UMP : un acte de survie

Luc Chatel à la manoeuvre
(Photo AFP)

Au terme d’une réunion bien préparée de son bureau politique, l’UMP a réussi hier soir à sortir du coma. Le triumvirat composé d’Alain Juppé, François Fillon et Jean-Pierre Raffarin a nommé un secrétaire général, l’ancien ministre de l’Éducation Luc Chatel, qui fera fonction de directeur exécutif sous la supervision des trois anciens Premiers ministres. Le dispositif aura pour tâche de préparer un congrès qui aura lieu en principe le 12 octobre prochain.

LA TÂCHE à venir est considérable. Il s’agit d’abord de remettre de l’ordre dans une gestion financière catastrophique qui se traduit par un passif de quelques dizaines de millions d’euros, ensuite de faire face aux poursuites judiciaires que l’affaire Bygmalion ne va pas manquer d’entraîner, enfin de rassurer les militants indignés par des pertes qu’ils ont en partie compensées en puisant dans leur poche. Le nouvel encadrement du parti est rassurant dans la mesure où il réunit des hommes insoupçonnables, mais il ne met pas un terme à des divisions ou à des conflits personnels qui vont s’aggraver à mesure que s’approche l’élection présidentielle de 2017.

Sarkozy affaibli.
Pour le moment, Nicolas Sarkozy semble affaibli : les mesures adoptées vont à l’encontre de ce qu’il préconise puisqu’elles confirment que la désignation par l’UMP de son candidat à l’élection présidentielle passera par une primaire. L’ancien président refuse d’être soumis à ce test politique. Il estime qu’il lui suffit de briguer l’investiture de l’UMP pour l’obtenir, ce que contestent M. Fillon et plusieurs autres candidats plus ou moins déclarés, de Xavier Bertrand à Bruno Le Maire en passant par Laurent Wauquiez, sans oublier Alain Juppé, qui observe soigneusement la scène sans prendre une décision qu’il juge prématurée. En effet, la plus que probable candidature de M. Sarkozy à l’automne prochain, qui coïnciderait donc avec la tenue du congrès du parti, fait peser une incertitude sur la suite des événements.

Avec la démission de Jean-François Copé et le scandale lié au financement de sa campagne de 2012, l’ex-président est beaucoup moins bien placé qu’il y a encore quelques semaines. Sa cote de popularité a commencé à baisser tandis que s’élève celle de M. Juppé. Son autorité sur le parti, naguère absolue, est beaucoup moins ferme aujourd’hui. Les diverses affaires auxquelles son nom est associé, y compris Bygmalion, jalonneront son parcours politique d’ici à 2017 avec des effets négatifs qu’il n’est pas difficile d’imaginer. Ce matin, sur France Info, Luc Chatel s’est bien gardé d’évoquer ce sujet éminemment politique, mettant plutôt l’accent sur une nécessaire reprise en main du parti et sur le travail à faire en direction de militants perplexes, déboussolés ou exaspérés. Il est cependant évident que la réunion d’hier du bureau politique ne constitue qu’une première étape dans un périple ardu et semé d’obstacles.

À la hussarde.


Il n’est pas impossible que M. Sarkozy laisse le parti se requinquer à sa manière, quitte à le reconquérir à la hussarde. Il se peut, à l’inverse, qu’il se résolve à passer par le règlement qui institue la primaire en pensant qu’il n’aura pas de mal à en sortir victorieux. Mais le temps fera son oeuvre. D’ici au congrès, l’instruction des affaires l’affaiblira probablement; s’il s’impose aux autres candidats, il risque ensuite, entre octobre 2014 et le printemps 2017, d’être confronté à diverses poursuites dont les médias feront leurs choux gras, ce qui, de nouveau, plongerait l’UMP dans la tourmente. Or il en va des équilibres fondamentaux du pays : une droite minée par le scandale donnerait au « troisième parti », le Front national, un rôle hégémonique qui priverait l’électorat du choix traditionnel entre droite et gauche.

RICHARD LISCIA

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