La tentation totalitaire

La vengeance pour projet
(Photo AFP)

Le nombre de démocraties ne cesse de diminuer dans le monde. Il est difficile d’en dresser la liste dans la mesure où nombre de nations se sont dotées d’institutions à l’apparence démocratique mais n’en sont pas moins autoritaires. 

C’EST L’ÉVOLUTION régulière des régimes depuis le début du XXIè siècle. Sur tous les continents, le suffrage universel est mis en doute et s’il est officiellement appliqué, il sert les intérêts du potentat en place. Les États où les élections ont lieu s’en servent pour perpétuer le pouvoir d’un seul homme. Même en Europe, où les conditions d’adhésion sont strictes, le pouvoir a parfois inventé la démocratie dite illibérale, qui est une façon de contourner les contraintes liées au  suffrage universel.

Des systèmes imparfaits.

En Amérique Latine, la majorité des peuples sont soumis à un gouvernement autoritaire. Même aux États-Unis, une bonne moitié de la population remet en cause l’unité de la Fédération et veut se donner un leadership prêt à changer la constitution pour satisfaire ses ambitions : isolationnisme, nationalisme, et rejet des grands ensembles. En ôtant les limites de son pouvoir, grâce à une succession de référendums, ou à des systèmes électoraux qui distinguent la majorité populaire et celle des grands élus, comme aux États-Unis, un candidat à la présidence peut être élu même s’il est minoritaire en voix populaires. Ce fut le cas de Trump en 2016 qui entra à la Maison Blanche avec trois millions de voix de moins qu’Hillary Clinton.

La cas Poutine.

L’autre aspect du durcissement  politique des régimes autoritaires, c’est qu’ils exportent leur propre évolution et offrent un exemple ou une tentation pour les pays respectant le suffrage universel. Vladimir Poutine apparaît aujourd’hui comme un monstre capable de détruire la totalité de l’Ukraine, il a encore des amis au Brésil, peut-être en Inde, et dans divers pays qui souhaitent, par exemple, avoir tous les avantages de la construction européenne mais en refusent toutes les contraintes.

Des régimes anti-écologiques.

On aura remarqué sans doute que la tentation illibérale ou totalitaire se répand de plus en plus dans le monde depuis le début de ce siècle. Elle coïncide avec ce cauchemar qu’est le réchauffement climatique. Inutile de dire que les pays à régime autoritaire entendent ne jamais rendre compte de leur politique environnementale. Ils n’en ont pas, même s’ils feignent de partager la préoccupation écologique des pays démocratiques, seul siège d’un débat qui concerne notre existence même et les dangers auxquels à terme nous serons exposés.

La paix s’éloigne.

Le despotisme a, pour ceux qui le pratiquent, l’avantage de les libérer de toutes les contraintes. Non seulement ils n’écoutent pas les pays engagés dans la lutte contre l’effet de serre, mais ils ont bel et bien l’intention de les conquérir. La Russie, par exemple, a des visées sur l’Ukraine, sur la Géorgie et sur la Moldavie. Poutine n’a toujours pas compris que s’il appliquait une politique libérale, il ne se croirait pas cerné par l’OTAN. De la même manière, la Chine se croit obligée de se venger des années d’humiliation que lui ont fait subir des armées impérialistes. Inutile de rappeler à Pékin que le statut mondial de la Chine a  changé et que, si la Grande-Bretagne et les États-Unis doivent payer chaque exaction qu’ils ont exercée autrefois sur les Chinois, la paix sera impossible et pour longtemps.

Le G40 des assassins.

Le plus consternant est qu’un nouvel ordre mondial est en cours de constitution avec la participation des pires roitelets de la planète. La Ligue arabe s’est réconciliée avec Bachar Al Assad, le bourreau syrien qui a exterminé son peuple ; l’Iran et l’Arabie saoudite, que la religion sépare, commencent à se rapprocher ; le prince Mohamed Ben Salman, celui qui a fait exécuter un dissident dont le corps a été disloqué et fondu dans la soude au siège de l’ambassade saoudienne en Turquie, est passé du statut de paria à celui d’un des tout premiers diplomates arabes. Ne parlons pas des Iraniens qui auront bientôt l’arme nucléaire mais retrouvent pignon sur rue, ni de l’Afghanistan livré à des djihadistes qui, aujourd’hui, réclament une aide financière américaine ou des Pakistanais qui se chamaillent au sommet tandis que le peuple attend une meilleure gestion.

Non sans horreur, on imagine une sorte de G30 ou 40 qui réunirait tous les assassins notoires que l’on trouve à la tête de la diplomatie internationale. Ce n’est pas seulement consternant, c’est affolant.

RICHARD LISCIA

 

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2 réponses à La tentation totalitaire

  1. Laurent Liscia dit :

    Aux Etats-Unis, le système des grands électeurs est d’autant plus consternant qu’il a été fondé sur deux idées apparemment démocratiques: les grands électeurs représentent la sagesse du peuple et peuvent le protéger de lui-même (même si ca n’est jamais arrivé …); et quand il s’agit de choisir un président, les États doivent avoir autant de poids que la majorité nationale. On sait de quoi l’enfer est pavé. Je ne crois pas cependant que les démocraties reculent; ce qui avance, c’est la peur et son vassal, le déni. La nouvelle croyance c’est qu’on peut non seulement fonctionner comme on l’a toujours fait, même comme on le faisait au bon vieux temps de Staline, de Mao, du féodalisme musulman, de Pétain, la liste est longue. Face au changement de climat, à la crise écologique, à la surpopulation, et maintenant aux menaces de guerre, rien de tel que de s’inventer un Age d’Or qui n’a jamais existé. En Amérique ce sont les années 50. Avant Martin Luther King et toutes ces idees farfelues, comme l’égalité des races et des sexes, et l’avortement légal.

  2. Doriel Pebin dit :

    Bonjour, essayons un peu d’optimisme mais finalement plutôt réaliste. La démocratie reste le système le plus attractif car sans exception, aucune population des pays non démocratiques ne soutient ses dirigeants autocrates. C’est une réalité. C’est le propre d’ailleurs des autocraties de réduire l’expression du peuple… par définition. Par ailleurs, les mouvements d’immigration ne se font pas vers des pays non démocratiques où ils ne bénéficient d’aucun droit. Finalement, cette attaque contre les démocraties est rassurante. Cela prouve que les pays autocrates en ont peur ce qui est donc un argument en faveur des démocraties et le retour possible sinon probable des habitants des pays autocratiques vers la démocratie. Raisonnement par l’absurde, ce sont ces populations bâillonnées qui ressentent et savent vraiment ce qu’est une dictature à la différence de certains Français militants qui osent se dire en dictature en France (qu’en pense un Russe ou un Chinois ?)

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