Une fusée égarée

Zelensky après le raid russe
(Photo AFP)

Coup de tonnerre dans le ciel pourtant fracassant de l’Ukraine : une fusée est tombée sur le sol polonais, faisant deux morts. Les Occidentaux ont déjà dit qu’il ne fallait pas s’affoler.

LES Russes ont fait très vite savoir que ce n’était pas leur fusée. Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, s’est hâté de dire que les Russes avaient l’intention d’élargir le conflit. Joe Biden a indiqué que la fusée était de fabrication russe mais que la balistique interdisait de croire qu’elle avait été tirée par les Russes. Mais quand même, on assiste à un branle-bas de combat. Le premier réflexe occidental a été de réunir des experts de l’OTAN afin qu’ils nous disent si, oui ou non, Poutine a attaqué délibérément un de ses membres. Auquel cas, des représailles de l’OTAN, inscrites dans les textes, devraient être appliquées.

Une question politique.

Nous voici en guerre ? L’enquête de l’institution atlantique aura vite fait de dire la vérité, c’est-à-dire que la fusée est russe mais lancée par l’Ukraine. On n’a vraiment pas besoin de diaboliser Poutine, il s’y entend très bien pour apparaître comme l’ennemi public numéro 1. Mais, de même qu’il n’est pas nécessaire de lancer contre Poutine des fusées occidentales pour qu’il apprenne à vivre, de même M. Zelensky, tout engagé qu’il est dans une tâche infernale, doit éviter que ses propos ressemblent à de la propagande russe. Les moyens dont l’OTAN dispose sont suffisants pour tuer dans l’œuf toute velléité russe de s’acharner contre les civils ukrainiens privés d’électricité et d’eau. La question du moment à partir duquel il faut déclencher le tir contre le territoire russe est purement politique.

Pas besoin d’un prétexte.

Il y a des « lignes rouges » que le maître du Kremlin ne doit pas franchir. Il les a pourtant franchies, commettant crimes de guerre et crimes contre l’humanité et, si on veut procéder à des représailles, on n’a pas besoin de prendre le prétexte d’une fusée égarée. La guerre en Ukraine est immonde, notamment parce qu’elle dure et que les bombardements n’offrent aucun répit à la population civile. Les preuves d’exécutions sommaires, de tortures, de déportations de civils et notamment d’enfants séparés de leurs parents, de destructions, de sabotages commis par les Russes sont déjà innombrables. Il y a des mois que l’OTAN aurait dû envoyer un ultimatum à Moscou.

Une conduite génocidaire…

Et il y a des mois que, si le Kremlin, sous une menace plus ferme des Occidentaux, n’avait pas mis un terme à sa sauvagerie, les civils russes auraient dû être soumis à une férocité du même type que celle de leur président. Je pèse mes mots. La conduite personnelle de Poutine est génocidaire. Il ne lâchera l’Ukraine que lorsqu’elle n’aura plus un souffle de vie. On n’est pas obligé de reprendre la rhétorique de Zelensky, mais on n’est pas obligé non plus de mâcher ses mots devant un assaut aussi abject, aussi vain, aussi  monstrueux. Il faut bien comprendre que, plus l’armée ukrainienne, qui a repris Kherson, ce qui lui a valu un déluge de fusées russes, progressera vers la Crimée et plus de bombes et d’obus seront déversés sur les Ukrainiens.

… et suicidaire.

Toute cette émotion autour de la Pologne, victime d’une fusée russe, n’a qu’une signification diplomatique. Les Alliés feront savoir à Moscou que d’autres incidents peuvent se produire et qu’à tirer comme des fous, les Russes risquent de déclencher un conflit beaucoup plus large. Ce n’est pas que les artilleurs russes ne savent pas toucher leurs cibles, c’est qu’il pleut littéralement des bombes sur l’Ukraine martyre. Poutine n’est pas fou mais se conduit comme tel : il veut détruire l’Ukraine, même si c’est au prix de sa propre carrière.

RICHARD LISCIA

 

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2 réponses à Une fusée égarée

  1. Kim Wenzel dit :

    Je suis 100 % d’accord avec vous.
    Poutine ira jusqu’au bout de ce qu’il peut faire… et les moyens que nous, occidentaux, donnons à l’Ukraine pour se défendre – en lui enjoignant de ne surtout pas attaquer la Russie directement sur ses terres avec ces armes fournies- ne peuvent que pérenniser le conflit, avec son cortège de violences, d’atrocités et de morts.
    Poutine sait qu’il n’a rien à craindre directement de l’Occident.Il n’y à qu’à voir, hier soir quand on pensait encore que ce pouvait être un missile russe qui avait touché la Pologne, les réactions : « réfléchir, attendre, se réunir, discuter, éviter l’escalade »…
    Poutine peut faire ce qu’il veut, il n’a pas peur de nous. Une brute épaisse sans peur ni conscience ni retenue face à des politiques et des diplomates dans leurs petits souliers.
    Jusqu’à quand cette mascarade ?

  2. Doriel Pebin dit :

    Bonjour. Commentaires pertinents et lucides. Grosso modo, nos démocraties « jouent leur rôle » à la différence de nombre d’autres pays. L’Afrique malheureusement en est un exemple. Toujours prompte à protester contre les abus des (ex) pays coloniaux, de facto, elle reste très silencieuse sur les souffrances du peuple ukrainien (jamais colonisateur de l’Afrique) et le comportement terroriste d’État de la Russie.
    La mascarade continuera tant que nombre de pays du monde ne mettront pas une pression internationale forte en ne disant rien.

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