La bourde de Marine

Marine Le Pen
(Photo S. Toubon)

Marine Le Pen, qui ne perd jamais une occasion de dénoncer les erreurs de l’exécutif, a mis deux mois pour reconnaître la victoire de Joe Biden à l’élection présidentielle des États-Unis. 

IL A FALLU, pour qu’elle y consente, que le vice-président actuel, Mike Pence, annonce la certification du résultat issu des urnes, juste après que des émeutiers d’extrême droite eurent saccagé le Capitole. Sans doute lui a-t-il paru nécessaire de se distinguer des chefs d’État ou de gouvernement européens qui, à l’unisson, n’ont pas mis 48 heures à reconnaître que le nouveau président s’appelait Biden. Mme Le Pen, avec un sens politique aigu qui fait tout son charme, voulait être sûre que les recours intentés par Donald Trump seraient déboutés. Ils l’ont tous été, ce qui ouvrait la voie à une attitude du Rassemblement national plus conforme aux faits qu’à son idéologie.

La dernière du cher Donald.

Nous avons tous compris que le point de vue du RN sur les élections américaines ne fait ni chaud ni froid aux Américains et à ceux qui les dirigent. Pour sortir de la nasse où il s’est délibérément laissé enfermer, Trump avait besoin de quelque chose d’un peu plus significatif que le soutien de Marine Le Pen. Et il est probable que Biden lui-même ignore la catastrophe à laquelle il vient d’échapper, à savoir la non-reconnaissance de sa victoire par le RN. Peu importe d’ailleurs que Trump, hier, ait confirmé une nouvelle mesure anti-française qui coûtera chaque année un milliard d’euros de vins non exportés aux États-Unis, de sorte que Marine aura objectivement contribué à l’affaiblissement de l’économie nationale. Nous n’en sommes plus à un milliard près, sauf que les viticulteurs devraient se demander pourquoi ils voteraient en 2022 pour une dame qui s’intéresse si peu à leurs intérêts.

Des fascistes révolutionnaires.

En outre, il serait utile qu’elle se livre à une analyse minutieuse du mouvement que représentent les nostalgiques de la Confédération, les réactionnaires violents, les racistes et antisémites qui peuplent cette organisation si efficace mais si dangereuse pour les institutions américaines et pour la puissance démocratique de l’Amérique. Ce ne sont pas des électeurs marqués par la bonhomie qui voudraient seulement que les grands de ce monde pensent à eux, ce sont des fascistes révolutionnaires qui ne cachent ni leur haine des autres, c’est-à-dire des non-Blancs, ni leur désir d’imposer leur point de vue au reste des États-Unis par la menace et la violence. Ce ne sont pas des gens qui, s’ils avaient l’occasion d’adouber Mme Le Pen, lui rendraient service. Ils ne règnent que par la peur, le nombre et leur aversion évidente pour la Constitution. Des Français, de quelque bord qu’ils soient, doivent-ils respecter ces énergumènes ? C’est  ce que pense notre très chère Marine qui, comme d’habitude est bien plus prompte à dénoncer l’épouvantable président Macron qu’à mettre un peu de cohérence dans son programme.

Une voie sans issue.

Bien entendu, si Trump avait réussi dans ses démarches auprès des États-clés pour inverser le résultat obtenu par Joe Biden, Marine Le Pen aurait triomphé. Il semble qu’il n’y ait eu personne, parmi les beaux gosses qui l’entourent et relaient ses propos avec encore plus de virulence, pour lui dire que la non-reconnaissance immédiate de la victoire du démocrate revenait à s’engager dans une voie sans issue. Il suffisait qu’elle m’appelât au téléphone : je lui aurais dit dès le 5 novembre qu’il n’y avait plus la moindre chance pour le Donald de gagner l’élection. Elle a confondu les certitudes contenues dans le verdict des urnes avec les faits alternatifs, rejoignant ainsi les théories fumeuses et infantiles du président le plus pervers de l’histoire des États-Unis. Elle s’est tout simplement rangée dans le camp des pires réactionnaires américains sans se poser la question de ce qui, de toute façon, allait se produire.

Elle évitera sans doute les conséquences de son très mauvais choix grâce à son faible rayonnement international. Mais, dans un mois ou dans un an, un conseiller du président Biden lui rappellera que le Rassemblement national a beaucoup tardé à reconnaître sa victoire, ce qui conduira le président en exercice à rayer de ses contacts un parti qui, désormais, ressemble comme deux gouttes d’eau à QAnon, ce mouvement d’une extrême violence qui a participé à la démolition du Capitole et causé la mort de cinq personnes. En tout cas, Marine Le Pen nous a rappelé à tous de quel bois ses idées et ses actions sont faites. Elle n’est pas capable de se projeter sur l’avenir  immédiat, de comprendre la force des institutions dans un pays démocratique, de deviner où réside le danger d’un acte plus conçu pour impressionner que pour renforcer la « cause » qu’elle défend.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à La bourde de Marine

  1. Laurent Liscia dit :

    Cela dit, il serait très curieux que Marine se comporte autrement qu’en leader de l’extrême-droite. Ce sont des bourdes logiques, produites directement par l’ADN de son programme, qui sous des dehors pseudo-democratiques, n’est jamais qu’une forme de fascisme. La pensee fasciste n’est pas un mal dont on guérit, à moins d’un miracle.

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