Rien ne va plus

Face à la révolte sociale
(Photo AFP)

Il n’y a pas une journée qui n’apporte son lot de mauvaises nouvelles. Le produit intérieur brut (PIB) s’est contracté de 0,1 % au troisième trimestre après un bond positif de 0,5 % au deuxième trimestre, qui n’aura donc été qu’un feu de paille. « Le Figaro » publie ce matin une note confidentielle des préfectures qui décrivent « une société en proie à la crispation, à la l’exaspération et à la colère ». L’OCDE (Organisation pour le coopération et le développement économique, qui surveille l’économie des pays dits industrialisés) dénonce le manque de productivité des salariés français, trop cher payés et qui ne travaillent pas assez.

LA CONTRACTION  de l’économie au troisième trimestre est due principalement à l’insuffisance de nos exportations. Notre perte de compétitivité demeure alarmante. L’OCDE constate les dégâts causés par la semaine de 35 heures et le manque de qualification de nos salariés, qu’elle attribue à un système d’éducation en déclin. Dix-huit mois après leur victoire électorale, les socialistes continuent à attribuer leurs difficultés à l’héritage laissé par Nicolas Sarkozy. Mais les observateurs les moins concernés par les politicailleries françaises font remonter la source de nos ennuis aux 35 heures, voulues par le gouvernement Jospin et appliquées avec zèle par Martine Aubry, considérée aujourd’hui comme une « Première ministrable ».

Rien de réjouissant.

Personne, pourtant, ne devrait se réjouir de cette prolongation pratiquement insupportable de la crise. L’affaiblissement manifeste de l’État, qui n’est plus sûr de mener à bien ses réformes, l’impopularité sans précédent du président de la République, la révolte des contribuables, les manoeuvres de l’extrême droite qui tente d’ajouter l’abaissement de la démocratie aux peurs sociales sont autant de freins à la conduite des affaires. Nous pouvons critiquer telle ou telle réforme, tel ou tel programme, nous ne pouvons pas préférer le néant à une politique imparfaite.

Le diagnostic du mal français est établi de longue date. On a beaucoup tardé à envisager un traitement. Certains remèdes ont aggravé le mal. Mais ce n’est pas le pire. Le pire, c’est que rien ne permet de croire aujourd’hui que le gouvernement a assez d’autorité pour continuer à lever l’impôt (imaginez seulement ce qui va se passer le 1er janvier 2014 quand la hausse de la TVA sera appliquée), pour négocier au sein de l’Union européenne, pour tenir tête à l’Allemagne, accusée par la Commission de Bruxelles de ne pas consommer assez et donc de ne pas entraîner le reste de l’Europe dans sa marche triomphale. La sénatrice Marie-Noelle Lienemann, qui se situe à la gauche du PS, exige de François Hollande qu’il obtienne de l’Allemagne la parité euro-dollar. Une fois encore, on se nourrit d’illusions. Aucun gouvernement ne peut décider de la valeur d’une monnaie, qui dépend uniquement de l’offre et de la demande. Pour faire baisser l’euro, il faudrait que l’Allemagne se lance dans des dépenses somptuaires, ce qui n’est pas du tout son genre.

Danger politique à l’horizon. 

En outre, une baisse de l’euro provoquerait une hausse du déficit de notre balance commerciale, à cause de nos importations d’énergie. Ce n’est donc pas une solution. Bruxelles ne réussira pas davantage à obliger l’Allemagne à se lancer dans une politique de la demande. Nous n’avons pas d’autre choix que d’améliorer notre compétitivité industrielle, ce  à quoi nous nous employons de diverses manières (pôles d’excellence,  crédit d’impôt compétitivité emploi, Banque publique d’investissement qui encourage les projets innovants) dont l’effet prendra des années. De ce point de vue, le gouvernement n’est pas inerte.

Et s’il est bloqué dans ses efforts par la révolte sociale, nous en pâtirons tous. Un rejet populaire de tout ce qui est entrepris par le gouvernement aurait des conséquences infiniment plus graves que la destruction de portails ou de radars. Il ravagerait le pays, qui ne renaîtrait de ses cendres qu’au bout de plusieurs années. La leçon de la crise, c’est que, malgré l’appauvrissement des classes sociales, nous sommes encore trop chers et nous continuons à vivre au-dessus de nos moyens. Nous n’arriverons pas à remonter la pente sans de très sérieux sacrifices.

RICHARD LISCIA 

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Une réponse à Rien ne va plus

  1. MOURAUX dit :

    Saine analyse que celle de Richard Liscia. Il faut effectivement du temps pour résorber le déficit et réduire les dépenses. On aurait aimé que les médias produisent les mêmes commentaires sages lorsque Nicolas Sarkozy a mis en place la RGPP. Le non remplacement d’un départ en retraite sur deux procédait de ce traitement à long terme; il répondait à l’impératif de réformes structurelles mais ne pouvait avoir d’effet qu’au bout de quelques années. Or cette disposition a été immédiatement abrogée par François Hollande (comme la TVA dite sociale qu’il rétablit aujourd’hui) quitte à ce qu’il rétablisse ces non remplacements sous une autre appellation.
    L’antinomie politique est telle que toute loi devient volatile au gré de l’alternance et que seul demeure le mécontentement des citoyens contribuables.

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