Ukraine : la Chine médiatrice

Larrons en foire
(Photo AFP)

On savait que le gouvernement chinois voulait servir de médiateur dans le cadre d’une vaste conversation sur la paix entre Russes et Ukrainiens. On ignorait ses motivations, ses moyens et ses intérêts. Voilà qu’un coup de téléphone envoyé par Volodymyr Zelensky à Xi Jinping crédibilise les intentions chinoises.

S’agit-il d’un progrès ou seulement d’une manoeuvre ? L’Europe et l’Amérique ont approuvé le geste de Zelensky. Une analyse compare la Crimée à Taïwan et et estime que le principe de l’immuabilité des frontières s’applIque dans les deux cas. Sauf que les Taïwanais, eux, réclament le statu quo, tandis que Zelensky exige le retrait de toutes les forces russes.  Il existe donc une confusion alarmante sur les intentions des acteurs de la crise ukrainienne. La bénédiction poutinienne pourrait refléter un passage à vide mis à profit pour ré-attaquer plus tard. Le printemps et les armes sont arrivés, et l’armée ukrainienne passera à l’offensive. Comment le plan chinois peut-il s’insérer dans un contexte aussi militaire ?

Un dilemme ukrainien.

Les Ukrainiens sont donc placés devant un dilemme : ils ne souhaitent pas renoncer à l’opportunité ouverte par les Chinois, mais ils craignent fort de jouer les dindons de la farce. Pour Poutine, c’est tout  bénéfice : il laisse travailler le président chinois et ne prendra ses responsabilités qu’au dernier moment. Avant même d’entrer dans le vif du sujet, il est souhaitable que les Ukrainiens soient accompagnés à la table ds négociations par des Occidentaux et les Chinois par des Russes. Ce ne sera pas facile de laminer les egos.

Un clash peut se produire.

La position de Poutine est affaiblie par ses revers militaires, mais il va rappeler à la délégation chinoise les principes qu’elle a toujours énoncés. Il n’y aucun risque de friction, ces deux-là s’entendent comme larrons en foire. De toute façon, le jour du premier échange est lointain. Il faudra beaucoup de sang-froid à Zelensky pour serrer la pince du « boucher de Bahmout ». Un clash peut se produire. Une des deux délégations, ou les deux, risquent de quitter la partie avant la fin du tour de table.

Deux fers au feu.

Le pire, c’est que, si l’idée d’une négociation se renforce, elle sera précédée par les derniers assauts militaires que les Russes lanceront pour gagner un peu de terrain et par la fameuse contre-offensive ukrainienne. La Russie a perdu son énergie et remplacé la stratégie par la barbarie. L’Ukraine, elle, pense à juste titre qu’elle peut gagner la guerre. Européens et Américains ne forcent pas Zelensky à négocier. Ils estiment simplement qu’il n’y a pas de mal à avoir deux fers au feu. Le grand paradoxe est le suivant : Poutine aimerait bien réduire l’Ukraine en cendres, mais s’il cédait à cette tentation, c’est la Russie qui en paierait les frais ; Zelensky sait qu’il peut remporter la bataille mais n’ignore pas que la Chine lui offre une commode sortie du conflit.

RICHARD LISCIA

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