Il y a 80 ans, le 18 juin…

De Gaulle célébré par Chirac en 1974
(Photo AFP)

Les commémorations sont rares dans cette chronique, qui s’inspire plus souvent de l’actualité. Mais le général De Gaulle et le gaullisme n’ont jamais été aussi actuels.

LE SOUFFLE historique a nourri deux exploits indiscutables accomplis par Charles De Gaulle : la résistance et la fin de la guerre d’Algérie. Il est le symbole de l’honneur français, il a eu ce qui donne la dimension d’un homme politique exceptionnel, cette intuition irremplaçable du destin national au moment où la nation s’effondrait. Face aux Britanniques et aux Américains, il a défendu, avec une ardeur et une arrogance téméraire, les intérêts de son pays. Un débat se poursuit encore sur ses positions à l’égard de l’intégration européenne, la sortie de la France du commandement intégré de l’OTAN, toutes les décisions qu’il a prises au nom de la souveraineté française. Il se trouve que, dans l’excès même de ses actes, il y avait une idée qui déplaisait aux « européistes », mais a été en définitive consacrée par nos alliés les plus proches, le Royaume-Uni et les États-Unis, qui, sous la houlette de Boris Johnson et de Donald Trump, ont pris leurs distances à l’égard de l’Union européenne, imitant ainsi les gestes isolationnistes accomplis par De Gaulle.  Si c’était pour en arriver là, pourrait-on dire, il valait mieux, peut-être, rester à l’écart de la grande aventure européenne et atlantique.

À l’horizon : Trump et Johnson.

Pour avoir bien connu Churchill et Roosevelt, De Gaulle a combattu avec vigueur le très long processus européen, mais sans parvenir à offrir un modèle alternatif, bien qu’il ait construit de ses mains la puissance nucléaire que nous sommes devenus. Sa capacité visionnaire était unique, en ce sens que, guidé par l’épreuve épouvantable que fut pour la France la Seconde Guerre mondiale, il a vu qu’il ne fallait pas faire une confiance aveugle à nos deux principaux alliés parce que, un jour, leur égoïsme national l’emporterait sur les liens puissants institués entre Paris, Londres et Washington par un triomphe militaire qui a dessiné le monde où nous avons vécu pendant quelque 70 années. Mais De Gaulle a été ensuite le premier à renouer avec l’Allemagne les relations exceptionnelles dont nous, Français  et Allemands, bénéficions aujourd’hui ; le premier à comprendre l’inanité des aventures et mésaventures coloniales ; le premier à admettre la montée en puissance de la Chine ; et donc le premier à avoir fait de sa propre expérience, le formidable rapprochement des trois alliés de la guerre, le modèle de ce qu’il fallait faire ensuite et qui, appliqué à la lettre, aurait conduit au cantonnement de l’Allemagne sur le bord de la route.

La vraie rupture : le Brexit.

Cependant, si la Grande-Bretagne et la France n’ont pas souffert de la décolonisation, exigée par les États-Unis au nom du testament laissé par Roosevelt, c’est parce que la Communauté, puis l’Union européennes ont contribué à leur prospérité. Personne n’a hésité à dénoncer le thatchérisme comme modèle de cruauté sociale. Mais il ne s’agissait que d’une péripétie dans l’histoire du royaume. La vraie rupture s’appelle Brexit, elle est en cours, elle n’annonce rien de bon ni pour les Anglais ni pour les Européens, tandis que ces deux jumeaux politiques que sont Trump et Johnson cherchent une autre forme d’alliance, celle qui, en réunissant deux égoïsmes, deviendrait un système gagnant-gagnant.  En d’autres termes, la vision à longue distance de De Gaulle était surprenante de lucidité, ce qui ne signifie pas pour autant qu’à l’aune historique le souverainisme doive devenir le socle d’une politique, loin de là. Nous avons de très fortes raisons d’être inquiets, crise sanitaire, développement alarmant des systèmes autoritaires dans le monde, terrorisme, insécurité et la réponse à toutes ces menaces consiste à s’unir pour être plus fort face aux fléaux. La France seule ne peut rien faire et même De Gaulle, s’il n’était pas candidat, applaudirait des deux mains les tentatives d’Emmanuel Macron, président harcelé, discuté et conspué remplaçant un géant de l’histoire, pour donner du souffle à l’unité européenne, dont le présent est si triste, mais l’avenir encore radieux.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Il y a 80 ans, le 18 juin…

  1. Picot dit :

    Non, De Gaulle ne voulait pas d’une Europe fédérale mais d’une Europe des nations, ce n’est pas la même chose. Il voulait une France forte et indépendante, Macron veut une France faible et soumise à Bruxelles, exactement l’inverse. En aucun cas Macron, pas plus que les autres partis dans leur ensemble, ne peuvent se réclamer de la pensée du Général de Gaulle : il n’a pas la carrure et il n’aime ni la France ni les Français.
    Réponse
    Comment ça, une France soumise à Bruxelles ? Genre pieds et poings liés ? Genre menacée par les chars et l’artillerie de l’Union européenne ? Personne n’a jamais dit que Macron est la réplique de De Gaulle. En revanche, vous devez être sourd : tout le monde se réclame de De Gaulle. Vous ne vous en êtes pas aperçu ? Dans votre hâte à écrire tous les jours le même commentaire assassin, vous oubliez sciemment le sujet de ma chronique.
    R. L.

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