Sarkozy blanchi ?

Le soulagement de Sarkozy
(Photo AFP)

Ziak Takieddine, actuellement réfugié au Liban pour échapper à la justice française, a démenti ses précédentes allégations selon lesquelles il avait remis cinq millions d’euros dans trois valises à Nicolas Sarkozy lors de la campagne électorale de 2016. La somme était censée venir du pouvoir libyen, alors détenu par Mouammar Kadhafi. La droite estime que « la vérité éclate enfin ».

IL EST LOGIQUE de se demander à quel moment Takieddine, sulfureux intermédiaire entre la Libye et la France, ment et à quel moment il dit la vérité. Du côté de la justice, on rappelle que le dossier, si minutieusement élaboré contre l’ancien président, contient des accusations exprimées par d’autres parties. Elles n’ont pas plus de crédibilité puisqu’elles émanent d’anciens affidés de dictateur libyen, lui-même assassiné lors de la révolution qui déchire encore son pays. M. Takieddine a fait ses déclarations à Paris Match et BFMTV et fournit une exégèse de ses déclarations contradictoires : dans un premier lieu, il a voulu échapper à des juges qui le harcelaient ; dans un second lieu, touché par la grâce, il a voulu exonérer M. Sarkozy. Il est très improbable que la justice conclue par un non-lieu. C’est une particularité bien française ; un juge ne se trompe jamais et donc ne se dédit jamais, quitte à ce que la procédure aboutisse à une relaxe ou un acquittement à la fin de la procédure quand on a oublié les noms de ceux qui poursuivaient leur proie.

Aucune preuve.

Pour Nicolas Sarkozy, tenu comme n’importe qui de défendre son honneur et dont la carrière politique pourrait se poursuivre, les propos de Takieddine arrivent comme le printemps après l’hiver. On serait tenté de demander à ses amis d’avoir une patience comparable à celle de la justice si on ne nourrissait le soupçon que les investigations ont été conduites à charge, avec peut-être des arrière-pensées politiques et avec le concours empressé de certains médias disposés à prendre parti contre un ancien président qui, à gauche, a soulevé de vives inimitiés. Le point essentiel de toute cette affaire, c’est que les juges, pétris de soupçons, ne disposent d’aucune preuve, et qu’ils se contentent de comparer le cas de M. Sarkozy à celui d’une flopée d’élus qui ont trempé dans des affaires similaires et ont été condamnés.

Ce qui se rassemble s’assemble, n’est-ce pas ? En l’absence d’aveux, on peut toujours soupçonner. Sauf que, dans un dossier très politique, l’hypothèse élaborée relève plus du cinéma d’action que de la réalité, que les témoignages fournis par d’anciens dirigeants  libyens pouvaient logiquement être inspirés par un ardent besoin de vengeance après l’intervention française qui a empêché Kadhafi de s’emparer de la Cyrénaïque rebelle, et que les scénarios proposés par des hommes incapables de la moindre impartialité ne sont soutenus par aucune preuve sinon une déclaration écrite d’un ancien Premier ministre libyen dont la crédibilité est proche de zéro, en admettant même que le document soit réel.

Réformer la justice.

Comme le dit Robert Badinter, il faut préférer la relaxe d’un coupable à la condamnation d’un innocent. Les juges le savent mais, par passion pour le dossier impliquant M. Sarkozy, ils n’ont pas songé un instant à faire la leur la conviction de l’ancien Garde des sceaux. Le problème n’est sûrement pas M. Sarkozy, dont le sort ne soulève de compassion que chez ses thuriféraires, il est celui du fonctionnement de la justice en France. On peut être sûr qu’Éric Dupont-Moretti, l’actuel ministre de la Justice, dont la magistrature observe l’action avec mauvaise humeur, est conscient, lui, du problème. Il sait à quels murs il s’est heurté quand, en tant qu’avocat, il défendait des malheureux qui, n’ayant pas l’envergure d’un ex-chef d’État, étaient livrés pieds et poings liés à des jurys plus inspirés par leur « intime conviction » que par le savoir des experts. Comme nombre d’institutions nationales, la justice française a besoin d’une réforme. Des préoccupations sanitaires et économiques nous en éloignent. Elle n’en est pas moins indispensable et urgente.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Sarkozy blanchi ?

  1. Num dit :

    Qui croit encore à l’impartialité des juges en France ?
    Le « mur des cons » nous avait déjà donné une idée.
    Il faut faire le ménage et vite.

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