Les trois dangers

Funérailles à Karkhiv
(Photo AFP)

On a beau vouloir rester optimiste, on est confronté à trois maux exceptionnels : une pandémie de Covid qui, quoi que l’on fasse, revient de temps à autre, une inflation difficile à juguler et une insécurité que l’invasion de l’Ukraine n’a fait qu’aggraver.

INUTILE de donner des noms d’oiseaux à ceux qui nous gouvernent : ils ne sont responsables d’aucun de ces tourments qui mettent la société française à dure épreuve, même si, dans la lutte organisée pour remédier à ces maux, des erreurs peuvent être commises. Errare humanum est, sed perseverare diabolicum. La question porte, en réalité, sur l’effet total de cette convergence qui teste notre résilience nationale, d’autant que l’arrivée de Noël nous incite plutôt à partager les bonheurs familiaux. Nous ne retrouverons notre calme que si nous faisons preuve de stoïcisme.

Gestes-barrières.

Il consiste à relativiser l’impact négatif des dangers. Rien de tel pour échapper à la contagion que de porter le masque en toute circonstance et de se laver les mains fréquemment. C’est un double geste civique : nous nous protégeons et protégeons les autres. Nous devons freiner l’inflation en faisant des économies et en réduisant nos dépenses. Nous sommes censés admettre que, tout, sur cette terre, étant relatif, nous sommes logés à bien meilleure enseigne que les Ukrainiens.

D’un mal sort un bien.

La guerre est un bon test de la solidité de nos nerfs. N’oublions jamais que les souffrances du peuple ukrainien ne sont pas à comparer avec les nôtres. Ils sont au front et nous les regardons se battre contre un ennemi féroce et implacable. Ce qu’il nous en coûte sur les plans humain et financier n’a rien à voir avec ce que cela nous coûtera au moment de la reconstruction de l’Ukraine. Mais d’un mal sort un bien. L’Ukraine un jour libre, c’est des créations d’emplois, un tampon solide entre la démocratie et l’arbitraire, une fête de la solidarité qui emportera comme fétus de paille les hésitations et atermoiements de certains pays membres de l’Union européenne.

La source de l’optimisme.

Ceux d’entre nous qui ont connu l’Occupation se font, par la force des choses, de plus en plus rares. Ils sont néanmoins quelques-uns à nous rappeler que rien n’est pire, pour une nation, que d’être vaincue et que si l’invasion de l’Ukraine a apporté un élément positif à notre situation géopolitique, c’est cette sorte de piqûre de rappel qui nous permis de resserrer les rangs, en Europe et au sein de l’Alliance atlantique. Je n’observe pas ces petites querelles européennes ou atlantiques qui tendraient à nous faire croire qu’il y a quelque chose de pourri au royaume occidental sans y trouver la source abondante de mon optimisme. C’est une chose de se disputer avec un ami, c’en est une autre d’affronter un ennemi féroce attaché à éliminer une nation.

Sur le pied de guerre.

Ce que Vladimir Poutine a fait dans sa folie meurtrière, c’est augmenter sensiblement notre résistance à la terreur. D’aucuns, parmi nous, n’ont donné aucun signe d’affolement parce qu’ils ne sont pas informés des horribles exactions russes en Ukraine. Mais la plupart des peuples européens savent exactement à quoi s’en tenir et ils sont convaincus, leur indolence en témoigne, que la guerre restera circonscrite à l’Ukraine, que Poutine n’osera ni nous attaquer ni utiliser l’arme nucléaire et que, si nous vaquons à nos affaires sans nous inquiéter outre mesure, nous sommes, au fond de notre tête, sur le pied de guerre. Nous sommes préparés. Nos gouvernants nous indignent à cause de la réforme des retraites, ils sont encore bons pour nous servir de guides lors d’une éventuelle épreuve.

Cette terre qui nous protège.

La réalité des maux dont nous souffrons ne va pas disparaître sous l’effet d’une analyse. Nous aurons cet hiver (un peu) froid. La vie sera (un peu) plus chère. Sur le long terme, il nous faudra travailler (un peu) plus longtemps. Mais nous avons la chance inouïe de ne pas vivre près de la frontière russe, de ne pas attendre qu’un missile nous enterre vivants, de ne pas passer une nuit sans chauffage à moins vingt degrés. Ce que nous avons de mieux, c’est cette terre qui nous porte et nous protège.

RICHARD LISCIA

 

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2 réponses à Les trois dangers

  1. Kim Wenzel dit :

    Je ne peux m’empêcher d’être pessimiste sur le sort des Ukrainiens.
    Nous leur donnons certains moyens pour se défendre, mais pas vraiment pour contre-attaquer (et espérer vaincre) la Russie.
    Dès qu’ils attaquent au-delà de leur frontière, ils sont critiqués.
    Les munitions des Occidentaux vont diminuer et les aides devenir plus poussives, au fur et à mesure que cette guerre durera, a priori longtemps. Un enlisement qui ne fera qu’augmenter leurs pertes humaines au fil du temps.
    Donnez-moi, Richard, s’il vous plaît, des éléments pour retrouver un peu d’optimisme!
    Réponse
    Kim,
    L’Ukraine a relevé un défi colossal. Il est logique, sinon souhaitable, qu’elle souffre de son courage et de son abnégation. Mais elle a remporté des victoires et elle est en mesure de gagner de nouvelles batailles : il ne serait pas miracule ux qu’elle reprenne la Crimée. Le prix humain et matériel de cette reconquête sera, au final, extrêmement élevé. Ce qui rappellera au monde que la liberté est, après le pain, le bien le plus précieux. Nous ne pouvons, pour notre part, que continuer à soutenir les Ukrainiens et à leur montrer par tous les moyens qu’ils ne sont pas seuls contre la barbarie.
    R. L.

  2. Doriel Pebin dit :

    Bonjour, les munitions du côté russe diminuent aussi, raison pour laquelle Poutine cible les centrales d’énergie. Nous pouvons donc ne pas être si pessimiste car les pertes russes vont inévitablement provoquer des réactions au niveau du peuple russe. Il faut tenir bon et notre effort n’a rien à voir avec celui des Ukrainiens. Merci pour vos commentaires.

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