Comment ne pas gérer une crise

Laurent Berger
(Photo AFP)

Le fossé séparant les syndicats du gouvernement ne cesse de s’élargir. L’imagination en matière de propositions nouvelles et de suggestions fraîches n’est pas l’apanage de l’exécutif. Le bras-de-fer voulu par les syndicats n’est pas de bonne augure. 

ÉLISABETH BORNE a invité hier les  organisations syndicales à une réunion pour essayer de rapprocher les points de vue. La rencontre n’a duré que 55 minutes, les syndicats ayant claqué la porte et réaffirmé leur volonté de poursuivre la mobilisation. Le gouvernement ne doit pas négliger l’intransigeance syndicale. Elle peut instaurer dans le pays un désordre social, mais aussi politique, qui pourrait durer des mois. De toute façon, le mal est fait, dans la mesure où manifestations et grèves ont altéré la croissance et l’emploi.

Vive Marine !

Les représentants des grévistes déclarent qu’Emmanuel Macron a pris le risque de faciliter la victoire de Marine Le Pen à la présidentielle de 2027. Ils parlent de cette affreuse hypothèse comme si elle ne les concernait pas. Il est vrai qu’elle prône la retraite à 60 ans, sans donner la moindre précision sur le financement de cette largesse. D’une certaine manière, les syndicats, qui ne respectent que leur propre conviction, devraient voter Le Pen. Admirable raisonnement.

Chantage.

Emmanuel Macron est en Chine. On le lui reproche parce que toute activité diplomatique l’empêche de céder aux exigences des syndicats impavides. Qu’on nous permette de croire que, le monde étant ce qu’il est, le voyage d’un président en Chine, pays le plus peuplé de la planète, est utile. Le pire, c’est que les prédictions syndicales ont quelque chose de vraisemblable. Dès lors que les syndicats se sont eux-mêmes absous de toute responsabilité, pourquoi ne pas exercer ce chantage sur le gouvernement ?

Ce n’est pas la guerre.

On nous dit qu’il faut trouver un accord où chacun devrait sauver la face. Mais la résolution d’une crise n’est jamais le paradis. Il faut faire des compromis, parfois cruels. Il me semble que le pire, dans l’affaire, c’est le manque d’imagination des protagonistes. La CFDT, syndicat réformiste, n’a rien à proposer et tous les syndicats réclament le statu quo. Le gouvernement doit mettre à plat tous les éléments de la réforme et tenter de trouver des économies susceptibles de remplacer la mesure d’âge. Et s’il n’y parvient pas, il a quand même le droit de le dire. Si la Première ministre, dont le sang-froid est remarquable, repartait de zéro, on commencerait par trouver des points d’accord mineurs, avant de se bloquer sur la mesure d’âge. Entre partenaires sociaux, ce n’est pas la guerre en Ukraine. Nous sommes tous les citoyens du même pays.

Question de confort.

Au lieu d’inventer des solutions, tout le monde perd son temps à pérorer dans les médias. Tout le monde ment. La France n’est pas, comme le dit la gauche, un pays qui perd ses repères démocratiques ; elle n’est pas un pays à genoux ; c’est sûr qu’il faut une pension décente pour les femmes, pour les handicapés, pour ceux qui ont commencé tôt à travailler. Mais il faut aussi préparer l’avenir et rendre le système des pensions invulnérable. En définitive, le fond du problème, c’est le manque de courage des syndicats. La défense de la retraite actuelle est infiniment plus confortable. Et à ce compte-là, Marine Le Pen est plus confortable, et attendre la catastrophe est plus confortable.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Comment ne pas gérer une crise

  1. Doriel pebin dit :

    Bonjour. Encore une fois, excellente analyse. Qui propose quelque chose alors que le nombre de retraités va augmenter ? On est dans l’incompétence revendiquée ! La Nupes veut Le Pen manifestement. Triste pays qui n’aura que ses yeux et son économie pour pleurer, démission de la lucidité pour des comportements d’adolescents sans réfléchir au moyen et long terme. Continuez à essayer !

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