La crise s’amplifie

À Sainte-Soline, la castagne
(Photo AFP)

La Première ministre, Élisabeth Borne, a proposé aux syndicats une grande réunion sans conditions préalable, avec l’espoir de créer un moment de détente. C’est raté : Laurent Berger, chef de la CFDT, dit qu’il ne se rendra pas à cette réunion si Mme Borne ne renonce pas à la réforme des retraites. 

LE GOUVERNEMENT continue d’appuyer son analyse sur le réformisme de la CFDT. C’est oublier la longueur et la violence de la crise et que M. Berger s’est radicalisé. Hier encore, on assurait à l’Élysée que nous allions vers un moment d’apaisement, mais le week end n’a pas calmé les esprits. Les manifestations contre les « méga-bassines »  ont donné lieu à des batailles graves entre forces de l’ordre et manifestants et un nouveau débat a été ouvert sur les responsabilités des policiers et gendarmes.

Brutalités policières.

Le climat continue donc à se détériorer.  Comme d’habitude, l’IGPN enquête et recueille les plaintes. Mais soyons sérieux : les organisateurs de la manifestation (interdite) savaient très bien que de nombreuses personnes ne sont allées au rendez-vous que pour attaquer les bassines. Quand des écologistes défendent la nature en s’en prenant aux forces de l’ordre, ils savent qu’ils excerbent à dessin les tensions. Ils ont beau jeu ensuite de se plaindres des brutalités policières.

Le point dur de l’armure.

De toute façon, il manque à la politique de Macron un élément décisif. Une réunion avec les syndicats n’a de sens que si elle ne comporte aucun préalable. Si le président est à ce point attaché à sa réforme qu’il est prêt à tout lui sacrifier, qu’il ne s’étonne pas de ne pas avoir le beurre et l’argent du beurre. On sait très bien ce qu’il faut pour que les trains roulent, que les manifestations cessent, que les carburants soient distribués et que les poubelles soient vidées : il faut renoncer à la réforme. Et, contrairement à la fine analyse dans laquelle le chef de l’État s’égare, Laurent Berger n’est pas le point soft de l’armure syndicale, il en est le plus dur.

Attendre et voir ?

Or rien ne dit que l’exécutif a compris la dimension de la crise. Il manque à la politique de Macron quelque effet de surprise, une idée audacieuse susceptible de donner aux syndicats le temps de réfléchir. Ce n’est pas le cas. Il est possible que le président de la République, dans ses arrière-pensées, compte sur la lassitude de la population, la difficulté de faire le trajet bureau-travail, la puanteur des rues et le pullulement des rats pour qu’enfin les grévistes, déjà pénalisés par les jours de grève non payées, finissent par reprendre le travail. C’est une façon optimiste de voir les choses et qui n’est pas loin de ressembler à de l’apathie : attendre et voir. La crise mérite mieux car elle met en danger les institutions, parce que trop de gens sont hostiles à la réforme, et qu’elle absorbe toute l’énergie de ceux qui défendent la réforme et ceux qui la combattent.

Une idée de Mélenchon.

Si Mme Borne doit s’entretenir avec les syndicats, M. Macron, lui, doit rencontrer les directions des partis politiques. Il y a au moins une question qu’il aimerait leur poser : « Vous voulez ma chute, mais avez-vous besoin ensuite de récupérer un pays en lambeaux ?  » J’ai eu l’occasion de dire à plusieurs reprises que, en dépit de la violence de cette crise, il est difficile pour le moment de voir un sauveteur présidentiel à portée de la main. C’est une équation à plusieurs inconnues : si Macron ne s’en va pas, il faudra bien qu’il gouverne. Même Jean-Luc Mélenchon, hier, disait  sur LCI une chose sensée, à savoir qu’il fallait soumettre la question des retraites aux experts de la sécurité sociale. Au fond, personne ne croit que Macron doive partir.

RICHARD LISCIA

 

Ce contenu a été publié dans Non classé. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Une réponse à La crise s’amplifie

  1. Dominique S dit :

    Deux-tiers des Français sont contre Macron et la réforme des retraites. Deux-tiers des Français sont contre Mélenchon et son accession au pouvoir, deux-tiers des Français sont contre Le Pen et son accession au pouvoir. Les LR et les socialistes, qui occupaient largement le terrain il n’y a pas si longtemps, sont désormais partagés entre ces trois camps. Alors on fait comment? Non, Macron ne doit pas céder. Car « si il cède là, il est fichu ». C’est l’expression d’un très bon intervenant lors d’un récent « C dans l’air ». Il répondait à une autre invitée qui commençait à changer d’avis. Jusqu’au milieu de la semaine dernière, elle pensait comme 80 % des Français, que la réforme serait maintenue. Personnellement, le retrait de cette loi me fait beaucoup plus peur que son maintien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.