Retraites : le plan de Macron

Des retraités pour une promenade en hélicoptère
(Photo AFP)

Le président de la République n’a pas renoncé à sa réforme des retraites et il entend l’amorcer dès cet automne. De quelle manière pourra-t-il la faire adopter contre le rejet du Parlement et d’une majorité de la population ? Il a choisi une voie périlleuse.

PRATIQUEMENT, une réduction drastique des dépenses relatives au versement des pensions, est le seul moyen encore crédible d’espérer un retour à l’équilibre budgétaire, ou plutôt une orientation vers cet équilibre. Le problème ne se réduit pas à une affaire de gros sous, il est politique. Depuis qu’Emmanuel Macron ne dispose que d’une majorité relative, les multiples oppositions de droite et de gauche ne songent qu’à abattre l’exécutif actuel. N’importe quel conseiller réaliste du président lui suggérerait de renoncer à la réforme. Mais M. Macron ne l’entend pas de cette oreille. Il ne veut pas être immobilisé dès le début de son second et dernier mandat et il pense que, s’il ne bouge pas, il devient un roi fainéant.

Le recours au 49/3.

La réforme des retraites va dans le sens des idées de LR. Logiquement, philosophiquement, la droite classique rêve depuis longtemps d’équilibrer les comptes des 42 régimes de retraite. Mais la passion anti-Macron est très vive chez certains leaders LR, comme Éric Ciotti ou Bruno Retailleau. En d’autres termes, la coopération attendue des Républicains n’est nullement garantie. Le président sortirait alors son arme fatale, le recours à l’article 49/3 de la Constitution qui lui permettrait d’obtenir le passage sans vote de la réforme.

Mesure inique ?

Il ne serait ni le premier ni le dernier à s’emparer de cette prérogative. Il envisage de lier la réforme à la loi de Finances, au sujet de laquelle il a un droit de tirage illimité du 49/3. Dans ce projet certes tortueux et peu glorieux, puisqu’il s’appuie sur l’usage le moins démocratique de la Constitution, il y a une ignorance délibérée du contexte politique. Emmenés par le Rassemblement national et la France insoumise, les Français, hostiles dans leur majorité (mais pas les retraités eux-mêmes) à la réforme, pourraient bien descendre dans la rue avec un slogan dénonçant une mesure inique.

Une malédiction.

La retraite, depuis des années, s’est transformée en syndrome national. Elle est indispensable parce que le déficit des régimes est ruineux, même si, à la faveur de l’épidémie, ils ont engrangé un surplus qui ne risque pas de durer. Nous vivons plus longtemps et en meilleure santé et il est donc logique que nous travaillions plus longtemps au cours d’une carrière qu’il faut allonger. Mais la notion de droits acquis est durement ancrée dans les esprits de nos concitoyens ; le projet de réforme est frappé par la malédiction, par la pire des réputations, alors que le système ne peut être sauvé que s’il résorbe son déficit.

Pas d’alternative.

M. Macron, en outre, doit présenter un projet exigé de lui par les règles européennes. Face à l’Union, il ne saurait se contenter de dire que la réforme n’est pas populaire. Il faut qu’il entretienne la bienveillance de Bruxelles en lui donnant des gages. Enfin, il n’y a pas d’alternative au prolongement des carrières : la pression fiscale étant à son comble, la hausse des impôts n’est pas la panacée ; on ne réduirait les pensions qu’en déclenchant une explosion, de même qu’on obtiendrait le même résultat si les cotisations étaient augmentées. Je veux bien que la politique ait des exigences contradictoires, mais la sagesse n’est pas dans le camp de ceux qui veulent ramener le départ à la retraite à 60 ans. Ceux-là rêvent d’un paradis sous lequel s’allumeraient les feux de l’enfer.

M. Macron a donc la logique avec lui, pour autant que ses détracteurs finissent par en convenir. On nous assez rappelé qu’il ne pouvait pas se présenter à un troisième mandat pour qu’il tente de rendre utile le second. Il n’a rien à perdre, sinon le risque d’une explosion sociale. Mais il en a vu d’autres. Et on ne le changera pas : il garde ce grain de témérité juvénile qui lui a parfois fait dire des bêtises mais aussi agir à contre-courant des positions médiocres de ses pires censeurs.

RICHARD LISCIA

 

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2 réponses à Retraites : le plan de Macron

  1. Laurent Liscia dit :

    C’est le genre de ténacité qu’on attend d’un vrai dirigeant.

  2. Dominique S dit :

    A les écouter, beaucoup de commentateurs considèrent que cette réforme n’est pas nécessaire. « Quelle mauvaise idée de vouloir faire travailler les gens plus longtemps? » Pourquoi? Tout simplement parce qu’ils ne sont pas d’accord. « Il suffit de regarder les sondages ». Heureusement, la réponse de Laurent Liscia me rassure.

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