Une finale inéluctable ?

Marine Le Pen
(Photo AFP)

« Le Figaro » de ce matin publie un sondage selon lequel 68 % des Français sont persuadés qu’au second tour de la présidentielle, Emmanuel Macron et Marine Le Pen seront face à face, mais déclarent qu’ils ne veulent pas de ce duel. Il leur appartient pourtant de voter, s’ils le souhaitent, pour la droite ou pour la gauche afin de mettre un terme au huis-clos du duo.

LA SIMPLIFICATION du processus électoral induite par l’ascension du Rassemblement national et par la vive résistance du macronisme n’est la faute de personne sinon celle des intentions de vote. Accuser le président de « cynisme » sous le prétexte que cette situation résulte de sa stratégie revient à mépriser le suffrage universel. Ce sont les Français favorables à Mme Le Pen qui voient les choses de cette manière ; ce sont les Français confiants que M. Macron peut écarter le danger de l’extrême droite qui le qualifieront pour le second tour. Le chef de l’État se contente de faire un constat : en dépit d’un débat politique tonitruant, en dépit des attaques dont il fait l’objet de toutes parts (c’est le mieux placé, donc c’est lui qu’il faut faire tomber), en dépit de la mauvaise humeur persistante de la population, il y a encore assez de démocrates en France pour se dresser contre la popularité croissante de Mme Le Pen. Et si un homme est capable d’offrir à la présidente du RN  une alternative plus soft, c’est encore, c’est toujours Macron.

Cartes brouillées.

En présentant sa candidature à la présidentielle en 2017, il a évidemment brouillé les cartes. Il a affaibli la droite  avec la complicité très involontaire mais très mesurable d’un LR qui s’est jeté stupidement dans les bras de Fillon. Est-ce encore la faute de Macron si M. Fillon a des démêlés avec la justice ? François Hollande a renoncé à demander un second mandat. C’est certes à cause de la candidature imprévue de son ancien ministre, mais c’est aussi parce que son impopularité lui garantissait l’échec. M. Mélenchon de son côté voyait midi à sa porte et a fait un score (presque 20 %) remarquable. Feu de paille. Ce n’est pas le futur président qui a demandé aux Français de ne pas voter Mélenchon, Fillon ou Hollande. De la même manière, aujourd’hui, LR reprend des forces avec la soudaine réapparition de François Baroin qui disait avoir abandonné la politique. Du coup, Valérie Pécresse lance un appel à la réunification de la droite. Il y a des candidats dans tous les partis et, même à Europe Écologie les Verts, où Yannick Jadot, l’homme politique le plus optimiste de France, se voit déjà à l’Élysée. François Hollande, pour sa part, souhaite clairement que les socialistes l’appellent à la rescousse. Il y a des gens qui ont la stature d’homme d’État. Il y a encore beaucoup d’appétit de pouvoir, mais il demeure que les seuls à proposer une gestion différente du pays sont Macron et Le Pen.

Le Pen en 2027 ?

En 2017, ce fut la force de Macron de se dresser contre les progrès électoraux du Front national ; en 2022, au second tour, et si rien d’essentiel ne se produit qui contrarie la mécanique présidentielle, les mêmes deux candidats se retrouveront dans un duel qui, selon les sondages, montrera l’énergie cinétique que Marine Le Pen ne cesse d’acquérir, au point qu’elle finira un jour par être élue. Ce tableau est cruel, mais il est vrai. Personne ne peut dire le contraire, personne ne peut accuser Macron d’en être l’auteur. Au contraire : s’il a une qualité d’homme d’État, c’est sa capacité à saisir l’occasion historique. Il sait très bien que Le Pen se nourrit de son rejet du droit, de l’Europe, du libéralisme (et aussi des libertés). Ce qui renforce le rôle du président en tant que défenseur des mêmes valeurs. Il faut du temps aux formations meurtries par les récentes échéances électorales. Elles doivent mettre ce temps à profit pour se reconstruire. En 2027, Macron partira. Mais Le Pen sera encore là.

RICHARD LISCIA

Ce contenu a été publié dans Non classé. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

3 réponses à Une finale inéluctable ?

  1. Sphynge dit :

    On peut quand même penser que le principal risque de la présidence de Marine Le Pen ne viendrait pas de l’application de son programme mais de la chienlit qu’imposerait le monde médiatique, politique, judiciaire et l’éducation nationale. L’expérience tournerait court rapidement. Puisque le gouvernement du pays repose, aujourd’hui, presque uniquement sur le président de la République et que la situation est, à l’évidence, hors de la portée des politiciens actuels, le seul candidat utile au pays ne saurait venir que de l’extérieur tel Bonaparte ou De Gaulle. L’homme ou la femme « providentiel » se manifestera peut-être à temps ?

    Réponse
    La situation ne repose nullement sur le seul président.L’idée d’un homme providentiel est une caricature de la démocratie. La chienlit vient principalement d’un électorat perturbé prêt à l’aventure. À la mésaventure.
    R. L.

  2. dmoutel dit :

    Selon ce même sondage, pour 72 % des Français ce « duel
    inéluctable » n’est pas souhaitable. La question à creuser est
    donc : pourquoi ce n’est pas souhaitable ? Espoirs déçus
    d’un côté, populisme sans issue de l’autre côté ?
    Il reste deux ans et demi aux Français pour trouver
    la bonne réponse.

  3. LAURENT CLERTE dit :

    Aucun des scénarii prévus ne s’est déroulé …depuis 1789 .. alors attendons qu’émerge quelqu’un d’autre que EM pour faire face au FN avec MLP ou quelqu’un d’autre de ce parti…

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.