La tentation munichoise

Sarkozy réinvente le compromis
(Photo AFP)

Dans un entretien avec « le Figaro », l’ancien président de la République, Nicolas Sarkozy, prévoit une paix en Ukraine fondée sur des abandons de territoires. Dans un livre, il fait l’éloge de Gérald Darmanin qu’il voit comme un bon candidat de la droite à la présidentielle.

M. SARKOZY est le premier, en Europe, à exprimer à sa manière la fatigue croissante des Occidentaux à l’égard de la durée de la guerre en Ukraine. Mais cette lassitude n’existe que chez ceux qui ne voient pas nécessairement Vladimir Poutine comme un ennemi dangereux. Dans l’effort de l’ex-président français pour peser en faveur d’un compromis, ne sont incluses ni les souffrances terribles des Ukrainiens ni la nature du maître du Kremlin. Il ne s’agit ni d’une guerre ordinaire, ni d’un conflit local. Il s’agit d’un bras-de-fer entre la Russie conquérante et l’Occident menacé.

Indulgence historique.

Nicolas Sarkozy ne déteste pas Poutine ; fort de l’avoir empêché de s’emparer de la totalité de la Géorgie, l’ancien président aspire à jouer un rôle dans une négociation éventuelle, sans trop d’égards pour les sacrifices ukrainiens et avec une sorte d’indulgence historique (« C’est Poutine, c’est la Russie ») qui conviendrait à la conjoncture mondiale. Bien entendu, on nous répètera à l’envi que la guerre mène directement aux négociations et qu’il n’y a pas de négociations sans concessions. Mais la confrontation est déséquilibrée : pour le moment, Zelensky ne fait pas le poids face à Poutine et au bout de deux années de souffrances, il ne peut pas lui tendre les clés de la Crimée et du Donbass.

Impatience.

Car ce n’est pas de continuer à se battre qui est le plus difficile pour les Ukrainiens, c’est d’accepter le dépeçage de leur territoire en raison d’une logique qui est celle de la force. Il y a, dans cette affaire, une dimension patriotique, un courage, une abnégation que M. Sarkozy devrait comprendre, notamment en se rendant sur place. Nous, Européens, ressemblons par certains côtés à Poutine : de même qu’ils croyait phagocyter l’Ukraine en quelques jours, de même nous voudrions que les Ukrainiens gagnent la guerre en quelques semaines.

Nous n’avons pas le choix.

La position de M. Sarkozy, qui se veut originale, est en réalité un aveu de faiblesse, un discours que Poutine espère entendre depuis longtemps. Le voilà renforcé par les propos de l’ancien président français. En réalité, les Occidentaux n’ont pas le choix. Ils soutiennent l’Ukraine parce qu’ils défendent son intégrité. C’est un engagement sans nuances, c’est une guerre qui ne doit pas être seulement livrée mais gagnée, et nous avons affaire à un ennemi à la fois intraitable et fragile. Ce n’est pas exactement le moment de tendre une oreille pour savoir ce qu’il a à dire. C’est celui de lui montrer un front uni et de ne le laisser nourrir aucune illusion.

RICHARD LISCIA

PS-Dans un livre à paraître, Nicolas Sarkozy soutient la candidature éventuelle de Gérald Darmanin à l’élection présidentielle de 2027.

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3 réponses à La tentation munichoise

  1. Jean Vilanova dit :

    Déjà condamné à une peine de prison ferme par la Cour d’appel de Paris (en attendant l’arrêt de cassation, juge de la forme et non du fond) pour corruption et trafic d’influence et dans la perspective de ses autres rendez-vous judiciaires, Nicolas Sarkozy aurait pu faire le choix, on peut rêver, d’une retraite silencieuse et spirituelle dans quelque abbaye de Bretagne ou du Dauphiné. Eh bien non et c’est son droit, il préfère nous présenter dans le tintamarre médiatique qui l’accompagne le second tome de ses Mémoires – c’est donc qu’il n’y aura pas de troisième tome, chic ! – dont, entre deux virées au Cap Nègre, il pourra assurer la promotion dans les stations balnéaires auprès d’aimables vacanciers. On se doute que de tels Mémoires n’ont qu’un très lointain rapport avec ceux de Madame de Staal ou de Chateaubriand, encore moins avec ceux du général De Gaulle dont pourtant, Nicolas Sarkozy n’a cessé de se réclamer durant toute sa carrière politique. Mais là n’est pas le propos. Après tout, chacun a le droit d’écrire ce qu’il veut. Mais j’en veux à Nicolas Sarkozy. Je lui en veux car avec d’autres parmi lesquels, chacun les reconnaîtra, un insupportable philosophe poudré abonné aux médias, ou encore ce politicien perdu à l’air sinistre qui avait déclaré vomir sur ses électeurs après une déculottée électorale, ou cet autre, soi-disant spécialiste des questions de défense se prenant pour le nouveau Machiavel et qui, drapeau blanc en bannière imagine rassasier l’ogre avec un sucre d’orge, tous, la main sur le coeur se prétendent gaullistes alors qu’ils ne sont que de tristes munichois, prêt à laisser le dictateur Poutine écraser le peuple ukrainien avant qu’il ne s’en prenne ensuite, n’en doutons pas, aux Polonais, aux Baltes, aux Moldaves. En attendant plus encore. Je suis gaulliste, je l’ai toujours été et j’ai aimé le général comme Romain Gary l’a aimé lui aussi. C’est pourquoi j’ai honte pour ces gens. Ils sont au gaullisme ce que chanter sous sa douche est à un opéra de Mozart. Pauvre général dont la force d’âme, les idées et la grandeur sont mortes avec lui en ce triste après-midi de novembre 1970.

  2. Dominique S dit :

    Nicolas Sarkozy aurait-il donc déjà oublié son premier contact en tant que chef d’État, avec Vladimir Poutine ? Cet épisode très humiliant et dévalorisant pour notre ancien président, aurait eu lieu en 2007, lors du G8.

    « Pour entamer ce premier face-à-face, Nicolas Sarkozy aurait choisi de « poser sur la table tous les sujets qui fâchent, franchement, virilement ». Selon Nicolas Hénin, pendant les quelques minutes que dure cette entrée en matière, Vladimir Poutine serait resté relativement impassible.

    Et puis, « il le regarde et lui demande ‘C’est bon ? T’as fini ?’ – Euh, oui… – Alors, aurait menacé le président russe, mimant d’un geste la différence de taille entre la France et la Russie, soit tu continues sur ce ton, et je t’écrase, ou alors tu changes de registre, et je peux faire de toi le roi de l’Europe. » D’après le journaliste, Vladimir Poutine aurait même ponctué ces menaces d’insultes.

    Cette version a été réfutée par un conseiller du président Sarkozy, mais Nicolas Hénin l’affirme : « C’est bel et bien parce qu’il était sonné par la violence de cet échange que Nicolas Sarkozy était dans cet état. C’était vraiment un entretien tel que pourraient l’avoir deux voyous en bas de la barre d’immeubles. »

  3. Laurent Liscia dit :

    Un scandale pur.

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