Poutine et Navalny

Navalny au tribunal le 4 août dernier
(Photo AFP)

On est en droit de se demander pourquoi Vladimir Poutine concentre toute la brutalité de sa répression sur le dissident Alexei Navalny et pourquoi celui-ci n’a jamais saisi l’occasion de quitter la Russie.

POUTINE n’est pas seulement un dictateur qui utilise toute la gamme des moyens en son pouvoir. C’est aussi un bourreau qui pratique, pour se divertir, la torture, subtile et pleine d’imagination, sur son dissident préféré. Empoisonné par les agents de Poutine, Navalny n’a dû son salut qu’à la médecine allemande. Aussitôt soigné et guéri, muni des preuves de la tentative d’exécution lancée par Poutine, Navalny a voulu rentrer en Russie, convaincu qu’il était de ne pouvoir jouer un rôle efficace s’il s’installait en Occident et critiquait, mais de loin, le maître du Kremlin. Ce geste incroyablement courageux, il le paie chaque jour de mille souffrances et humiliations. Son engagement résultait d’une intuition fulgurante, mais qui l’exposait à d’incessantes brimades.

L’accusateur permanent de Poutine.

Presque chaque jour, une justice aux ordres ouvre un nouveau dossier à charge contre Alexei Navalny qui n’a pratiquement aucun espoir d’être libéré. Pour se battre contre Poutine, Navalny ne dispose que de sa seule voix, qu’il peine à faire entendre mais qui, quand elle résonne,  incrimine Poutine un peu plus. Les deux hommes se sont rencontrés sur des sables mouvants et Poutine ne doute pas que le dissident ait raison sur toute la ligne. Il voulait s’en débarrasser mais les services secrets russes ne sont pas les plus adroits du monde. Poutine s’occupe de la place de la Russie sur la surface de la planète, mais le match qui l’oppose à Navalny est une particularité bien spécifique.

La voix de la vérité.

Car le dictateur sait que le dissident dit la vérité alors que la propagande russe noie les jugements du peuple dans une masse de mensonges. Pour Poutine, Navalny est le primum inter pares, un dissident pas comme les autres auquel il faut réserver un service particulièrement féroce. Quant à Navalny, il est la voix de la vérité, celle de la consciece humaine, celle qui continuera à le dénoncer même s’il s’enferme dans une tombe. La popularité de Navalny en Occident est probablement ce qui le fait tenir. Tous ceux qui ont pu le voir notent qu’il n’est nullement déprimé. C’est l’exclusivité de son combat contre Poutine qui le porte.

Navalny a les chances les plus grandes.

Navalny ne sortira de prison que lorsque Poutine sera mort, et Poutine, qui a raté l’exécution de son adversaire, ne peut plus le faire assassiner en prison. La bataille juridique, celle des mots, des idées, la liste interminable des crimes de guerre et contre l’humanité commis par le dictateur de Moscou continueront donc d’alimenter une polémique où les vérités de Navalny ne sont pas crues par le public russe qui avale toutes les couleuvres envoyées par le pouvoir. De fait, Navalny croit plus en son avenir que Poutine au sien. C’est ce qui fait de la lutte entre les deux hommes un spectacle fascinant.

RICHARD LISCIA

 

 

Ce contenu a été publié dans Non classé. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.