La ligne Sarkozy

Mélenchon le 18 octobre
(Photo AFP)

L’ancien président Nicolas Sarkozy s’est prononcé en faveur d’une alliance entre la coalition gouvernementale et son parti, les Républicains. Son intervention a été condamnée chez LR et au sein de la macronie.

LES RÉPUBLICAINS savent qu’ils occupent une place d’arbitre et, dans le jeu des recours au 49/3 et des motions de censure à l’Assemblée, ils ont soutenu le gouvernement pour l’adoption du budget et pour le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. M. Sarkozy s’est contenté de faire le constat de cette alliance objective et souhaite qu’elle devienne officielle, afin de limiter l’influence croissante de la Nupes et du Rassemblement national. La coalition de gauche et le parti d’extrême droite, principalement soucieux de renverser le gouvernement d’Elisabeth Borne, ont en effet découvert qu’ils avaient ces affinités exquises fondées sur la haine du même adversaire.

Nupes-RN : une association scandaleuse.

Avec son sang-froid coutumier, Mme Borne a conduit les débats à l’Assemblée avec assez de maîtrise pour que les recours trop nombreux au 49/3 soient quelque peu étouffés par le scandale qu’est cette alliance objective entre deux mouvements situés aux deux extrêmes du spectre idéologique. Avec une sérénité marmoréenne, elle n’a pas de mal à démontrer que l’agitation savamment entretenue par Jean-Luc Mélenchon et par Marine Le Pen se transforme en un exercice de l’absolue futilité. S’il ne s’agissait que de montrer les crocs au pouvoir, merci, il était au courant. Si c’était déraper au bord du précipice de la dissolution, cela revenait à : « Retenez-nous ou nous faisons un malheur ! ». Un malheur dont la gauche serait la première victime, puisque la Nupes aurait volé en éclats, le RN la seconde, car il risque, dans des élections anticipées, de perdre des sièges, et la troisième LR pour la même raison.

Une vocation : haïr Macron.

LR traverse une période dépressive parce qu’il a perdu la présidentielle, parce qu’il est en crise de leadership et parce que ses membres les plus influents, d’Éric Ciotti à Bruno Retailleau, se sont transformés en militants exacerbés plus proches de Marine Le Pen que de Nicolas Sarkozy, qu’ils vénéraient naguère et qu’ils vitupèrent aujourd’hui. Ils empêcheront vraisemblablement la formation d’un bloc avec la macronie. Ils le feront au nom de leurs idées, mais surtout par aversion pour Emmanuel Macron, qu’ils ont tant attaqué qu’ils ont fini par croire que c’était une vocation éternelle.

Un PS affranchi de Mélenchon.

C’est dommage. Car Macron ne peut retrouver une majorité qu’en scellant un pacte avec le LR. Et aussi parce que, un peu comme Éric Woerth qui, lui, est passé sans ambages à la macronie, ils sont nombreux à soutenir Macron, à s’opposer à la dissolution et à rejeter toute crise de régime.  Le jeu est par ailleurs compliqué par ceux de la macronie qui viennent de la gauche et qui, comme les « frondeurs » anti-François Hollande de naguère, votent des amendements que le patron ne leur a pas demandés. Seraient-ils tentés de passer à la Nupes ? Non, car elle donne le spectacle permanent de ses divisions et formidables contradictions. Ils voudraient un PS enfin affranchi de l’influence nocive de Jean-Luc Mélenchon.

L’Assemblée : une volière.

Les résultats d’élections anticipées sont difficiles à prévoir et peuvent nuire à tous les acteurs politiques. Les macronistes espèrent qu’elle enterreront Mélenchon, tandis que la Nupes et le RN estiment qu’elles grossiront leur camp. Il est vrai que les Français sont restés parfaitement indifférents au spectacle pitoyable qui a été donné du débat parlementaire, plus orienté vers le nom d’oiseau, l’insulte et le fracas de l’éloquence que la défense et illustration des projets politiques.

Tout le monde y perdra.

Pour autant, il ne faut pas négliger ce que dit M. Sarkozy dont le projet d’alliance est frappé au coin du bon sens. On ne voit pas ce que les descendants des gaullistes ont à perdre en s’associant avec les macronistes pour faire un bout de chemin, avant que chacun ne reprenne ses billes en 2027. On ne voit pas ce que la droite a à gagner en mimant le RN jusqu’à la parodie. On ne voit pas ce que la France a à gagner si la partition est un chaos que rien ne justifie, car tous nos maux sont réparables pour peu que nous les soignons au lieu de nous battre comme des chiffonniers. Des élections anticipées ? Tout le monde y perdra.

RICHARD LISCIA

 

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