Dans la dernière ligne droite

Macron et Mélenchon
(Photo AFP)

Tout le monde s’accorde à dire que le second tour ne sera pas une réédition de 2017. L’écart entre les deux candidats sélectionnés est largement insuffisant. Les scores de Marine Le Pen et d’Emmanuel Macron au premier tour, déjà considérables,  ne peuvent être améliorés que par une ponction dans les suffrages qui se sont portés sur Jean-Luc Mélenchon.

LE CHEF des Insoumis peut donc se targuer de s’être imposé comme l’arbitre du second tour et comme un faiseur de roi ou de reine. Les électeurs, de quelque bord qu’ils appartiennent, ne sont pas la propriété de celui qu’ils ont choisi au premier tour. S’il existe un paradoxe dans le choix de l’extrême gauche suivi d’un vote en faveur de la macronie, il y a la même incongruité, pour un Insoumis, dans le choix de l’extrême droite. Certes, l’aversion pour Emmanuel Macron, qui est indéniable, et certaines affinités entre les programmes du RN et de la France insoumise, peuvent mettre en danger la candidature de Macron. Mais la pression nationale en faveur du président sortant est énorme. Je ne crois pas qu’un seul électeur du second tour ne soit fasciné par la responsabilité qu’il porte. Les appels lancés par des quantités de groupes d’intellectuels, d’artistes, d’écrivains et des chefs de parti sont multiples et devraient finir par recomposer le Front républicain.

Dix points d’écart.

Dire que ce front existe encore ne signifie pas que la tâche de Macron en sera facilitée. Les sondages montrent tout de même un rapport de forces de l’ordre de 55/45 % en faveur de Macron. En une semaine, il a suivi une pente ascendante. Des millions d’électeurs refusent de mettre au pouvoir le Rassemblement national. Cela prouve l’importance du scrutin, l’impérieuse nécessité de la participation et la combativité des démocrates appelés aux urnes. Cela prouve aussi que, s’il est réélu, le président candidat sera l’obligé de tous ceux qui l’auront soutenu, à droite ou à l’extrême gauche.

Marine isolée.

Depuis le 1er avril, la scène politique a profondément changé, même si le président de la République a emporté le premier tour avec cinq pour cent de voix d’avance et même si Marine Le Pen est isolée, sans vraiment bénéficier d’une réserve de voix. Beaucoup du comportement de l’électorat dépend du débat de mercredi prochain. M. Macron s’est lancé dans la campagne, après l’avoir ignorée ; il a reconnu que Mélenchon avait instauré un nouveau rapport de forces dans le paysage politique ; il tente sans relâche de convaincre la gauche de le rejoindre et il lui donne des gages, par exemple, la promesse de négocier sérieusement la réforme des retraites.

Meilleur pour le débat.

Il ne faut pas craindre le résultat d’un débat qu’il reste parfaitement capable de gagner, même si Marine Le Pen lui réserve des banderilles qu’il n’a pas prévues. Il sera, quoi qu’il arrivé, plus tranquille qu’elle ; il sera plus convaincant, plus érudit, plus maître des données qu’il exposera, plus agressif au sujet des compétences réelles ou contestées de son adversaire, plus apte à démonter des accusations qu’il est facile de proférer à l’encan, moins facile d’imposer à l’écran. Il y a enfin un autre élément qui joue en faveur du président : quelle que soit la taille du noyau irréductible qui le hait, il a une mémoire, une éloquence, des connaissances historiques, économiques et diplomatiques que Marine Le Pen n’a pas. On peut craindre la cohérence des propos de la candidate, ceux de Macron ne seront pas incohérents. Il doit, bien sûr, changer de stratégie et tenir compte du nouveau rapport de forces. Il ne saurait être aussi condescendant qu’en 2017. Il ne faut pas qu’il ait l’air de lui faire la leçon. Il ne faut pas qu’il arrive au débat en terrain conquis. Il faut qu’il montre enfin une facette plus humble de sa personnalité.

Rempart contre l’extrême droite.

Il a commencé à le faire. Le seul fait qu’il sollicite, sans trop se cacher, les suffrages de l’extrême gauche en promettant de modifier son programme pour lui donner des gages,, indique qu’il est réaliste au sujet de ses chances personnelles, de la difficulté de débattre avec une candidate qui le déteste, qui peut avoir en sous-main un scandale, réel ou factice, mais propre à faire basculer le débat en sa faveur. Il demeure néanmoins que Macron ne représente plus la droite ou la gauche, les centristes ou les « progressistes ». Il représente le rempart contre l’avènement d’un parti voué à démolir la Vème République et qui, se situant dans ce mode proprement révolutionnaire, devrait séduire les Insoumis, eux aussi engagés dans la création  de la VIème République.

RICHARD LISCIA

 

 

 

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