Liz Truss succède à Johnson

Johnson, Priti Patel (ancienne ministre) Liz Truss et Rishi Sunak
(Photo AFP)

Les membres du parti conservateur ont élu Liz Truss, ex-ministre des Affaires étrangères, pour remplacer Boris Johnson, dont le parti exigeait le départ. Elle a largement battu Rishi Sunak, ex-ministre de l’Économie.

LES BRITANNIQUES se réjouiront peut-être de ce changement, mais Mme Truss ne diffère de Boris Johnson que par le style, d’où les facéties et privates jokes sont absentes. En France, il sera difficile de s’enthousiasmer pour une femme politique, qui a promis de gouverner comme Margaret Thatcher, laquelle n’a pas laissé un souvenir vraiment agréable. Comme on lui demandait si Macron, à ses yeux, était l’ami ou l’ennemi, elle a répondu qu’elle le jugerait sur ses actes.

Le « pote » de Boris.

Cette réponse de Normand est de très mauvais goût. Boris Johnson a dû se lancer à la rescousse du président français qu’il considère comme un pote. La remarque de Liz Truss suffit à la définir : arrogante, dépourvue de courage politique et prompte à sacrifier ls relations de son pays à sa propre cause. Sa réponse a été payante, mais c’est une forfaiture car si M. Macron risque d’être « l’ennemi » du Royaume-Uni, comment la nouvelle Première ministre devra-t-elle considérer Vladimir Poutine ? En réalité, on peut craindre que Mme Truss n’a pas de conviction personnelle, et qu’elle avance au gré du vent.

L’avènement du populisme.

Elle a été l’ennemie du Brexit jusqu’en 2016, cette année fatale où le Premier ministre d’alors, David Cameron, a proposé un référendum sur le Brexit, avec la certitude qu’il serait rejeté par le peuple britannique. Hélas, le Brexit a été adopté par une marge faible et a aussitôt divisé en deux clans les sujets de Sa Majesté. La Première ministre de l’époque, Theresa May, avec une honnêteté sans failles, a tout fait pour que le Brexit fût instauré, mais en essayant d’en limiter les effets négatifs nombreux pour la Grande-Bretagne. Hélas, Cameron avait sorti de la vase un populisme tout-puissant qui entendait aller plus vite.

Le Brexit en tant que triomphe historique.

De sorte que Boris Johnson a en quelque sorte accéléré la négociation, accepté des compromis qu’il n’a pas tenus, et s’est lancé dans une illustration et défense de la solitude nationale avec un enthousiasme que la réalité des faits ne suggérait guère. Les mensonges qui avaient émaillé la campagne pour le Brexit ont été suivis par la mauvaise foi des négociations et aujourd’hui, Mme Truss n’est élue que parce que, peu soucieuse de défendre ses propres idées, elle a épousé la cause du Brexit avec la foi du charbonnier. Ce qui laisse deviner à quel point, en dépit du mécontentement d’une bonne moitié de la population, la sortie de l’Union européenne est considérée comme un acte positif et historique.

Le seul espoir : les élections.

Et ce qui laisse entendre que, avec Truss au pouvoir, il n’y aura pas de changement par rapport à la politique de Boris Johnson. Le Brexit s’est imposé avec le temps et la nostalgie du statu quo ante tend à disparaître, en dépit des manifestations monstres qui exigent une re-négociation. Le seul espoir pour les pro-européens, ce sont les élections générales. Si elles avaient lieu aujourd’hui, les Tories les perdraient au profit des travaillistes. Ceux-ci sont-ils prêts à gouverner ? Il vaut mieux qu’arrivent au pouvoir des gens sincères que d’assister au spectacle de cette course à la surenchère offert par l’élection de Liz Truss.

Nous ne pouvons pas dicter à nos amis anglais le destin qu’ils doivent choisir. Ils sont eux-mêmes des funambules qui ignorent de quel côté ils vont tomber. Mme Truss ne songera guère à provoquer des élections anticipées sauf si l’hiver prochain fait des ravages dans son pays. Mais un jour il y aura des élections générales et les travaillistes seront chargés de gouverner. Il ne s’agit plus d’être de gauche ou de droite, mais de savoir si le pouvoir en Grande-Bretagne peut être confié à des gens sérieux qui ont le sens des réalités.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Liz Truss succède à Johnson

  1. Laurent Liscia dit :

    La Grande-Bretgne souffre du même mal que la France : la nostalgie du passé impérial, et l’illusion de son importance dans le concert des nations. La France commence à peine (en temps socio-politique, à savoir plusieurs décennies) à embrayer sur la réalité européenne, où l’Union fait littéralement la force. Le renoncement au franc et l’adoption de l’euro furent une thérapie de choc. La Grande-Bretagne est amoureuse de sa livre sterling, semi-monnaie de réserve, et demeure crispée sur une idée d’elle-même qui n’existe plus. Le Brexit est une conséquence de cette nevrose collective (au moins à 50 %), et on voit que les Anglais vont littéralement payer le prix le plus fort d’Europe pour la crise ukrainienne. Même s’ils reviennent sur leur décision à l’occasion d’élections générales, ils demeureront insulaires. On en vient à souhaiter que les Écossais provoquent une crise constitutionnelle en exigeant de rentrer dans la Communauté. Voila un peuple qui a renoncé au fatras des traditions.

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