Borne survit à la guerre

Élisabeth Borne hier à l’Assemblée
(Photo AFP)

Pour un coup d’essai, c’était, quoi qu’on en dise, un coup de maître. Devant l’Assemblée nationale, la Première ministre a sûrement prononcé un discours un peu longuet, mais qui décrivait parfaitement l’action à venir de son gouvernement.

LE TEXTE n’était pas dépourvu d’effets d’annonce, comme la nationalisation complète d’EDF, la reprise de la réforme des retraites ou la réduction des impôts de production. Il n’y manquait même pas la touche émotionnelle qui a accompagné le bref récit de son parcours personnel, elle, l’ancienne pupille de la nation, et l’exemple donné par nos femmes les plus illustres, comme Simone Veil.

Un hémicycle déchaîné.

Dans cette cacophonie hallucinante d’interjections, de hululements, d’interruptions systématiques, Élisabeth Borne a gardé sa dignité, de la même manière qu’elle a su répondre à Mathilde Panot (LFI) qui dénonçait la « stratégie du sauve qui peut » (alors qu’il n’y a jamais eu la moindre lueur d’effroi dans le regard de Mme Borne) et à Marine Le Pen qui n’a pas manqué de culot quand elle a reproché à la Première ministre d’avoir survécu au second tour des législatives, « incongruité institutionnelle », et « provocation politique ». Nous ne sommes pas surpris des dérapages contrôlés de l’Assemblée, mais là, la somme du chahut aura été excessive.

L’ironie de Mme Borne.

Non seulement la cheffe du gouvernement n’a pas été impressionnée par cette trompeuse démonstration de force, mais elle a su décrire les imprécateurs avec ironie en leur demandant quelle est l’utilité d’un comportement à la fois indécent et vain. Face à l’hystérie feinte de la moitié des députés, elle est restée de marbre. On lui a si souvent reproché sa froideur ! C’est pourtant une qualité bien nécessaire quand la houle monte jusqu’à emporter la moindre trace de respect.

Dérive anarchique et subversive.

Respect des institutions, des principes républicains, d’un lieu voué au dialogue, pas aux batailles frontales, respect de la fonction ? Il y a longtemps que ces notions ont été balayées par ce qu’on nous présente comme une forme de modernité ou de simplicité, alors que ce sont des machines à cris totalement indifférentes au contenu du message de la Première ministre. Les oppositions ont, hier, administré la preuve qu’elles s’opposent par principe,  pas pour riposter à la majorité. Quelques-uns de leurs personnages, comme le LFI François Ruffin, se sont égosillés pendant une heure et demie, conformément à une dérive anarchique et subversive qui écœure davantage le public qu’elle ne le sidère.

C’est quand même une majorité.

On n’a pas la naïveté de croire que, transformée en théâtre comique, l’Assemblée ne cache pas des arrières-pensées et des projets de coopération dont il ne faut rien dire mais qui traduisent l’impérieuse nécessité pour les députés de bonne volonté de collaborer avec le gouvernement. Les oppositions n’ont pas encore compris, semble-t-il, que le président a été réélu pour cinq ans et que la majorité reste la majorité. Il n’y a d’ailleurs pas de limite au front de Marine Le Pen, qui conteste la légitimité du pouvoir, alors qu’elle a été battue, comme toujours, à la présidentielle.

Horreurs démocratiques.

Il faut comparer les éructations des Le Pen et Panot aux commentaires infiniment plus mesurés offerts par les commentateurs et experts professionnels, qui, dans leur sagesse, n’ont rien vu des horreurs démocratiques que décèlent avec tant d’ardeur les opposants. Ceux-ci ont créé un château peuplé de fantômes à la place de l’Élysée. Ils y voient sans cesse des spectacles effrayants plus en phase avec leur psychologie fragile qu’avec la réalité du pays. Ils sont disqualifiés par leurs propres mensonges et ils ne nous gouverneraient pas sans brandir de faux arguments et sans nous promettre des améliorations impossibles. Ils sont dangereux parce que beaucoup d’électeurs les croient.

RICHARD LISCIA 

 

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Une réponse à Borne survit à la guerre

  1. Laurent Liscia dit :

    On voit les qualités de Mme Borne se dessiner. Son calibre impressionne. Espérons qu’elle aura le temps de mettre en place son programme. Seule surprise (de mon point de vue): la re-nationalisation d’EDF. C’est vrai aussi qu’un statut mi-figue mi-raisin n’est pas forcement efficace. Espérons que sous la coupe gouvernementale EDF sera l’outil d’une vraie politique contre le changement de climat.

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