Science et inconscience

Manif’ à Paris
(Photo AFP)

La mobilisation des antivax et le soutien que leur apporte, selon les sondages, la moitié de la population française, posent un problème que les autorités sanitaires et politiques auront beaucoup de mal à gérer : l’objectif de l’immunité collective reste, dans ces conditions, hors de portée.

LE PHÉNOMÈNE est dû à de multiples facteurs, dont le principal est le syndrome du déni, qui consiste, en toute occasion et aveuglément, à croire les mensonges les plus grossiers plutôt que la réalité telle qu’elle découle des connaissances scientifiques. Peu importe en effet que des dizaines de millions de Français soient vaccinés sans avoir subi le moindre effet secondaire ; peu importe que nous en soyons à la quatrième vague de la pandémie et que nous ne sortirons pas du cycle infernal si nous ne parvenons pas à l’immunité collective ; peu importe que les hôpitaux soient saturés et que la preuve soit largement fournie que les nouveaux malades du Covid sont, à plus de 90 %, des citoyens non vaccinés.

Protester, c’est l’objectif.

Si 50 % des Français soutiennent les manifestants, cela signifie qu’ils sont vaccinés dans leur majorité. Il ne s’agit donc pas, pour eux, de croire aux effets délétères du vaccin, mais de justifier toute protestation d’où qu’elle vienne parce que protester serait la bonne attitude à adopter. À quoi il faut ajouter le délire des réseaux sociaux, poison intellectuel, et l’usage que font de la pandémie quelques personnages politiques particulièrement pervers, comme Philippot, Marine Le Pen et Mélenchon qui devraient commencer par dire s’ils sont vaccinés ou non et qui n’ont pas honte de mettre la santé publique au service de leur démagogie. Je ne crois pas que la création du passe sanitaire entraîne de facto l’obligation du vaccin. Le masochisme est tellement répandu que les gens n’iront pas se faire vacciner pour mieux démontrer qu’on les fait inutilement souffrir et qu’ils sont privés de restaurants, de cinéma et autres distractions.

Une suggestion.

Il y a un sondage qui n’a pas encore été réalisé : celui qui ne s’intéresserait qu’aux nouveaux malades. On leur demanderait de dire s’ils regrettent de ne pas avoir été vaccinés, s’ils ont fait fausse route, si enfin ils l’admettent. Et on publierait largement les résultats. Il ne suffit pas en effet de fournir des statistiques. Il faut aussi insister sur la nature des cas, sur les affres du Covid long et de la réanimation, sur les décès, dont le nombre va fatalement augmenter. Je sais : on ne peut pas donner à boire à un âne qui n’a pas soif, mais n’est-il pas temps de mettre un terme à la légende de la « grippette » inventée par Trump ? Certes, exécutif et législatif, médecins et pharmaciens, sommités de la médecine, tout le monde s’y est mis pour essayer de convaincre les récalcitrants. Leur résistance, leur entêtement, leur obstination ne résultent pas seulement d’un déni, mais d’une dérive psychique très connue, le narcissisme. Ils ne sont pas n’importe qui. Ils portent le flambeau des libertés. Ils ont inventé un monde parallèle où la vertu civique est une tare et ou le mensonge sert de réalité alternative. Ils prospèrent sur le terreau de l’intolérance et de l’antisémitisme tout en essayant de nous faire croire que c’est la majorité des Français qui se trompent.

Un cauchemar.

En réalité, ils ne sont animés que par l’envie d’en découdre. Les institutions sont à leurs yeux des totems qu’il faut abattre. Il faut démolir le système et le remplacer par un autre où il fera bon mourir les uns après les autres jusqu’à ce que l’immunité collective apparaisse, faute de victimes. Comme au Moyen-Âge. Ils se donneront alors pour chef un démagogue. Et on pourra mesurer le degré de liberté dont eux et nous bénéficierons. Ce n’est pas une comptine, c’est un cauchemar. À côté de la pandémie, il y en a une autre, celle de l’absurdité et de la déraison. Ils voudraient que nous respections leur « liberté ». Qu’ils commencent pas respecter notre logique.

RICHARD LISCIA

 

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4 réponses à Science et inconscience

  1. D.S. dit :

    Ne désespérant pas de faire changer d’avis mon neveu, antivax parmi les antivax, j’ai donc partagé ce midi sur Facebook ‘Science et inconscience ». Voici notre échange: « Bises à toi, A. Mais je sais que tu trouves toujours les bonnes réponses aux partages réactionnaires de ton oncle Dominique. »
    « Ah bah déjà l’article commence mal : « la mobilisation des antivax »… il y aurait donc d’un côté ceux qui sont pour les vaccins et de l’autre ceux qui sont contre… C’est drôle, je trouve ta publication seulement ce soir mais aujourd’hui je repensais à ce terme d' »antivax », c’est un peu comme le terme de complotiste, on y fourre ce qu’on veut et ça permet une simplification de la pensée, très pratique et même très encouragée par les temps qui courent… Mais je m’étais arrêté au titre, je vais quand-même lire l’article… Bises mon oncle »

  2. D.S. dit :

    La suite vient de tomber à l’instant: « C’est un très vilain papier que tu as partagé là Dominique, on y trouve les navrants travers de la généralisation, de « je mets tout le monde dans le même sac »… « La réalité telle qu’elle découle des données scientifiques » : la réalité ne découle pas des données scientifiques, c’est exactement l’inverse, ce sont les données scientifiques qui découlent de la réalité. Bref, si les hôpitaux sont saturés c’est pas nouveau, c’était déjà le cas à chaque épisode de grippe. Et si il veut sortir du cycle infernal le monsieur il n’a qu’à commencer par éteindre son téléviseur et regarder la réalité telle qu’elle est. » Il faut que je m’y fasse, le fils de ma soeur neveu fait bien partie des irréductibles.

  3. RIOT dit :

    Il n’y a pas de doute. La COVID ne tuera que des irréductibles. Et vous verrez le nombre des cons diminuer, par sélection naturelle. Quid des survivants à cette épidémie ? Seront-ils guéris ou Co-vide long, ou chef d’escadrille?

  4. Laurent Liscia dit :

    L’exemple de D.S. montre que ce clivage bizarre et effrayant traverse même les familles. Mais au fond, le déni n’est que la forme moderne de la pulsion de réaction.

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