Un pays sonné

Bruno Retailleau ne veut pas exonérer les parents
(Photo AFP)

La bonne nouvelle, c’est que le reflux de la violence se confirme chaque nuit ; la mauvaise, c’est l’effort de reconstruction qui est colossal. C’est aussi que l’exécutif doit trouver le mélange de répression et d’accompagnement indispensable au redressement.

L’ACTION du gouvernement sera affectée par les positions adoptées par les partis politiques. Bruno Retailleau, chef des sénateurs, demande que les parents soient responsabilisés et que les mineurs condamnés purgent effectivement leur peine tandis que la France insoumise refuse de stigmatiser la violence des jeunes. Emmanuel Macron a su faire la synthèse d’une politique à deux pieds : intolérance pour les exactions, gages à donner aux quartiers sensibles. Mais il ne semble pas en mesure, cette fois encore, de rallier une majorité absolue autour de ce canevas.

Solutions œcuméniques.

Le consensus est à rechercher dans quelques données peu contestables : la crise a renforcé quelque peu la popularité de l’exécutif, les grandes vacances contribueront à un relâchement des tensions et la pire réponse à adresser aux émeutiers est sûrement de se perdre en palabres interminables qui augmenteront les frustrations des populations concernées. Or la crise a déjà donné lieu à de sérieux dérapages, comme en témoigne cette cagnotte scélérate qui, à l’instigation de l’extrême droite, a réuni 1 300 000 euros pour le policier qui a tué Nahel. La gravité du moment incite le pays à trouver des solutions, certes lentes à mettre en œuvre, mais teintées d’œcuménisme.

Une action ferme et durable.

Même si un sondage Elabe montre que les électeurs de LFI ne veulent pas dénoncer les violences, qu’ils considèrent comme le seul moyen de faire plier la politique du gouvernement, une immense majorité se dégage pour déplorer la mort d’un adolescent de 17 ans, ce qui conforte les choix de l’Élysée. Ce n’est plus le moment de dire que les quartiers ont été négligés pendant 40 ans. C’est celui d’engager une action à la fois ferme et durable pour commencer à rendre leurs chances aux jeunes des quartiers.

Il y a un espoir.

Je ne suis pas sûr que cette explosion de rage enfonce des racines dans l’analyse économique et sociale. La casse est un mimétisme d’autant plus à la mode que la plupart du temps il reste impuni. On ne convaincra pas les jeunes pour autant en leur signalant leur lâcheté. Il faut une pédagogie méticuleuse qui leur montre les atouts offerts par la République, logements, écoles et hôpitaux dont leurs ancêtres, d’où qu’ils venaient, ne disposaient guère. Encore aujourd’hui, l’ambition de la jeunessse maghrébine est de rejoindre la France et on ne se rend pas dans les pays du Maghreb sans s’entendre dire que décidément nous sommes chiches en visas. Notre force, c’est la liberté. On peut tout dire en France où le silence est de plomb. On peut s’exprimer comme nulle part ailleurs. Il y a toujours un espoir.

Eux et nous ? Non, nous tous.

Il n’est pas utile d’exonérer les parents. Ils ont nécessairement une part de responsabilité, comme tous les parents, y comprus ceux de la bourgeoisie qui oublient parfois leurs devoirs communautaires. Il n’est ni sain ni humain de songer à expulser les fauteurs de troubles qui, comme toujours, ont encore une chance de s’amender. Nous avons été épouvantés par la violence des gosses. Mais justement, ce ne sont que des gosses. Il n’y a aucun risque qu’à 20 ans, ils se croient encore à la maternelle. Il doivent apprendre qu’il existe du plaisir à bien faire, à comprendre qu’ils sont à la fois français et libres, deux atouts qui ne sont pas offerts dans un grand nombre de pays. Et que l’immigration, loin de correspondre à je ne sais quel péril qui menacerait notre pays, demeure une richesse, pour eux et pour nous. Qu’un moment viendra où, en dépit des extrêmes, il n’y aura plus de différenc entre eux et nous. Nous serons tous « nous ». Car nous viendrons du même creuset.

RICHARD LISCIA

 

 

Ce contenu a été publié dans Non classé. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

2 réponses à Un pays sonné

  1. Doriel Pebin dit :

    bonjour et merci pour votre billet à connotation positive. Il ne sombre pas dans le ressentiment mais rappelle la réalité. Les populations de ces quartiers sont les premières victimes des émeutes. D’ailleurs, dès que certaines personnes réussissent, elles quittent ces quartiers ghettoïsés et sont remplacées par de nouveaux immigrés alimentant un cercle vicieux. Il faut trouver des solutions innovantes en co-construction avec les acteurs (légitimes) de terrain pour des solutions à moyen et long terme. Cela fait 40 ans qu’on entend les mêmes choses, il serait opportun d’être disruptif.

  2. PASSEBOIS Danielle dit :

    Votre angélisme me navre !
    Avez-vous vu le film « Les Choristes « , avec Gérard Jugnot ? Il arrive à récupérer pratiquement tous ces enfants perdus, avec le chant, même le soliste récalcitrant. Pourtant il y en a un qu’il n’a pas pu convaincre, malgré toute sa bonne volonté, parce qu’il a le mal chevillé au corps . La haine qui l’anime lui fera mettre le feu à leur établissement. Irrécupérables sont certains.

    Réponse
    Mon angélisme n’est autre que du pragmatisme. S’il n’en reste qu’un la haine chevillée au corps, l’affaire est close.
    R. L.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.