Trop de dépenses !

Le siège de la Cour des comptes
(Photo AFP)

Comme chaque année, la Cour des comptes distribue, pour chaque dossier, ses rares compliments et ses nombreuses critiques au gouvernement. Elle lui reproche de trop dépenser et de ne rien faire pour réduire la dette publique qui atteint 98,8 % de la production intérieure brute.

LE COMPTE-RENDU des travaux de la Cour des comptes est un exercice laborieux (880 pages) dont la lecture exige beaucoup de patience, presque autant que pour ceux qui l’ont rédigé. Les membres de la Cour sont des gens extrêmement compétents et sérieux mais ils travaillent à titre consultatif, ce qui signifie que l’exécutif n’est pas obligé de réagir à leurs remarques. Il s’agit, une fois de plus, d’une de ces merveilles de notre République, qui consiste à dire à nos gouvernants ses quatre vérités, ce qui revient à prêcher dans le désert. En outre, la Cour des comptes ne s’intéresse pas à la politique et ne doit pas le faire. De sorte que si, nos dirigeants faisaient mine de lui répondre, ils objecteraient aussitôt les contraintes auxquelles ils sont assujettis. En effet, ils n’est pas difficile de dire que le gouvernement ne dépense pas l’argent du contribuable pour son plaisir mais pour satisfaire des revendications sociales, qui ont atteint leur apogée en 2019 et n’ont même pas été calmées par une vive hausse des dépenses, sous la forme de réduction d’impôts ou de largesses accordées aux plus pauvres.

Une année insurrectionnelle.

La politique libérale d’Emmanuel Macron aurait dû logiquement aboutir à une forte réduction du déficit budgétaire et, partant, d’une diminution de la dette. Deux facteurs sont intervenus pour empêcher ce retour à la vertu : d’une part, la croissance n’est pas au rendez-vous et d’autre part, le pouvoir, l’an dernier, a eu le choix entre une dépense accrue ou la disparition politique. Ce n’est pas à la Cour des comptes que s’adressent manifestants, casseurs et grévistes. 2019 a été une année insurrectionnelle et c’est une vérité que l’on peut renvoyer à la Cour après avoir entendu les siennes. La Cour reconnaît néanmoins que l’équipe d’Édouard Philippe a fait des efforts, notamment au niveau des aides au logement (APL), qui ont été substantiellement diminuées. Ce qui fait hurler le Droit au logement (DAL) qui s’insurge contre une méthode qui prive de logements  les acheteurs ou locataires potentiels dans les grandes villes. Au lieu de compter les APL, la Cour, dit le Droit au logement, devrait proposer un grand plan destiné à rendre accessibles des logements dont le prix n’a rien à voir avec les revenus des classes pauvre et moyenne. Et cela dure depuis des décennies.

Le problème à l’envers.

Certes, mais ce n’est pas le rôle de la Cour. C’est celui du gouvernement qui, d’une certaine manière, a pris le problème à l’envers, en commençant par raboter les aides  et non en pesant sur les prix. S’il ne l’a pas fait, c’est que le problème est d’une complexité inouïe : l’aide au logement favorise la hausse des prix car elle encourage le vendeur ou le propriétaire à augmenter le prix ; l’absence d’aide empêche les gens de se loger à un prix raisonnable, en rapport en tout cas avec leurs revenus. Bien entendu, les casse-tête sont nombreux. La Cour, cette année, a eu son mot à dire sur à peu près tout, des abattoirs à l’École polytechnique. C’est une institution qui, pour peu que l’on  s’intéresse à ses travaux, fonctionne librement, à l’écart de toute influence. Elle oblige chaque gouvernement à s’observer dans un miroir. Ce n’est pas un tribunal mais une assemblée qui, régulièrement, dessine le modèle de l’État idéal, le point de comparaison dont les élections et l’action gouvernementale nous éloignent, hélas,  tous les jours.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Trop de dépenses !

  1. Laurent Liscia dit :

    Nous venons d’entendre Bernie Sanders nous expliquer que « Medicare pour tous », l’équivalent américain de la Sécu, coûtera … 30 mille milliards de dollars, 1.5 fois le PIB américain. Et ce n’est que l’un des pans de son programme hallucinant de dépenses. Mais il est vrai aussi que les États-Unis, au contraire de la France, peuvent imprimer de la monnaie que leur rachètent aussitôt la Chine et autres pays. Cela dit, comment réduire les dépenses en France, quand toute reforme se traduit par une paralysie du pays ?

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