UMP : la dislocation

Les quatre mousquetaires
(Photo AFP)

On pouvait espérer que les « quatre mousquetaires » (le triumvirat Raffarin-Fillon-Juppé, assisté de Luc Chatel) sauraient réformer l’UMP en évitant sa dislocation. Le grand nettoyage se transforme en grand déballage. Les comptes de l’UMP révèlent des dépenses indues : l’épouse de Jean-François Copé aurait bénéficié de billets d’avion à hauteur de 24000 euros, Nicolas Sarkozy n’aurait pas dû faire payer par le parti la somme que le Conseil constitutionnel lui réclamait personnellement à cause des dépassements de la campagne électorale 2012, et Xavier Bertrand aurait eu quelques frais non-professionnels.

BIEN ENTENDU, les personnes concernées par ces « révélations », fondées ou non, protestent à grands cris. Surtout Xavier Bertrand, qui rappelle que, tant qu’il a été secrétaire général du parti, il a accumulé les excédents. On n’est plus dans la politique, mais dans les querelles de gros sous. L’état des finances de l’UMP aurait dû faire l’objet d’un rapport précis, exhaustif et dépourvu de tout commentaire, ce qui aurait eu l’avantage, pour les militants, d’observer le désastre à la lumière du jour : on parle d’un déficit de 80 millions d’euros. Au lieu de quoi, les chiffres sont utilisés par les uns pour discréditer les autres. Si l’on se dispute avec une telle acrimonie à propos des comptes du parti, peut-on envisager de gérer une économie à 2 000 milliards d’euros ?

Sarkozy jette le trouble.

Dans ces conditions, on a de la peine à croire que du chaos actuel émergera un commandant de bord capable d’imposer son autorité à tous, de prendre les mesures d’austérité qui semblent indispensables et de remettre rapidement l’UMP sur la voie de l’élaboration d’un programme clair, crédible, convaincant. Les candidats potentiels à la présidence du parti et, au-delà, à la magistrature suprême, s’ingénient à s’affaiblir mutuellement. En déboulant prématurément dans le champ visuel parce qu’il y était contraint par la justice, Nicolas Sarkozy a créé une sorte de panique. Mais sa position personnelle se délite chaque jour : on ne compte plus les affaires dans lesquelles son nom est mentionné et la notion d’acharnement de la justice est largement contrebalancée par l’idée qu’il ne pourra pas mettre en oeuvre sa stratégie de conquête du pouvoir dès lors qu’il sera aux prises avec ses juges.

Sordides divisions.

Il pourrait même rendre un très mauvais service à son camp s’il s’obstinait en comptant sur l’enthousiasme des militants qui feraient de lui le moins bon candidat de la droite, dans un contexte où la gauche arriverait exsangue à l’élection présidentielle. Une fois encore, l’UMP est en train de manquer une occasion inespérée de revenir aux affaires : ses sordides divisions renforcent le Front national, comme cela a été prouvé aux élections européennes, et risquent donc de porter à l’alternance classique un coup mortel. Le plus grave est que, en même temps que se détériorent l’image et la popularité de M. Sarkozy, MM. Juppé et Fillon ne sortent pas indemnes de la machine à laver. Ils laissent, dans le lessivage, un peu de leur prestige et de leur crédibilité. En outre, on devine qu’aucun des candidats potentiels, du plus âgé au plus jeune, ne renoncera à sa chance. La conquête de l’UMP, ou d’une droite autrement nommée, les ratiboisera avant même que le vainqueur dispute le pouvoir à la gauche.

C’est d’autant plus inquiétant que, à défaut d’une victoire de Manuel Valls sur la dissidence socialiste, l’espoir d’un redressement de la France disparaîtrait. L’intérêt de la communauté nationale n’est pas de privilégier un camp par rapport à l’autre, mais d’obtenir des réformes d’autant plus urgentes que leurs résultats n’apparaîtront que progressivement. Sans préjuger de ce qui se passera en 2017 (en général, les bons réformateurs paient leur travail d’une défaite politique), nous avons tout intérêt à ce que M. Valls réussisse le volet économique et social de son programme.

RICHARD LISCIA

 

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