La riposte du char à voile

Christophe Galtier et Killian Mbappé
(Photo AFP)

On ne sait pas trop si l’entraîneur du P-SG, Christophe Galtier, qui a suggéré le char à voile comme moyen, pour son équipe, de se rendre à Nantes, s’est livré à une boutade ou à la réflexion d’un homme las des injonctions. Mais le mot a éclipsé en une seconde les inquiétudes liées à l’énergie.

LA PREMIÈRE ministre, Elisabeth Borne, n’est pas restée inerte. Elle a dit que nous sommes tous concernés par le réchauffement climatique et que les footballeurs professionnels doivent choisir un mode de locomotion moins polluant, le train par exemple. On peut rire du mot de M. Galtier, on peut en être consterné, car lui et son équipe exercent sur la jeunesse un magnétisme plus fort que l’éducation scolaire. On peut aussi voir dans cet épisode la fin d’une période dont nous avons savouré les plaisirs sans imaginer que nous courions à son terme.

Un combat sans grâce.

La question du climat est éminemment politique. On y apportera une réponse seulement si on réunit les bonnes volontés. M. Galtier vient de nous dire qu’il ne se sent pas concerné par les interdictions et recommandations du pouvoir et que le public n’est intéressé que par la compétition, pas par le voyage. On mesure ainsi la difficulté qu’il y aura à rallier l’ensemble de l’opinion à un combat sans grâce (ils le sont tous), avec des restrictions désagréables pour tout le monde mais dont les as du foot seraient préservés parce qu’ils auraient conquis de haute lutte leur statut de privilégiés. Il y a, dans l’attitude du P-SG, un arrogance de très mauvais aloi, assortie d’un humour facile, qui n’est pas exactement la tasse de pétrole que nous sommes tous obligés d’avaler.

Pression immense.

Les Français, comme d’habitude, ont mis beaucoup de passion dans la dissection du propos de M. Galtier, sans se douter qu’il serait éphémère et ne risquait pas de rester dans l’histoire. Le moment venu, quand les premiers frimas nous auront fait frissonner, la pression sur les footballeurs-voyageurs sera immense et ils n’échapperont pas à la sobriété recommandée avec tant d’insistance par les pouvoirs publics qu’elle a pratiquement force de loi.

Un regard sans indulgence. 

Faut-il, pour autant, que toute application d’une mesure passe nécessairement par un bras-de-fer entre l’État et les consommateurs ? Dans cette affaire, le gouvernement actuel ne représente pas un camp contre l’autre. Encore une fois, nous sommes tous engagés dans cette bagarre. Au même titre que la dette nationale, nous sommes comptables de la France que nous laisserons aux générations suivantes. Nous ne nous laisserons pas impressionner par un refus, fût-il métaphorique. On pouvait en rire, et encore, mais dans la minute qui suivait, le pays lançait à M. Galtier et à Killian Mbappé, assis auprès de lui, un regard dépourvu de toute indulgence.

Aller au Qatar en char à voile.

En effet, le mot de M. Galtier reposait sur la défense d’un privilège : celui de joueurs de foot qui, avant le match, doivent être cocoonnés, massés dans le sens du poil, en pleine forme. C’est un métier, coco ! et tout le monde ne peut pas être un grand footballeur. Et pourtant non, cette science du foot, qui s’appuie sur la force, le talent et l’ingéniosité, ne doit pas devenir un immuable privilège. Le train en première classe n’est pas le véhicule le plus humiliant. Il y a maintenant une règle : remplacer l’avion par le train pour les trajets courts. On ne demande pas aux équipes de foot d’aller au Qatar en char à voile.

Une première classe élargie.

Les footeux rejoignent ainsi les chefs d’entreprise qui voyagent dans un jet privé pour un oui ou pour un non. La particularité du réchauffement climatique, c’est qu’il est aveugle aux différences sociales et qu’il met tout le monde au même niveau. Peut-être la SNCF devra-t-elle élargir sa première classe pour accueillir footballeurs, chefs d’entreprise, familles riches, cadres supérieurs, auxquels le voyage de Nantes ne sera jamais interdit. La sobriété est la vertu des gens simples qui ne se prennent pas pour des dieux.

Mais l’histoire finit par un happy end : M. Galtier s’est excusé et a fait amende honorable.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à La riposte du char à voile

  1. Laurent Liscia dit :

    Galtier est un entraîneur de génie, et un communicateur médiocre. C’est bien qu’il ait reconnu son erreur. Prenons le train. Et demandons-nous aussi pourquoi l’avion est si polluant ; les Boeing et Airbus sont des gens très malins, ils devraient pouvoir produire des véhicules plus efficaces. Au lieu de developper des monstres comme le A380 (au demeurant saisissant), ils pourraient peut-être mettre au point des avions plus petits, confortables et moins polluants. Allez Galtier, on ne t’en veut pas.

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