Vaudeville budgétaire

Sapin donne un os à ronger à Bruxelles
(Photo S. Toubon)

Soumis aux critiques de la Commission de Bruxelles au sujet de son projet de loi de Finance pour 2015, le gouvernement français a annoncé une économie supplémentaire de 3,6 milliards d’euros. Il espère trouver cette somme grâce à des taux d’intérêt en baisse qui vont légèrement diminuer le service de la dette, et en améliorant « l’optimisation fiscale », c’est-à-dire la lutte contre la fraude. Quelques centaines de millions seront grappillés sous la forme de taxes.

MICHEL SAPIN espérait passer entre les gouttes, ce ne fut pas le cas. La France a été contrainte de faire des concessions à la Commission européenne parce que le gouvernement italien, lui aussi prié par les autorités européennes d’améliorer son projet de budget, a fait un effort de l’ordre de 4,5 milliards. Mais, dans le cas de la France, il ne s’agit ni d’une réduction supplémentaire des dépenses publiques, ni de nouveaux impôts. Il s’agit, comme le dit François Fillon, de faire de nouvelles hypothèses plutôt optimistes,  et d’espérer qu’elles se réaliseront. Ce qui ne veut pas dire, comme le croient quelques commentateurs, qu’un conflit sérieux  va opposer la Commission au gouvernement français. L’Union veut éviter tout clash politique ; elle a sur les bras le cas du Royaume-Uni, sommé de payer 2,1 milliards d’euros (il s’agit d’un retard de paiement de la contribution britannique au budget européen), ce que le Premier ministre anglais, David Cameron, refuse avec véhémence.

Partie de ping-pong.

Jusqu’à la mise en place de la nouvelle commission, présidée par le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, la commission sortante, celle de José Manuel Barroso, parvenue en bout de course au terme de 10 ans de crises et de difficultés, n’est pas en mesure de laisser un contentieux lourd à l’équipe suivante. Ce que Pierre Moscovici, nommé commissaire à l’Économie, accueillera avec soulagement, tant il craint d’avoir à faire avec le gouvernement français ce qu’il n’a pas su faire quand il en était membre. Mais la partie de ping-pong entre Bruxelles et les gouvernements qui rejettent la discipline budgétaire indique clairement que, au grand dam de l’Allemagne, les commissaires européens n’attendent pas de la France et de l’Italie qu’elles rentrent dans les clous de Maastricht. La réduction des déficits publics naguère exigée, aujourd’hui abandonnée, par les grands organismes internationaux comme le FMI, la BCE ou l’UE, est remplacée par une nouvelle doctrine : l’étalement dans le temps de la résorption des déficits, de façon à ne pas tuer une croissance qui n’est pas encore revenue.

Stress tests.

Ce n’est pas vraiment un feu vert pour le laxisme, et l’inconvénient de la relative indulgence de Bruxelles, c’est qu’il sera plus difficile ensuite pour la France de construire les budgets 2016 et 2017 de façon à retourner à l’équilibre. On voit donc que la pénible réalité des faits finit par surmonter les exigences disciplinaires les plus essentielles à la stabilité de l’euro, à la convergence des économies européennes et au parallélisme des fiscalités. Il est vrai que la BCE a pratiqué des « stress tests » qui démontrent la solidité des banques françaises, capables, selon les résultats, de tenir le choc d’une crise financière comparable à celle des subprimes en 2008. C’est un indicateur de la vigueur de la monnaie unique, celle-là même qui est conspuée par l’extrême gauche et l’extrême droite et qui, pourtant, nous a protégés de quelques malheurs supplémentaires.

RICHARD LISCIA

PS- Je m’absente une semaine. Ceux qui ont l’amabilité de lire mes chroniques me retrouveront dans cet espace le mercredi 5 novembre.

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Une réponse à Vaudeville budgétaire

  1. leroy dit :

    Bonnes vacances, Richard. Reprenez des forces, il y en a besoin pour écrire vos beaux éditoriaux sur notre magnifique politique française.

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