Un « ticket » Biden-Harris

La joie de Kamala
(Photo AFP)

Joe Biden a choisi hier Kamala Harris, 55 ans, noire  d’origine indienne et jamaïcaine, pour qu’elle se présente à la candidature à la vice-présidence des États-Unis. Cette décision était attendue et elle n’a pas surpris la classe politique.

C’ÉTAIT aussi le moins mauvais des choix. M. Biden s’était engagé à appeler une femme pour la vice-présidence, afin de mettre l’accent sur ses préoccupations féministes. Il n’a pas souhaité s’allier avec l’une des élues qui militent fiévreusement contre le racisme, ce qui l’aurait contraint à se déporter lui-même vers l’extrême-gauche, au risque de s’aliéner l’électorat centriste. Avec Kamala Harris, il reste à gauche et s’épargne de nombreux conflits sur l’orientation du parti démocrate, dont Trump ne cesse de dire qu’il se transforme en force révolutionnaire capable de semer durablement le désordre dans le pays. Sénatrice de la Californie, Mme Harris a été procureure de l’État. Elle a donc une double formation politique et judiciaire et recueille un concert de louanges dans son camp, pendant que Trump, avec son habituelle vulgarité, la traite de tous les noms, comme s’il suffisait de figurer parmi ses adversaires pour se transformer en monstre. Elle est néanmoins critiquée pour deux raisons : elle a combattu la criminalité avec vigueur alors que celle-ci est plutôt pratiquée dans les minorités ; elle n’a pas toujours été tendre avec Biden qu’elle voyait ironiquement comme « vice-président », la présidence devant, selon elle, lui revenir.

Un choix de rassemblement.

Joe Biden a donc fait de son mieux pour rassembler les démocrates en choisissant une femme très engagée en faveur des libertés mais pas au point d’ostraciser les forces de l’ordre, comme c’est la tendance chez plusieurs élues du parti qui militent pour « Black Lives Matter », parfois pour le démantèlement de la police et pour des programmes sociaux qui ne sont pas chiffrés. La nouvelle candidate ne se croit pas obligée de s’égosiller à exalter les principes qu’elle défend et qui ne sont, le plus souvent, que des dispositions constitutionnelles. Avec Mme Harris, le candidat démocrate à la présidence ne décourage pas la majorité silencieuse et il peut répondre aux revendications dont l’ambition est non seulement de se débarrasser de Trump mais aussi de mettre en place un programme essentiel contre le réchauffement climatique et pour la protection politique et sociale des minorités. Il n’y a pas de doute : ce sera droite contre gauche et le choix de Mme Harris n’atténuera pas le choc idéologique, lequel sera à la hauteur des divisions du pays. Donald Trump, pour sa part, s’efforcera de démontrer qu’il s’agit d’un ticket « socialiste », à contre-courant de la liberté d’entreprendre. Il le fera sans nuances. Mais il se retrouve déjà dans un étau : le ticket démocrate prépare l’avenir. Biden ne se présentera sans doute pas de nouveau en 2024 (il aura alors 81 ans) et Mme Harris sait que, au delà de la vice-présidence, un cadeau encore plus beau lui a peut-être été fait. Cette stratégie passe évidemment par une victoire à l’élection présidentielle du 3 novembre prochain.

Il vaut mieux en rire.

Pendant ce temps, un autre olibrius, Vladimir Poutine, annonce bruyamment que les Russes ont mis au point un vaccin contre le Covid-19 et qu’il est si sûr de sa fiabilité et de sa durabilité qu’il n’a pas hésité, ce brave, à faire vacciner sa propre fille. Jamais fake news n’a été aussi grossièrement fabriquée. Les déclarations de Poutine ont été accueillies avec un fracas de dénégations dans le monde politique et médical, étant entendu qu’il est impossible, même pour le génie de la Russie, cette puissance qui dépasse à elle seule l’Amérique et la Chine réunies, de ne pas tester la population à une échelle beaucoup plus élevée avant de vanter les mérites d’un vaccin. M. Poutine, qui croit avoir gagné la course spatiale, s’est lancé dans ce sprint médical avec un seul souci : non pas de guérir les malades, mais de glorifier la grandeur russe. Pour y parvenir, il s’est confronté à l’autre idiot de service en se livrant à un pur effet d’annonce qui ne signifie rien scientifiquement mais tend à placer la Russie en tête des grandes puissances, ce que son état économique, social et sanitaire ne garantit nullement. Sic transit gloria mundi. Le pire, peut-être, ce n’est pas le mensonge et la communication délirante, c’est de fabriquer un bobard si bête et si flagrant qu’on en rit avant même de l’écarter d’une pichenette.

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Une réponse à Un « ticket » Biden-Harris

  1. Laurent Liscia dit :

    L’avenir de Kamala : très bien vu! Elle a en effet l’envergure nécessaire pour devenir la première présidente des Etats-Unis, même si on retrouve chez elle certains des traits qui ont valu à Hillary sa défaite: sa « froideur », son sens des affaires (sans sombrer dans l’affairisme), et en tant que procureuse, sa « dureté » – du moins, perçue par l’extrême-gauche. Souvenons-nous des insultes proférées par Tulsi Gabbard, la candidate hawaïenne à la présidence. Kamala n’a pas en revanche le passé des Clinton. Son ambition féroce lui réussit. Et rien ne semble lui résister aujourd’hui. Voyons ce qu’en pense le public américain. Les centristes, comme tu dis, sont en tout cas rassurés.

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