Drôles de municipales

Marine Le Pen
(Photo S. Toubon)

Selon « le Monde », le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, aurait décidé, pour annoncer le résultat des élections municipales en mars prochain, de ne s’intéresser qu’aux villes de plus 9 000 habitants. Les votes des villes moins peuplées ne seraient pas inclus dans les comptes de suffrages.

C’EST peut-une bonne idée, ou plutôt une idée astucieuse, mais elle n’est pas compatible avec le droit de vote. Certes, les résultats totaux dans une élection où les candidats sont si nombreux et appartiennent souvent à des appareils disparates ou non politiques, n’ont pas grande signification. Il n’empêche que lors des élections européennes, le Rassemblement national a exprimé sa force en prenant la première place, qu’il n’aurait pas obtenue, explique « le Monde », si les voix des villes de moins de 9 000 âmes n’avaient pas été comptabilisées. M. Castaner ferait bien de réviser sa copie avant d’annoncer des résultats qui minimiseraient le succès du RN. Il se prépare en effet à commettre une forfaiture, ou un fait accompli, alors que toutes les voix doivent être respectées et que les chiffres affichés au terme du scrutin doivent figurer en bonne place dans les résultats.

Une place centrale.

On ne combattra jamais le RN en l’ignorant ou en faisant croire qu’il n’occupe pas la place centrale qu’il a, bon an mal an, acquise dans le paysage politique français. Sans doute M. Castaner lutte-t-il, à sa manière, contre le mécontentement populaire que crée l’inévitable affrontement du second tour de la présidentielle (en 2022) entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen. La République en marche serait plus crédible si elle continuait à dénoncer les idées du RN, qui demeurent, quoi qu’en en dise, injustes et, pour ce qu’il en est des immigrés, iniques. La REM doit se contenter du débat démocratique et ne pas chercher à s’arroger des avantages auxquels elle n’a pas droit. Ce n’est pas parce que Mme Le Pen a fini par adopter l’euro, ce qui ne prouve rien dès lors qu’elle ne le défendra pas, ou parce qu’elle ne milite pas, comme Jean-Luc Mélenchon,  en faveur un désordre politique assez significatif pour remettre en question les institutions de la République, que sa vision d’une majorité RN à la tête du pays soit devenue acceptable.

La recherche entêtée du compromis.

La lente « normalisation » du Rassemblement national constitue l’argument principal de ceux de la droite qui sont passés chez l’adversaire ou s’apprêtent à s’y rendre avec armes et bagages, mais elle ne signifie rien, sinon un nouvel affaiblissement de la démocratie, déjà largement ébréchée par des désordres inacceptables, comme les grévistes qui empêchent les non-grévistes de travailler, l’occupation des raffineries, la fréquence des jours de grève et le refus du dialogue. Pour mieux combattre le RN, danger parallèle à celui que représentent les syndicats les plus intransigeants, le gouvernement n’a pas d’autre choix de répéter à satiété qu’il recherche le compromis dans tous les dossiers. Il ne convaincra pas l’opinion s’il contribue lui-même aux violations du droit. La REM, qui se targue de n’être ni de droite ni de gauche, et s’apprête à avoir des candidats dans les listes de droite et de gauche, doit se contenter de présenter le RN comme ce qu’il est : un parti politique puissant qui, contrairement à ce qu’en pensent tous ceux qui le jugent éthiquement impeccable et n’ont plus honte de voter pour lui, représente le danger qui menace toute l’Europe et veut étendre sur l’UE en général et la France en particulier l’ombre du néo-fascisme.

RICHARD LISCIA 

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