Macron défie les partis

Une poignée de mains à contrecoeur
(Photo AFP)

Le discours prononcé hier soir à la télévision par Emmanuel Macron ne contenait rien de neuf, mais il aura fait l’effet d’une douche froide sur les ambitions affichées par les partis politiques, qu’il a tous reçus mardi et mercredi.

LOIN DE s’engager dans une nouvelle polémique, le président de la République, en énonçant les faits électoraux qui viennent de se produire, a rappelé à l’opinion qu’il avait été réélu confortablement ; que, s’il n’a pas de majorité absolue, il a quand même une majorité ; et que, si, dans les oppositions, il n’y a personne pour faire des concessions, il avisera. Il n’a donc parlé ni de pacte avec telle ou telle formation ni même de majorités dossier par dossier. Cependant, au cas où l’Assemblée se livrerait à l’obstruction, il la dissoudrait. (Il ne l’a pas dit, mais il l’a pensé assez fort pour que d’aucuns l’entendent) .

Un discours bref et sec.

Son allocution, brève et sèche, était une mise au point sur la réalité des faits tels qu’il les perçoit après quatre scrutins. Il n’a pas besoin de cohabiter et d’ailleurs avec qui ? Avec la droite ou la gauche ? Pourquoi donnerait-il un tel pouvoir à un parti, n’importe lequel, qui n’a pas décroché autant de sièges que le sien ? Tout en traitant les élus et les électeurs avec le respect qui leur est dû, soucieux en outre de ne pas aggraver la crise de régime à laquelle les extrêmes veulent nous faire croire, il a quand même fait comprendre qu’il détenait un mandat de cinq ans auquel il n’entend pas renoncer et que, s’il doit s’accommoder de sa majorité relative, les partis doivent, de leur côté, reconnaître qu’ils ont besoin de lui.

Cohabitation : un faux projet.

Autrement, le dialogue qu’il a instauré avec les partis, qu’il a présenté comme une façon de les écouter, a été surtout une occasion de les mettre en garde : il ne s’agit pas de faire de l’Assemblée une volière. Car l’interprétation par l’opposition des résultats électoraux est totalement contraire à l’esprit de la Vè République. C’est tellement vrai que Jean-Luc Mélenchon, qui a cru, avant dimanche soir,  qu’il serait appelé pour former le gouvernement, attend encore le coup de fil du président. Le chef de la France insoumise a voulu faire croire aux Français qu’il y aurait une cohabitation, mais celle-ci n’est possible que si l’opposition emporte la majorité absolue. Macron ne l’a pas obtenue, Mélenchon non plus. Il est même curieux que personne n’ait parlé de défaite de la gauche, alors que Mélenchon lui-même n’a exprimé aucun enthousiasme.

Le RN prêt à avaler LR.

Le tableau général des rapports de force entre les partis n’a pas changé, sauf pour le Rassemblement national. La Nupes n’a pas réuni plus de députés que le nombre qu’elle aurait obtenu si ses quatre partis étaient allés solliciter l’électorat séparément. Les Républicains, comme prévu, ont perdu la moitié des sièges qu’ils avaient dans la législature précédente, ce qui, d’ailleurs, ne les a pas rendus moins arrogants. Eux et l’extrême droite ont tellement bombardé Macron de quolibets et de critiques qu’ils ont fini par lui faire perdre une quarantaine de députés. Arrivés à ce point, ils continuent à le bouder, alors qu’ils partagent nombre d’idées avec le président. Leur irrédentisme risque certes d’empoisonner son mandat, mais il ne finira que d’une manière : le « grand remplacement » de LR par le RN.

Le danger vient du RN.

Quant à la Nupes, elle commence déjà à voler en éclats. Les Verts, le PS et le PC ont refusé de donner à Mélenchon les clés de la maison. Naïvement, il a cru les convaincre alors qu’ils ne se sont associés à lui que pour obtenir plus de sièges et redorer leur blason. En dehors du macronisme, un seul grand parti s’impose, celui de Mme Le Pen. On continue, partout et encore ce matin de dire, que sur les épaules de Macron pèse l’horrible responsabilité d’avoir favorisé les extrêmes. C’est faux. La gauche est restée à son étiage et si Le Pen arrive aux portes du pouvoir, c’est tout simplement parce que les médias, ravis de pouvoir taper sur l’exécutif, ont complètement oublié le sérieux danger que le RN représentait. D’ailleurs, qui, dans l’univers politique et médiatique, s’est demandé ce qui se passerait si Macron était mis en minorité ? Qui a tenté de décrire le pays post-Macron, sous la houlette d’une Le Pen ou d’un Mélenchon ? Tout ce qui intéressait les partis et les médias, c’était le pouvoir, à n’importe quel prix. Leur « coûte que coûte » en quelque sorte.

Le mensonge des extrêmes.

Macron a constamment livré un combat homérique contre l’extrême gauche et contre l’extrême droite. Il n’est pas responsable de la montée du RN que l’on peut fort bien attribuer aux inquiétudes que l’ascension de Mélenchon a données à l’opinion. Ces deux-là se nourrissent l’un l’autre de leurs passions acrobatiques qui vont du pro-poutinisme à l’euro-scepticisme. Ce qu’on ne voit guère, parce qu’on a le nez dans le guidon, c’est à quel point leurs convictions politiques, économiques et sociales sont anachroniques, à quel point ils doivent dresser du paysage français un tableau tellement sinistre que leur stratégie repose, forcément,  sur un immense mensonge.

RICHARD LISCIA

 

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Une réponse à Macron défie les partis

  1. Dominique S dit :

    Cette situation m’en rappelle une autre que les médecins connaissent bien. De nombreux patients se sentent légitimes en voulant dominer le représentant du pouvoir médical, lui imposer leurs points de vue, lui imposer ses prescriptions. En un mot, ils cherchent à le manipuler. Mais le rapport de force n’est pas dans ce sens-là. Macron a bien fait de remettre les pendules à l’heure.

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