Biden, ou l’apaisement américain

Joe Biden
(Photo AFP)

Pour l’opinion internationale, l’indispensable défaite de Trump était infiniment plus importante que la victoire de Biden, parfait inconnu jusqu’à l’an dernier. Voilà qu’elle découvre un président qui, non seulement a remis de l’ordre dans le ménage chamboulé de la société américaine, mais a pris en un mois toute une série de décisions positives et rassurantes.

LE PROPOS n’est pas de dire que la menace des suprémacistes blancs a disparu, mais Biden n’en a que plus de mérite d’agir comme si elle était absente. Retour dans la conférence mondiale sur le climat, retour à l’OTAN, deux instances où il va affirmer le leadership américain, fermeté nécessaire avec la Chine et la Russie, main tendue à l’Iran que les mollahs feraient mieux de saisir, lancement d’un plan économique de 1 900 milliards de dollars en cours de négociation avant le Congrès, c’est plus, au total, qu’un président peut accomplir en si peu de temps. Certes Donald Trump n’a pas été destitué a posteriori, comme le souhaitaient les démocrates.

Mais il aura été à ce jour le seul président des États-Unis qui ait subi deux fois la procédure d’impeachment. Mieux : comme Al Capone, le gangster des années vingt, Trump voit se dresser le mur du fisc contre lui : la Coup suprême vient de l’obliger à livrer au procureur de New York sa comptabilité. Il sera donc probablement condamné pour fraude fiscale car l’ex-président n’a pas acquis assez de crédibilité pour qu’on puisse imaginer que ses comptes ne sont pas truqués.

Un président actif.

Joe Biden ne fera pas disparaître en un jour ce courant puissant qui a donné 70 millions d’électeurs à Trump. Bien qu’ils soient désormais privés de réseaux sociaux, les suprémacistes, complotistes, racistes et autres bataillons d’une extrême droite dure et violente, continuent à se répandre par d’autres canaux d’Internet et grâce à un certain nombre de radios et de télévisions. Le président actuel riposte par l’exemple, avec l’espoir que les décisions qu’il annonce et qu’il applique deviennent irréversibles avec le temps. La clé de son succès est la mise en œuvre de son plan économique et social qui, s’appliquant à tous, donc aux moins riches, finira pas séduire une partie de l’électorat de Trump.

Surtout, l’image d’un Biden qui agit et dont le discours, finalement assez rare, n’utilise pas les superlatifs, s’adresse aussi à ceux qui ont voté contre lui. Peut-être cette partie de l’opinion sera-t-elle lassée, au bout d’un certain temps, par une hystérie collective qu’il faut alimenter tous les jours à coup de mensonges ; peut-être sera-t-elle satisfaite d’être traitée comme de simples démocrates si elle abandonne toute violence ; peut-être ceux qui votaient Trump sans aller jusqu’à la mise à sac du Capitole finiront-ils par admettre qu’une page est tournée.

Un sans faute.

Rendons à Biden ce qui lui appartient : pour le moment, il a fait un sans faute ; on entendrait presque le soupir soulagement du monde occidental, on verrait presque le froncement de sourcils de Poutine et de Xi Jinping. Certes, il est courant de dire que, Trump ou pas, l’Amérique a commence à infléchir sa politique étrangère depuis Obama, qu’elle souhaite se tourner vers l’Asie plutôt que vers l’Europe, qu’elle ne cherche plus à protéger les démocraties contre les dictatures.

Mais rien ne prouve que Biden se contentera d’être un Obama-bis. La violence de la Chine et de la Russie, l’irrédentisme iranien, la menace terroriste ont déjà incité le nouveau président américain à adopter un moratoire sur les troupes américaines déployées à l’étranger, à réaffirmer la solidarité de Washington avec l’Europe. Il a bel et bien mis fin à l’isolationnisme américain. Il reste présent au Sahel où l’armée française est aidée par le renseignement américain. Il réfléchit sur le sort de l’Afghanistan, même s’il semble que ce pays va tomber bientôt aux mains des Talibans. Il se dressera contre toute intimidation russe ou chinoise.

Fin de l’autoritarisme.

Enfin, Biden a mis un terme à la dérive du gouvernement fédéral en cassant d’une main ferme l’autoritarisme et en abattant la monarchie du mensonge. Célébrant dans la tristesse les 500 000 morts du Covid, il a fait ses condoléances au peuple américain et il a mis les drapeaux en berne. À l’irréversibilité apparente du trumpisme, qui aurait été confirmée par la réélection du président sortant, il a substitué le retour aux réalités politiques et philosophiques : l’Amérique est en deuil, les victimes du Covid sont autant de preuves de la réalité de la pandémie. Et il a fait mettre en berne les drapeaux nationaux pour quatre jours. Ainsi le cynisme a-t-il laissé la place à la compassion.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Biden, ou l’apaisement américain

  1. Laurent Liscia dit :

    En effet, Biden n’est pas seulement un Obama-bis. La plus grande nouveauté étant l’inclusion de la lutte contre le changement de climat dans le plan économique et social de l’Amérique. Espérons que ce navire sera sur sa lancée d’ici deux ans, quand les élections législatives rendront la majorité aux Républicains.

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