Le doute des partis

Macron n’a pas de soucis
(Photo AFP)

Le coronavirus n’a pas eu que de sérieuses conséquences sanitaires, psychologiques, morales, économiques et sociales. Il a jeté un vaste désordre dans les partis politiques et renvoyé au point de départ quelques stratégies relatives à l’élection présidentielle de 2022.

LE GOUVERNEMENT devrait retenir la proposition de Jean-Louis Debré, ancien président du Conseil constitutionnel, de reporter au mois de juin 2021 les élections régionales. Pour les Républicains, cet ajournement va poser divers problèmes, à commencer par la désignation de leur candidat. Christian Jacob comptait sur les régionales pour qu’en émerge le candidat LR « naturel » d’un cercle incluant trois présidents de région, deux hommes, Xavier Bertrand, qui a pourtant quitté LR,  Laurent Wauquiez (président de la région Rhône-Alpes, où il est très populaire) et une femme, Valérie Pécresse, présidente de l’Île-de-France, qui n’est plus dans le parti. Sans compter Nicolas Sarkozy, auquel songent beaucoup de militants LR, qui ne voient pas que l’ancien président de la République reste poursuivi par la justice et comparaîtra l’année prochaine devant des tribunaux, ce qui ne favorisera guère son retour en politique.

La pandémie a rebattu les cartes.

Le report des régionales n’améliore pas non plus les chances de la majorité République en marche qui, décidément, se défend très mal dans toutes les élections locales. Il n’apporte rien au Rassemblement national. Marine Le Pen continue de bombarder le pouvoir à boulets rouges mais, ce faisant, elle est concurrencée par la droite et l’extrême gauche qui se sont convaincues qu’en affaiblissant Emmanuel Macron, ils finiront par le laisser sur le carreau dès le premier tour. Seule la droite, mais elle en est loin, songe à se qualifier pour le second tour et donc à battre la candidate du RN au premier. On ne voit pas davantage M. Macron élaborer une stratégie de reconquête, fondée sur le tête-à-tête avec Marine Le Pen au second tour. La pandémie a pourtant rebattu les cartes. Le gouvernement de Jean Castex a mal géré le déconfinement, puis le reconfinement, ce qui lui a valu une baisse de sa cote de popularité, laquelle, curieusement, semble épargner le président de la République, conformément aux vœux de tous les chefs d’État de cette République qui se servent de leur Premier ministre comme d’un fusible. Le fait est que l’incroyable cascade de coups portés à la société française à la fois par les réformes et par la simple adversité n’a pas uni LR, n’a pas profité à la gauche, ni même à la France insoumise où la brusque annonce de la candidature de Jean-Luc Mélenchon (soumis à 150 000 parrainages obtenus en 36 heures, quelle comédie démagogique !) ne lui garantit guère le score de près de 20 % qu’il a fait en 2017 et qui, de toute façon, ne serait pas suffisant.

Le grand réparateur.

La gauche n’avait qu’un espoir : celui de créer un front avec les Verts, projet que M. Mélenchon s’est hâté de démolir avec sa candidature précoce qui met fin probablement à toute négociation. Certes, le chef  de LFI s’est montré réaliste : l’unité est souhaitable mais tellement lointaine qu’il a préféré passer un moment agréable sur les tréteaux de la campagne. Mais il a écarté du même coup le seul moyen de se débarrasser de Macron. Ce qui va se passer d’ici à 2022 n’est nullement comparable à ce qui s’est passé en 2016. Il y a quatre ans, la République en marche a fait des propositions neuves aux Français qui ont été séduits. Dans moins de deux ans, M. Macron se présentera en grand et unique réparateur d’une société démolie par une crise sanitaire et économique. Si le candidat de la droite ne commence à s’exprimer qu’en juillet, si la gauche n’est pas réunifiée, si de ce tsunami n’émerge que Macron, frais comme un gardon après tant de vicissitudes, le second tour opposera encore une fois Macron à Le Pen, dont le parcours est lent mais inéluctable : elle représente un courant puissant et plus personne n’a honte de se dire lepéniste. Et, au fond, ce n’est que justice car le président et la patronne du RN occupent depuis le début du mandat le devant de la scène, de sorte que, sans vouloir vexer des personnalités aussi estimables que M. Bertrand ou Mme Pécresse, ils apparaîtront comme de pâles figures face aux deux candidats « naturels ».

On peut toujours penser que la messe n’est pas dite et qu’il se passera des choses d’ici à 2022 qui changeront la donne politique. Mais ce n’est pas vraiment se renouveler que de camper sur cet argument invoqué chaque jour depuis plus de trois ans et demi. Comme le culte de la personnalité n’est pas le genre de la démocratie que nous sommes, personne n’exalte les vertus de M. Macron. On avait vu néanmoins un miracle dans sa conquête du pays en 2017. On en voit un autre dans sa résistance incroyable au cumul des malheurs. Pour le moment, en tout cas.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à Le doute des partis

  1. D.S. dit :

    Pour moi, le programme d’un candidat à la présidentielle n’a que peu d’interêt. Ce qui compte, c’est sa personnalité et sa capacité (supposée ou réelle) à encaisser tout ce qui peut arriver dans la vie d’un pays (le prévisible et surtout l’imprévisible). Voilà pourquoi, j’ai voté Macron en 2017 (au 2ème tour) et voilà pourquoi je voterai Macron en 2022. Chose curieuse: on reproche habituellement à un président de ne pas avoir respecté son programme. Cette fois, beaucoup lui ont au contraire reproché d’avoir respecté son programme.

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