Malaise au « Point »

Nicolas Baverez, dominateur et sûr de lui
(Photo AFP)

Éditorialiste au « Point » et dans d’autres journaux, Nicolas Baverez s’est livré le 3 août dernier à une charge extraordinairement virulente contre Emmanuel Macron et son gouvernement. Des lecteurs, mais aussi des collaborateurs de l’hebdomadaire, en ont été choqués. Au point que, dans son édition du 10 août, le journal a publié une vive critique de l’article de M. Baverez, rédigée par le chroniqueur Michel Richard.

M. BAVEREZ n’échappera pas à une formule galvaudée : tout ce qui est excessif  est insignifiant.  Doué de tous les talents du pamphlétaire, il ne lui était pas difficile de rassembler dans le même texte les éléments sérieux qui forment le passif du président de la République. On se serait étonné de sa violence verbale s’il ne s’acharnait depuis des années à démolir la macronie, formation et philosophie auxquelles il ne trouve aucune vertu et dont il semble souhaiter la disparition rapide. De toute façon, il n’est pas le seul à être saisi par cette passion destructrice et sa diatribe, certes inattendue mais conforme à sa sévérité de précepteur, se mêle, avec une once de talent en prime, au concert décidément accablant qui fait de la France un pays à parti unique : l’anti-macronisme.

Un bon journal.

« Le Point », journal auquel je suis abonné, raffole des bagarres sémantiques et il en donne à lire chaque semaine. On ne saurait toutefois lancer contre lui une charge meurtrière. Sur l’économie, la politique, l’histoire, il apporte des éclairages qu’on ne trouve pas ailleurs. Il n’empêche que son quarteron d’éditorialistes mène contre Macron une guérilla incessante, et d’autant plus efficace qu’ils savent tous écrire un papier accablant pour leur victimes.

La riposte du 10 août.

L’article du 3 août de Nicolas Baverez avait pour titre « Emmanuel Macron est-il à la hauteur ? » Oui, riposte Michel Richard qui, aux arguments fournis par la dette, le déclin de notre diplomatie, la succession de crises fort mal contenues par le pouvoir, oppose le réformisme appliqué, la résilience du président, l’opposant volume du travail accompli par le Parlement. Je suis moi-même entré dans ce débat national de manière très fréquente et le lecteur sait que je penche pour M. Richard plus que pour M. Baverez.

Une mise au point interminable.

La réaction du « Point » témoigne de l’embarras de sa direction, qui n’a pas cru pouvoir publier l’article de M. Richard sans y ajouter une réponse de trois pages et demie de M. Baverez. Lequel a peut-être pensé qu’on ne l’avait pas entendu ni compris et qui nous a servi sa vengeance, cette fois avec hargne et colère sous-jacente. Michel Richard a cru bon de rappeler les multiples talents de celui dont il a fait son adversaire, M. Baverez a riposté d’abord en respectant les règles de la courtoisie mais pour renvoyer M. Richard à son statut qui ne serait pas le même que le sien.

Il a voté Macron !

La liberté d’expression n’est pas un incendie qu’on éteint par une inondation. La démesure de Nicolas Baverez est manifeste si l’on en juge par le nombre de signes qu’il peut écrire pour imposer le poids de ses mots, à défaut de convaincre, par exemple en admettant que M. Macron a eu un mandat infernal et qu’il est moins mauvais qu’on ne le dit. Il le dit à sa façon, d’ailleurs, en assurant ses lecteurs qu’il a voté deux fois au second tour pour M. Macron et en regrettant presque de ne pouvoir le faire en 2027. S’il ne participait pas à la curée nationale contre Macron, il se serait peut-être gardé une chance pour voter en faveur d’un candidat certes de droite, ça, on l’a compris, mais réformiste plutôt que populiste. Bref, en élisant deux fois le même président, il est tombé dans les filets tendus par le chef de l’État, qui oblige les gens intelligents à se tourner vers lui quand pointe le danger du populisme.

Une pantalonnade.

L’affaire est drôle et on imagine les négociations complexes qui ont abouti au résultat incongru auquel ont eu droit les lecteurs du « Point ». Jupiter n’a pas encore succombé, mais il y a un Jupiter-Baverez pour qui la liberté d’expression passe avant tout, c’est-à-dire que la sienne passe avant celle des autres. C’est, bien sûr, une pantalonnade. Mais c’est aussi un débat qui doit être poursuivi. Le plus talentueux des chroniqueurs politiques peut souffrir la contestation. Les publications auxquelles il collabore n’ont aucune raison de le privilégier. Il doit rayonner par son talent et son érudition et non en fonction d’une hiérarchie qui n’existe que dans sa tête.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Malaise au « Point »

  1. Dominique S. dit :

    Peu importe le discours de M. Baverez dans son éditorial du Point, le 3 août dernier. Le principal, c’est qu’il ait voté Macron en 2017, et aussi en 2022. Peu importe les paroles, ce qui compte ce sont les actes.

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