Un moment de perplexité

Macron q’est trouvé un copain
(Photo AFP)

Jean-Luc Mélenchon a approuvé Emmanuel Macron au sujet de Taïwan. Le président de la République estime que la France, vouée à la recherche de la paix, ne peut pas se contenter de « suivre » les Américains en toute circonstance.

EN FAISANT cette déclaration, le chef de l’État voulait émanciper la France de la tutelle américaine et, comme il était accompagné par la présidente de la Commission européenne, Ursula van der Leyen, tout le monde a eu le sentiment qu’il s’exprimait au nom de l’Europe. C’est pourquoi ses partenaires européens se sont mis à se distinguer du président français, en revendiquant fièrement leur appartenance à l’OTAN, ce qui met Macron dans la position du cavalier seul. Et comme, pour une fois, il s’attire les bonnes grâces de la France insoumise, on lui suggérera de faire de la réaffirmation de la souveraineté française le point d’ancrage d’une nouvelle dans la crise des retraites. Et on l’imagine dire à Mélenchon : « Dites-moi, mon ami, vous ne pourriez pas faciliter l’adoption de la réforme ? « 

Pékin insulte les Américains.

Les chinois veulent intimider les Taïwanais. Les Chinois n’ont pas renoncé à conquérir Taïwan par la force. Ils viennent de se livrer à trois jours de grandes manœuvres destinées à intimider les Taïwanais, vite remis de leurs émotions.  Ces scènes de guerre jouées par l’armée chinoise n’ont qu’un but psychologique et ne sont pas censées dégénérer. Un navire de guerre américain s’étant rapproché du lieu des manœuvres, le gouvernement chinois, jamais à court d’insultes, en a abreuvé les États-Unis. Macron sait tout cela et, en s’éloignant de l’OTAN, il souhaite être seulement perçu comme un homme de dialogue et de paix, alors que les responsabilités atlantiques à l’égard de Taïwan sont comparables à celles que nous avons contractées avec l’Ukraine.

Macron contesté.

Mais il est incapable d’entraîner l’Europe, qui ne jure que par la protection nucléaire américaine. S’il est appouvé par l’extrême gauche, il fait hurler de rage les Allemands. Il sort très contesté de cet épisode à la fois inutile et dangereux. Le moment venu, il n’empêchera pas la Chine d’attaquer Taïwan. Il donne une carte à Pékin, toute surprise de trouver une forme d’alliance avec un pays européen. Joe Biden n’a pas souhaité préciser sa pensée sur la question, mais, manifestement, il espère éviter le clash avec la France, ce qui n’empêche pas sa mission de protection de Taïwan.

Le langage de la force.

Les déclarations chinoises de Macron sont regrettables dans la mesure où elles ouvrent la voie à une vive querelle avec nos partenaires européens sans la garantie d’un exploit diplomatique. À Poutine, comme à Xi, on ne peut parler que le langage de la force. Il valait donc mieux rechercher la souveraineté française dans ses sources nucléaires et non en exposant une idée tirée laborieusement du crédo gaulliste mais sans mise à jour. Nous ne pouvons pas plus négliger les Taïwanais que les Ukrainiens. Nous sommes comptables devant Zelensky des pertes ukrainiennes comme nous le serions face à Taïwan.

RICHARD LISCIA

 

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2 réponses à Un moment de perplexité

  1. Jean Vilanova dit :

    Les déclarations du président Macron sont réellement intempestives. Cet homme intelligent ne cesse de nous démontrer son goût pour la transgression et la provocation. Certes, pourquoi pas transgresser et provoquer, mais alors à bon escient et certainement pas au moment où se forme une coalition des autocraties et des dictatures contre les nations libres. Et au nom de qui s’exprime-t-il ; de la France ? De l’Europe ? S’il s’agit de l’Europe il a tout faux tant le continent reste, dans sa grande majorité, attaché au bouclier américain. Et de cela, eu égard à leur souffrance passée face à l’impéralisme russe meurtrier, on ne tiendra pas rigueur aux baltes, aux tchèques et aux polonais par exemple… S’il s’agit de la France, il a tout faux également. Prétendre que nous pourrions nous tenir à distance d’un conflit entre les USA et la Chine en cas d’invasion par cette dernière de Taïwan au prétexte que ledit conflit ne serait pas le nôtre, c’est aussi méconnaitre ou faire fi – gênant pour un président – des risques collatéraux pour notre pays dans la zone indo-pacifique. Maintenant, le président en appelle à l’autonomie stratégique de l’Europe. Fort bien. Mais alors, même si le contexte est différent, à presque 60 ans de distance M. Macron ne rejoint-il pas quand même un peu la cohorte de ceux qui sautaient sur leur chaise comme des cabris en disant : « l’Europe ! l’Europe ! l’Europe ! » en référence à un fameux discours du général de Gaulle en 1965 ? Nous sommes tous des Européens et je mesure ce que je dois à ce continent lequel, de Turku en Finlande à Algesiras en Andalousie, de ma tant aimée Liverpool jusqu’aux confins de l’Est m’a construit par sa culture et son histoire et m’a permis de vivre libre et en paix. Mais de vision stratégique commune, il n’y a pas pour l’instant et sans doute pour longtemps encore, hélas. Alors il faut faire avec, sans lien de subordination avec quiconque évidemment, dans le respect et la fidélité à nos alliés. De Gaulle encore, alors qu’il songeait déjà à quitter le commandement intégré de l’Otan n’avait-il pas dit aux Américains avec qui les relations étaient pourtant difficiles qu’il était prêt à mourir avec eux en cas d’attaque nucléaire de la Russie au moment de la crise des missiles en 1962 ? C’est cela être allié, non pas vassal, mais allié.
    Visiblement, Emmanuel Macron se veut l’héritier du général. Mais entre 1964, lorsque celui-ci ouvrit les relations diplomatiques avec la Chine et aujourd’hui, le monde a changé. La Chine, qui était un pays pauvre parmi les pauvres est devenue une grande puissance et l’influence de la France dont la voix comptait tant s’est considérablement affaiblie désormais. Russie, Chine et quelques autres pays (Iran, Corée du Nord…) ne comprennent et ne respectent que le langage de la force. Enfin, et c’est là certainement un détail, constater que la position d’Emmanuel Macron est saluée par quelqu’un d’aussi toxique que le conducator Mélenchon me déprime.
    Et pardon, M. Liscia, pour ces longs développements.

    Réponse
    Vous n’êtes pas long, vous êtes bon.
    R. L.

  2. Dominique S dit :

    Encore gamin, je me demandais bien pourquoi le général De Gaulle avait mis les Américains dehors. Je me pose la même question aujourd’hui, après les récentes déclarations de Macron. Est-ce de l’ingratitude ou de l’amour-propre mal placé ?

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