Comment Macron voit la guerre

Biden et Poutine l’an dernier à Genève
(Photo AFP)

Dans son entretien hier soir avec France 2, Emmanuel Macron a tenu des propos équilibrés et dépourvus de tout agacement, mais il a manqué de discrétion en ce qui concerne la dissuasion nucléaire.

C’EST sur l’insistance de Caroline Roux, qui l’interrogeait, que, après avoir expliqué qu’il serait muet sur une éventuelle attaque nucléaire de la Russie contre l’Ukraine, il a décrit une possible riposte française, qui serait du même ordre. Cette réflexion aura paru d’autant plus risquée qu’il n’a cessé de rappeler, au cours du même entretien, que notre pays n’était pas belligérant. Les allusions de Moscou à l’usage d’armes nucléaires tactiques peuvent relever du bluff, du ballon d’essai ou de la menace sincère. Joe Biden, le président des États-Unis, a eu l’occasion de dire il y a quelques jours que la riposte américaine serait à la mesure de la provocation russe, mais il a fait ensuite corriger ses propos par ses services.

Le silence absolu.

En pratiquant la politique du bord de l’abîme, Vladimir Poutine a libéré les médias mondiaux qui n’ont pas cessé de réclamer une réaction occidentale, laquelle est diamétralement contraire à tout commentaire. La doctrine en matière de dissuasion est le silence absolu sur le recours éventuel à la force atomique. Si Poutine a été le premier à dégainer, c’est tout simplement parce qu’il est aux abois. Ce n’est pas le cas de Biden et de Macron, qui doivent impérativement le laisser dans l’incertitude. Cependant, il n’est peut-être pas inutile d’indiquer qu’une telle initiative de Poutine se traduirait aussitôt par une apocalypse, comme Biden l’a dit dans un premier temps.

Le précédent cubain.

Ces discussions publiques indiquent assez clairement que l’affrontement entre la Russie et les Occidentaux est d’une gravité assez comparable à la crise des missiles de 1962. Khrouchtchev voulait installer des missiles chargés d’ogives nucléaires à Cuba, Kennedy lui a fait savoir que les États-Unis s’y opposeraient par la force, de sorte que les cargos soviétiques ont rebroussé chemin. C’est justement parce qu’il y a un précédent que l’attitude de Poutine est particulièrement risquée.

Toujours la crise de l’essence.

Macron n’a pas démérité, qui a fait d’intéressantes déclarations. Il a refusé de s’impliquer dans la crise des carburants en France, en expliquant qu’il n’appartient pas au président d’assurer la négociation entre les syndicats et les entrepreneurs de l’énergie. Il a affirmé que le problème serait résolu en milieu de semaine prochaine, mais il a péché par optimisme : ce matin, l’insuffisance de ravitaillement affecte 30 % des stations services françaises.

Des sous !

L’urgence commande aux pouvoirs publics d’inciter les partenaires sociaux à négocier sans désemparer. FO s’est mise en grève, renforçant ainsi la position ingransigeante de la CGT. Les grévistes considèrent la réquisition comme une atteinte au droit de grève, ce qui n’est pas vrai, et du coup, ils rejettent en bloc les propositions financières de Total-Énergies. On assiste là à un conflit titanesque entre deux formes d’irrédentisme, celui des syndicats qui pensent presque à voix haute à une grève générale et celui des sociétés pétrolières qui ne veulent pas diriger une partie de leurs bénéfices vers leurs employés.

Pris en tenaille entre ces deux immobilismes, les conducteurs sont contraints à faire des queues de plusieurs heures pour obtenir l’essence salvatrice. Je ne doute pas que la Première ministre fait tout ce qui est en son pouvoir pour trouver une solution, mais elle n’est pas plus qualifiée que le président pour siffler la fin de la partie.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Comment Macron voit la guerre

  1. Dominique S dit :

    On a reproché à Biden d’avoir assuré que les Etats Unis n’interviendraient pas en cas d’invasion de l’Ukraine. On a reproché à Obama de ne pas avoir mis ses menaces à exécution à propos de l’utilisation des armes chimiques en Syrie. La Première ministre britannique a fait la même réponse que Macron aux journalistes. L’équilibre est difficile à trouver dans ce jeu de poker menteur.

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