L’impasse

Macron et Borne unis dans la solitude
(Photo AFP)

La Première ministre, Élisabeth Borne, ayant reconfirmé que la mesure d’âge n’était plus négociable, la colère des manifestants, assortie de blocages de l’énergie, sera encore plus forte. Des commissions parlementaires examinent le dossier des retraites dont les syndicats exigent le retrait. 

AU MOMENT où le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, se félicite de la résistance de l’économie française à la crise et à l’inflation, tout est fait pour qu’elle tombe en récession. On ne s’étonnera guère de l’intensité de la crise, elle est inscrite depuis de nombreux mois dans les comportements de l’opposition et des syndicats, unis comme ils ne l’ont jamais été. Nous avons d’une part une majorité de citoyens totalement hostiles à la réforme et assise sur un florilège d’arguments,  et d’autre part un gouvernement inébranlable dont la logique n’est pas moins impressionnante.

La logique de Macron.

Cette réforme est utile, elle est indispensable si on ne veut pas que le déficit et la dette publique (3 000 milliards d’euros) fassent du pays une république bananière. Il existe plusieurs manières de lutter contre un excès de dépenses, soit par une réduction subtile, soit par l’inflation, soit enfin en fixant aux pensions un plafond à ne pas dépasser. Que le projet n’emballe pas le peuple est une autre affaire. Sur le plan politique, la position du président de la République, réélu en 2022, ne manque pas de logique : il n’a pas caché qu’il procèderait à la réforme s’il était réélu. Une vaste majorité lui a confié un second mandat, au grand dam de Mme Le Pen, persuadée que, cette fois, c’était son tour.

Comment empêcher la réforme.

Le présent est infiniment plus sombre que le passé récent et probablement que l’avenir immédiat. Tout le monde dit, à raison plus qu’à tort, que la crispation des citoyens et des syndicats est passagère, que le lancement de la réforme a donné lieu à une formidable intoxication, que M. Macron se contente de tenir une promesse. Bien que l’exécutif soit ouvert à des concessions, notamment sur la pénibilité du travail et les carrières longues, le mur dressé par les syndicats sert à empêcher la réforme, à défaut d’empêcher le président.

49/3 et dissolution.

Mais il a lié son sort au dossier et il a ainsi apporté sa contribution à la surenchère générale. Inutile d’attendre pour connaître le nombre des manifestants d’aujourd’hui : on en est déjà à la seconde partie du spectacle, qui se jouera à l’Assemblée nationale et qui pose les deux questions terribles de cette année politique : le recours à l’article 49/3 et son corollaire, la dissolution de l’Assemblée, suivie par des élections anticipées.

Perte d’énergie.

Il n’y a pas là de quoi ébranler le président de la République qui, pendant que Jean-Luc Mélenchon nourrit ses rêves d’une nouvelle constitution, entend aller au bout de son parcours, quelles qu’en soient les conséquences quelque peu effrayantes. Quelle perte d’énergie ! Ce n’est jamais le moment de s’offrir une tragédie, mais là, avec la guerre en Ukraine et l’inflation, on devrait plutôt se poser des questions sur la capacité du pays à encaisser un coup pareil.

La tentation référendaire.

C’est à se demander si un projet aussi compliqué, plein d’annexes, frappé d’un millier d’amendements mélenchonistes, aussi peu compréhensible pour la majorité qui déclare lui être hostile convient à un dialogue entre l’exécutif et le peuple. Lorsqu’on écoute les manifestants, on croit que le gouvernement s’apprête à jeter sur le pays une sorte de vaste manteau étouffe-tout, à commencer par nos libertés essentielles. Il n’en est rien, bien sûr, et la tentation référendaire annihile le dialogue. C’est oui ou c’est non et la discussion est terminée. Il est curieux qu’un peuple qui se plaint de son président expéditif puisse souhaiter la solution, elle même expéditive, qui consiste à répondre à une question par oui ou par non.

Protégé par la constitution.

Emmanuel Macron va calmement vers la dissolution, mais d’une manière distraite comme s’il allait ailleurs. Il campe sur les 15 millions de retraités qui ne sont pas affectés par la réforme ; sur ceux de LR qui, après avoir tergiversé (combien de cas de conscience !), finiront par voter la réforme et, bien sûr, sur sa majorité relative. Il ne dit pas s’il est pessimiste ou optimiste. Il utilise à fond le système, qui consiste à épargner le président tandis que la Première ministre encaisse toutes les bordées.

RICHARD LISCIA

 

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Une réponse à L’impasse

  1. Doriel Pebin dit :

    Bonjour, l’émotionnel (savamment entretenu par LFI et RN + syndicats + nombre de médias) a hélas, complètement pris le pas sur le rationnel. L’objectif n’est plus de préserver le système de retraites mais de « virer Macron », sans évidemment, songer aux conséquences (contexte de guerre et d’inflation, NUPES et LFI aux antipodes des idées et surtout minoritaires !). Pourquoi pratiquement pas un mot sur le fait que la France soit un des rares pays en Europe (de niveau économique comparable) avec un âge de retraite aussi bas ? Le Français serait-il le seul à être fatigué à 64 ans ? Le RN souhaite même revenir à 60 ans (?) quoique nous ayons le record des taux de prélèvements obligatoires ! Ces soi-disant responsables mettent le pays (présent et futur) dans un état de pathologie de l’intelligence sinon de paresse profonde. Où sont les personnes responsables ? Merci de dénoncer ces impostures et cette « adulescente » désolante.

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