Un passé pédagogique

Ce matin, à Caen
(Photo AFP)

Il est bon que le président de la République ait consacré (pour la première fois) un discours aux 20 000 victimes civiles de la bataille de Normandie en 1944. Il a mis en valeur le sacrifice de citoyens français qui, comme les militaires arrivés d’Angleterre, ont fait le choix de la liberté de tous au mépris de leur propre vie. La fin du nazisme passait par l’enfer. Ce qui doit nous rappeler combien la guerre est une option à éviter.

LES EUROPÉENS ont fini par en tirer une excellente leçon quand ils ont décidé de créer l’Union européenne, aujourd’hui vilipendée par beaucoup, comme si les terribles tensions de la planète ne risquaient pas de conduire à de nouveaux conflits. Quoi ? Après deux guerres mondiales qui ont fait des dizaines de millions de morts, ont causé aux peuples des souffrances inouïes, ont plongé le monde deux fois dans la barbarie, il faudrait, pour régler un problème socio-économique (grave et durable il est vrai) envisager d’en livrer une troisième en exaltant le nationalisme de chacun ? Inutile de dire que la guerre, de toute façon, n’enrichit personne, ni ceux qui la provoquent, ni ceux qui la subissent.

On ne sait pas comment finit une guerre.

C’est à l’actualité géopolitique que nous pensons quand nous commémorons le Débarquement en Normandie. Il n’est peut-être pas vain de rappeler à Vladimir Poutine que le règlement des différends par la force mène à des maux indicibles, comme en témoigne le début de guerre civile en Ukraine. Il est trop simple de ne voir en Barack Obama qu’un président faible qui déteste tellement la violence qu’elle l’empêche de contenir les forces du mal sévissant en Syrie ou ailleurs. L’homme qui aura assuré, au terme de ses deux mandats, l’évacuation de l’Irak et de l’Afghanistan (même si l’ avenir de ces deux pays est plus qu’incertain) ne veut pratiquer ni la politique du bras-de-fer ni celle du bord de l’abîme. Il a au moins raison sur un point : on sait commencer une guerre, on ne sait jamais comment elle se termine.

On voudrait donc que les électeurs, et plus particulièrement les jeunes, se souviennent de ce qu’il a fallu de courage et de douleur pour que disparaisse un régime barbare et que, en conséquence, ils doivent, en toute circonstance, refuser de voter pour un parti dont les idées contiennent le germe du totalitarisme. L’histoire a cette vertu de nous apprendre que rien n’est vraiment nouveau, sinon les armes, toujours plus dévastatrices. Mais les chemins, souvent démocratiques, qu’empruntent certains partis politiques toujours prêts à promettre la lune mais en réalité assoiffés de pouvoir, aboutissent à des résultats connus. Cela commence par un triomphe, électoral, par exemple, cela se poursuit par leur conquête du pouvoir ; après quoi, ils y restent même s’ils échouent, même s’ils sont désavoués, même si on ne veut plus d’eux. Et ils sont tellement enivrés par leur succès électoral, sinon par leur celui de leur gestion, qu’ils en arrivent à accomplir des actes répréhensibles ou, pis, criminels.

La démocratie, c’est ennuyeux.

L’exercice scrupuleux de la démocratie n’est pas un divertissement, il peut même sembler ennuyeux. L’électeur doit se souvenir tous les jours qu’il est libre, que ce n’est pas donné à tout le monde, que cette liberté est constamment menacée par des peuples ou seulement par des gens qui ont leur propre idée de la manière dont nous devons vivre et veulent nous assujettir à leur philosophie absurde, violente ou déshumanisée ; et que, par conséquent, son vote, s’il est dicté par des revendications légitimes, n’en exprime pas moins la responsabilité, finalement immense, qu’il a face à l’avènement toujours possible d’un pouvoir autoritaire. La guerre contre l’hitlérisme aurait dû nous vacciner pour une longue période. Il n’en est rien si l’on en juge par l’apparition de mouvements d’extrême droite dans toute l’Europe et la résurgence d’un nationalisme menaçant en Russie.

RICHARD LISCIA

 

 

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Une réponse à Un passé pédagogique

  1. A3ro dit :

    J’ajouterai même que l’électeur qui vote a le devoir de s’informer, de comprendre les enjeux et d’analyser la pertinence et la faisabilité des propositions des partis pour pouvoir exercer son vote en toute connaissance de cause. Pour ce faire, il doit bien sûr disposer de médias déontologiques, qui ont aussi le devoir d’exercer leur métier avec sérénité et recul ; mais ça ne l’empêche pas de se renseigner par lui même, surtout à l’heure d’Internet.

    Les peuples ont souvent les dirigeants qu’ils méritent. S’ils élisent des gens malhonnêtes, démagogues, ou incompétents, pas la peine de râler ou manifester, les électeurs doivent assumer. Ils doivent savoir que leur vote les engagent pour cinq ans, en moyenne. Quitte à changer d’avis à la prochaine élection.

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