Trump et son Covid

Maladie électorale ?
(Photo AFP)

Le président Donald Trump et son épouse Melania ont été contaminés par le virus. Elle semble légèrement atteinte et n’a pas quitté la Maison Blanche. Le cas de son mari paraît plus grave car il a été admis à l’hôpital Walter Reed de Washington.

AVEC TRUMP, aucun événement n’est simple : il a marché jusqu’à son hélicoptère et encore gagné à pied sa chambre d’hôpital, donnant ainsi l’image rassurante d’un homme qui ne souffre pas et dont la vie n’est pas en danger. Ses médecins ont publié un communiqué succinct, de nature technique, sur un état de santé qui ne serait pas alarmant. Ce qui n’a pas empêché une « source anonyme » de diffuser un diagnostic beaucoup plus sévère dont les implications politiques sont considérables. Personne n’est obligé de croire cette version plutôt sinistre des faits. Force est de constater, cependant, que les médecins du président ont choisi le remdesivir, médicament déjà utilisé contre la pandémie, et le regeneron, association de molécules destinée à renforcer le système immunitaire. Les responsables de la communication à la Maison Blanche insistent sur le fait que, pour un malade encore en forme, les médecins ont choisi un traitement sérieux, susceptible de tuer dans l’œuf la charge virale.

Quel avantage ?

Tout cela est plausible et le président a réagi personnellement à l’information anonyme en faisant enregistrer, à l’hôpital, un discours dans lequel il a répété qu’il allait bien et qu’il avait beaucoup de choses faire, en gros rendre l’Amérique encore plus grande, avant de rendre son tablier. Ce qui a contraint les médias à adopter un ton beaucoup moins inquiétant sur les éventuelles conséquences politiques d’un séjour trop long à Walter Reed. On peut compter en revanche sur des faits certains : le président est âgé, il a 74 ans et il est en surpoids, proche de l’obésité, deux facteurs qui ne militent pas en faveur d’un prompt rétablissement. Et, comme pour tout malade du Covid, son état d’hier peut empirer. On mettra de côté la théorie de type complotiste selon laquelle la contamination du président serait fausse et annoncée uniquement pour lui offrir un atout de plus dans une campagne électorale qui ne tourne guère à son avantage. Il est difficile de croire ce scénario qui, s’il avait été écrit à la Maison Blanche, aurait été aussitôt démenti par d’autres sources anonymes. En revanche, on peut se demander de quelle manière M. Trump tirera un avantage de son état de santé.

Un démenti tonitruant.

Si tout va bien, il fera un retour triomphal à la Maison Blanche et se dira au mieux de sa forme.  Dans ce cas, il reprendra sa campagne. Il demeure que le Covid lui aura infligé bien plus qu’une maladie. Il a ajouté un démenti tonitruant à la théorie trumpiste d’un virus bénin qui ne ferait pas autant de morts et de blessés qu’on ne le dit (plus de 200 000 Américains sont décédés à ce jour de la pandémie). S’il est vrai que sa base électorale ne s’est jamais détournée de lui à cause de ses milliers de mensonges, le coronavirus est une affaire assez grave, sur les plans sanitaire et social, pour qu’une frange de la droite conservatrice s’abstienne. Cela améliorerait le score de son opposant démocrate, Joe Biden, qui, dans ce cas, achèverait Trump par K.O. Issue très souhaitable pour ceux qui craignent un match nul et un Trump accroché au fauteuil de son bureau Ovale.

La plupart des Américains n’ont pas lu « Ubu-Roi » ou « l’Irrésistible ascension d’Arturo Ui », mais ils ont vécu ces deux histoires en une fois et à leurs dépens. Il y a un moment où la dérision et le grotesque apparaissent clairement aux yeux de l’électeur le plus aveugle. Comme le disait Abraham Lincoln :  « Vous pouvez tromper tout le peuple une fois, mais vous ne pouvez pas tromper tout le peuple toutes les fois ». Cette ironie du sort qui a voulu que Trump tombe malade à cause d’un virus dont il n’a cessé de contester la nocivité sanitaire, économique et sociale montre les limites du personnage et met l’accent sur son incompétence. En politique, Trump a montré qu’il résistait à tout, à sa propre violence, à ses colères, à sa vulgarité, à son faible niveau intellectuel et à son cynisme, cet ennemi numéro un de la démocratie. Résistera-t-il au ridicule ? Ce n’est pas sûr, quoique les Américains nous aient habitués à des choix bizarres et, surtout, à leur indulgence pour le manque de transparence de leurs dirigeants. Nous-mêmes avons glosé sur les rapports entre Trump et le fisc, mais il aura commis une lourde erreur si ses bulletins de santé ont été manipulés. Les prochains présidents devront dire la vérité absolue sur leur santé.

RICHARD LISCIA

Ce contenu a été publié dans Non classé. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Une réponse à Trump et son Covid

  1. Laurent Liscia dit :

    Et maintenant il souhaite se remettre au travail alors que ses médecins lui disent de rester à l’hôpital. Il est contagieux, affaibli, probablement incapable de prendre des décisions raisonnées – mais peu importe ! La réalité n’a jamais eu prise sur la présidence Trump. Elle risque bien de se venger.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.