Le sous-marin de la mort

Les cinq victimes
(Photos AFP)

Le « Titan », qui avait emmené cinq explorateurs jusqu’à l’épave du « Titanic », au fond de l’océan, a implosé sous l’effet de la pression. Il n’y a pas de survivants.

IL NE S’AGIT PAS d’un fait-divers, mais du résultat d’une expédition catastrophique qui a été très mal préparée. La société qui a conçu cet esquif très fragile, ne l’a pas mis à l’essai et surtout a ignoré les préventions émises par les experts. L’appétit de l’aventure a conduit les explorateurs à la mort et, alors qu’ils ne répondaient déjà plus aux appels radio, des moyens considérables ont été déployés, principalement par les États-Unis pour sauver les aventuriers.

Un procès au civil.

L’accident donnera lieu à un procès civil qui durera des années, mais elle aura aussi des conséquences pénales. Les concepteurs de l’embarcation devront rendre des comptes sur ce qui semble être leur irresponsabilité. Il faudrait, en premier lieu, que cette fascination pour le « Titanic » cesse le plus vite possible car elle a suscité -et suscite encore- un énorme intérêt chez ceux qui croient pouvoir ignorer les règlements, prendre des risques auxquels les gardes-côtes tentent de remédier et laissent une facture impayée qui s’élève à des millions d’euros. Tout le monde n’est pas la NASA ni Elon Musk et plus le défi est grand, plus la prudence est requise.

La disparition de Nargeolet.

On n’omettra pas d’exprimer sa solidarité  avec les victimes. On regrettera que Paul-Henri Nargeolet, grand spécaliste des abysses sous-marines, aient participé à la mésaventure en la cautionnant de son expertise et en y participant au prix de sa vie. D’autant que le « Titanic » continuera d’exercer sur le public, surtout les riches et les spécialistes, une fascination croissante et que d’autres tentatives d’approche de l’épave sont à craindre. La technologie ne pardonne pas. Pour chaque risque, il faut le dispositif adapté. Ce qui a tué les passagers du « Titan », c’est hélas leur sens de l’esthétique. Ils passent leur vie à restaurer dans leur imagination la splendeur d’un paquebot considéré en 1912 comme invulnérable, mais qui n’a pas résisté au premier iceberg.

Une gloire éphémère.

L’implosion du « Titan » résulte du même engouement qui a saisi les admirateurs du « Titanic ». L’œuvre cinématographique de James Cameron n’est d’ailleurs pas autre chose que le retour à une gloire éphémère. L’horreur de l’accident, avec ses milliers de victimes, a trouvé sa reproduction lilliputienne avec le « Titan ». En 111 ans, il y a un continuum passionnel qui met l’exploration au-dessus de la vie. Certes, sans l’audace, pas de progrès. Certes, l’histoire nous a appris que la vie humaine ne pèse pas lourd. Mais cela n’empêchera jamais les hommes de bonne volonté de faire de la vie la première des priorités.

RICHARD LISCIA

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5 réponses à Le sous-marin de la mort

  1. pinard dit :

    Aurait-on dépensé autant d’argent, mis autant de moyens pour le sauvetage de migrants en Amérique, en Méditerranée etc ?

    • Dominique S dit :

      Le naufrage du Titanic est justement celui d’un bateau de migrants. Mais il y avait aussi des milliardaires à bord. C’est ce qui fait toute la différence. Voilà pourquoi un siècle après, d’autres milliardaires ont voulu revivre intégralement, le funeste destin de leurs ancêtres.

  2. Wayanjc dit :

    Je pense que les explorateurs de Titan sont seuls responsables de leur aventure comme ceux qui vont dans l’espace pour 20 mn de vol. Donc identique à ceux des migrants/clandestins/sans papiers.
    Je ne vais pas pleurer pou autant.
    De toute manière, laissons les âmes en paix dans l’épave tout comme pour celles des momies en Égypte.

  3. Jean Vilanova dit :

    Toutes ces folles expéditions touristiques dans l’espace ou sous la mer, faut-il qu’ils s’ennuient dans leur quotidien ces milliardaires ! La prochaine étape, c’est quoi ? On se le demande … Quel sens donner au spectacle malsain d’une épave, tombeau de tant de gens ? Admirer les tableaux des grands maîtres hollandais, flâner sur les chemins de Corse ou de Toscane, se plonger encore et toujours dans les philosophes de la Grèce antique, transmettre aux plus jeunes ce que l’on a appris de ses maîtres, se disputer, écouter, consoler et être consolé à son tour, aimer enfin, sans calcul, n’est-ce pas là ce qui fait qu’une vie vaut d’être vécue ? Et laissons les morts reposer en paix.

  4. OJF dit :

    Pourquoi un procès pour les escrocs vendeurs de rêve et de mort qui ont conçu cette exploration mal préparée
    et aucun procès pour les passeurs escrocs (et les États qui les soutiennent) conduisant les migrants à la mort :
    – escroquerie
    – abus de faiblesse
    – mise en danger de la vie d’autrui
    – trafic d’êtres humains

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