose qu’à assurer sa conquête du pouvoir. Si le peuple de la droite et du centre existe, il vient de le faire savoir à Laurent Wauquiez. En réalité, ce n’est pas avec le RN que LR doit s’associer mais avec la REM dont le programme est parfaitement compatible avec celui de la majorité.
    R.L.

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