Les clés de l’avenir

Macron et Bertrand hier à Douai
(Photo AFP)

La défaite des Bleus face à l’équipe suisse, dans le cadre de la Coupe européenne de football, a effacé déjà le souvenir des élections régionales et départementales. Dans les deux cas, foot et rendez-vous électoraux, tout le pays est passé à autre chose.

ON NE PEUT s’expliquer la victoire helvétique que par la trop grande confiance que notre valeureuse équipe avait en elle-même. Ce n’est pas un travers national, puisque nous passons notre temps à nous auto-dénigrer et que les extrêmes prospèrent sur la description catastrophique du tableau politique français. Vous n’aurez pas manqué que, dès dimanche, à 20 heures 10, Xavier Bertrand a annoncé sans nuances sa candidature à la présidentielle ; qu’Éric Piolle, maire écologiste de Grenoble, a annoncé la sienne hier ; que LR, sous la houlette de Jean Léonetti, maire d’Antibes et député des Alpes Maritimes, va préparer le « processus de départage » (d’autres auraient dit la primaire) qui désignera le candidat de LR ; que Macron, dans un entretien avec « Elle », dit qu’il n’a pas l’intention de changer de Premier ministre, estimant que des élections locales, celles que son parti, la République en marche, a perdues, n’entraînent pas des changements d’ordre national.

Bertrand en solitaire.

Bref, tout le monde fait comme si ses élections régionales et départementales n’avaient induit aucun changement. Elles ont pourtant reconduit les « sortants », au détriment des autres ; elles ont produit un taux d’abstentions historique et alarmant qui jette une ombre sur le scrutin lui-même et sur le fonctionnement de notre démocratie ; elles ont déclenché l’irruption spectaculaire de Xavier Bertrand dans la course présidentielle, plongeant dans l’incertitude la totalité des pronostics avancés avec confiance par les instituts de sondage. Dans la réaction de tous les partis et mouvements, il y a néanmoins un puissant ressort : on veut en découdre en dépit de la nouvelle donne et parce que, justement, elle brouille les pistes. Cela se voit très clairement à LR dont les perspectives deviennent brusquement optimistes et qui dispose de plusieurs candidats potentiels, même si M. Bertrand a quitté le parti il y a trois ans et se présentera en dehors du système qu’édictera M. Léonetti. Les caciques du parti comptent sur l’homme qui ne leur appartient plus, et si ce n’est pas de l’optimisme, c’est de la naïveté.

Un match à trois.

La gauche, de son côté, n’a pas vraiment de raisons de se réjouir. Ses alliances avec les Verts et la France insoumise ont été critiquées et ne lui ont pas permis de gagner une région supplémentaire. Le pays a basculé à droite, ce qui signifie que, pour se faire une santé, elle doit rester dans l’opposition et retrouver ses marques. Quant à Macron, il constate, s’il ne l’avait pressenti, que son projet de se présenter en tant que lui-même et non au nom de son parti ne relève plus de la stratégie qu’il a mise au point et l’a conduit à la victoire en 2017, mais de l’obligation à laquelle il est forcé de se soumettre par les circonstances qu’ont créées les régionales. Tout allait bien tant que le second tour était réservé à un  match Macron-Le Pen ; mais il ne l’est plus et, comme le dit Xavier Bertrand que le président a rencontré à Douai, ce sera un match à trois : du coup, on peut imaginer un match entre un gaulliste social et un social-démocrate, entre deux hommes que ne sépare pas une feuille de papier à cigarette. Toutefois, pourquoi Macron, qui a déjà expérimenté la candidature sans parti, et avec succès, ne ferait-il pas l’an prochain ce que Bertrand s’apprête à faire ?

Un combat âpre.

Il ests logique, que, à Douai, Macron et Bertrand se soient parlé gentiment. Il était temps que la  classe politique commence à se conduire civilement. Ce n’est pas toujours le cas et, juste avant une réunion du gouvernement, Édouard Dupont-Moretti, ministre de la Justice, avait pris à partie Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur parce que celui-ci venait de féliciter Bertrand, qui est son ami du nord, pour sa victoire. D’un côté, il y a certes un paradoxe, Dupont-Moretti et Darmanin sont allés grossir les rangs de la liste LREM dans les Hauts-de-France, qui a perdu l’élection et ce, sans nul doute pour provoquer la défaite du sortant. Faut-il féliciter l’adversaire, surtout quand il gagné ? D’un autre côté, Macron lui-même a félicité Xavier Bertrand, non sans un soupçon d’hypocrisie, ce qui, après coup, ridiculise l’algarade du Garde des sceaux. L’important, c’est que des Français ne soient pas les ennemis d’autres Français, surtout quand ils ont des affinités idéologiques. Avec une réserve : il est difficile pour certains d’entre nous d’avoir de la tendresse pour Marine et Jean-Luc. Il demeure que la courtoisie et le civisme n’ont jamais réduit l’âpreté du combat politique.

RICHARD LISCIA

 

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Une réponse à Les clés de l’avenir

  1. Doriel Pebin dit :

    Il est en effet temps de revenir aux règles élémentaires de courtoisie dans les relations et de remettre au centre les débats sur des idées et des propositions en arrêtant les effets de manche. Tout cela contribuera à faire revenir les électeurs vers les urnes. L’art de la nuance a, espérons le, encore de beaux jours devant lui.

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