Biden conforte son avance

Biden ou le soulagement
(Photo AFP)

Le dépouillement des suffrages se poursuit dans les États américains contestés et le résultat définitif (et incontestable) pourrait ne pas être connu avant plusieurs jours. Ce qui n’ôte rien à l’avance de Biden qui bénéficie plus que Trump du vote par correspondance.

PERSONNE ne rejoint Donald Trump dans son négationnisme électoral. Que l’administration américaine de chaque État soit démocrate ou républicaine, elle continue vaillamment le dépouillement des votes  dont 99 % est acquis avec des avances variables en faveur de Biden. De toute façon, le candidat démocrate l’a déjà largement emporté contre son adversaire puisque, depuis le 5 novembre, il a la majorité absolue (et même plus) du vote des grands électeurs. Au niveau des institutions, sinon chez ceux qui ont voté Trump et sont convaincus qu’il y a eu une fraude massive sans en avoir la moindre preuve, il n’y a pas lieu de se livrer à des recours judiciaires contre la fraude, comme le font avec un empressement désespéré les avocats du président sortant.

L’attente d’un « miracle ».

Donald Trump se bat, en conséquence, sur le terrain qu’il a choisi et qui est glissant. Peut-être n’est-il pas inutile, si l’on veut se débarrasser définitivement de lui, de le laisser courir vers de nouvelles humiliations susceptibles d’empêcher son comeback en 2024. Sa femme, sa fille et son gendre lui auraient conseillé de concéder sa défaite pour toutes les raisons inscrites dans un nouveau combat perdu d’avance. Ses deux fils, au contraire, l’encouragent à tenir bon, mais jusqu’à quand ? Trump ne peut pas s’opposer au déroulement inéluctable du calendrier électoral. Il ne peut pas rester à la Maison Blanche au-delà du 20 janvier prochain. Jamais un président élu n’a obtenu autant de voix populaires, comme l’a fait remarquer Joe Biden qui, sans jamais prononcer le nom de Trump, n’hésite pas à décrire son agenda et se comporte déjà en président qui travaille et n’a pas une minute à perdre. L’idée qu’une surprise miraculeuse, venue du ciel, accorderait un second mandat à Trump, est à la fois exclue et infantile, même si elle est partagée par les 70 millions d’électeurs de Trump.

Populisme pas mort.

En outre, il ne faut pas s’étonner que, en dépit d’un bilan très discutable, le président sortant ait pu recueillir autant de voix. Les élections présidentielles américaines se terminent rarement par un large écart. Joe Biden a tout de même cinq millions de voix d’avance sur Trump, ce qui lui donne la majorité en voix d’électeurs et en voix du collège électoral. On peut donc dire que chacun des deux adversaires a accompli un tour de force, Trump parce qu’il a obtenu une minorité nombreuse malgré une gestion cacophonique des États-Unis et Biden parce que, en dépit d’un populisme triomphal, il a renversé la vapeur. On souligne dans le monde entier la puissance du trumpisme et on a raison. Il témoigne d’une fracture profonde et durable de la société américaine. Il se manifestera encore sous toutes les formes possibles, par les urnes ou par la violence. Il fait peser une ombre sur le placide Biden dont la riposte besogneuse constitue peut-être le meilleur argument. Mais, chez les analystes, on ne discerne pas la logique qui les autoriserait à dire que le miracle, dans cette affaire, c’est d’avoir empêché le président-candidat d’obtenir un second mandat. Le premier a déjà fait des ravages considérables, éthiques, sanitaires, sociaux. Le second aurait sans doute privé l’Amérique du rebond vertueux auquel elle a droit.

L’heure de réflexion.

En effet, ce pays est encore réparable. Il ne l’aurait pas été si Trump avait obtenu quatre années de plus. Sa vision était destructrice, son protectionnisme un combat de boxe commercial, sa diplomatie une tension permanente qui n’a mis à genoux ni la Corée du Nord, ni l’Iran, ni les talibans en Afghanistan, son isolationnisme une recette parfaite pour priver les États-unis de leur influence dans le monde, son négationnisme environnemental une arme de destruction massive contre la faune et la flore. Il faut se rappeler que la très compétente Hillary Clinton a été vaincue par Trump alors qu’elle représentait le seul choix raisonnable offert au peuple américain ; et que, en quelque sorte, l’électorat  s’est ravisé. Il a perçu, clairement ou vaguement, un immense danger. Les démocrates se sont sauvés eux-mêmes et sauvé leurs adversaires républicains, pour qui l’heure de la réflexion est venue : ont-ils besoin de sombrer dans la démagogie, de contribuer à la scission nationale, de refuser tout compromis et de mobiliser contre le parti démocrate la haine du peuple ?

RICHARD LISCIA

Ce contenu a été publié dans Non classé. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Une réponse à Biden conforte son avance

  1. Laurent Liscia dit :

    Très bien vu – notons que la question s’adresse aussi à Biden, qui pourrait être séduit par les raccourcis. Le « trumpisme » est un fléau international, qui correspond au désir des populations de se réfugier dans un modèle de société dont ils sentent bien qu’il n’est ni viable, ni réaliste. Ils savent, au fond, que le monde a changé au-delà de leur capacité à le contrôler, et que nous nous dirigeons vers la catastrophe écologique si nous ne changeons pas radicalement de modes de consommation et de production. Face à ces réalités pesantes et au manque d’imagination invraisemblable de la classe politique, il est sans doute tentant de choisir le déni et la haine : Bolsonaro, Duterte, Poutine, Erdogan, Marine Le Pen, Trump … la liste est longue et aucun pays n’y échappe. La démagogie ne fera qu’aggraver les choses, puisqu’elle légitime le discours populiste. La surpopulation mondiale rend tous les dossiers épineux. Il ne faut pas prétendre qu’ils sont simples.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.