Coups d’État : une déferlante

Le président déchu Ali Bongo
(Photo AFP)

Au moment même où la victoire électorale d’Ali Bongo au Gabon était annoncée (avec 64,7 % des suffrages), des officiers annulaient le résultat des élections s’emparaient du pouvoir.

CE PUTSCH, pour autant qu’il ait de l’avenir, s’ajoute à une série alarmante de coups d’État militaires au Mali, au Burkina et au Niger. Bien qu’il relève du même malaise ressenti par des peuples mal gouvernés, il n’est pas comparable à ceux du Niger ou du Mali, qui, eux, ont renversé des régimes démocratiques. De fait, le Gabon, riche en pétrole,  peuplé de deux millions d’habitants, appartient depuis 1967 à la même dynastie. laquelle, depuis 56 ans, a été protégée par la France. Il demeure que, « libérés » par les militaires, les Gabonais ne vont pas devenir instantanément les gens les plus heureux du monde.

Une Afrique encore plus vulnérable.

Le putsch est en effet le remède universel que l’Afrique francophone a décidé de s’administrer pour des raisons diverses et contradictoires. Au Mali, au Niger et au Burkina, il s’agissait clairement  de régimes qui tentaient de protéger la démocratie. Ce n’est pas le cas au Gabon. En revanche, étant devenus une sorte de réflexe pavlovien, les coups d’Ètat militaire en série rendent encore l’Afrique plus vulnérable et annulent les progrès économiques et politiques qui y avaient été accomplis.

La présence de Wagner.

Le Gabon ne méritait ni un président élu dans des conditions suspectes ni un bouleversement politique qui obère son avenir. On a déjà constaté que la prise du pouvoir par des officiers (au Gabon, ce ne sont pas des généraux) est mûe par une sorte d’aversion pour la France à qui son passé colonial est aveuglement reproché. On ne voit pas comment les milices russes installées en Afrique pourraient apporter aux populations locales le soulagement auxquelles elles aspirent alors que les Wagner ne sont là que pour piller les ressoures naturelles du continent.

L’ambassadeur qui refuse de partir.

L’enchaînement des coups d’État militaires complique énormément la tâche de la France, qui résiste avec un certain courage puisque son ambassadeur à Niamey a refusé l’ordre de départ  que lui a adressé une junte que la France n’a pas reconnue. Dans toute l’Afrique de l’Ouest, militaires et diplomates français sont soumis à une dure épreuve. Ils restent en territoire hostile, alors que se multiplient les foyers insurrectionnels, tous imprégnés d’anti-francisme. C’est le cas du Niger où est installée une force militaire américaine de 1100 hommes, épargnée par la colère des Nigériens.

Retourner aux urnes.

Chargé d’illusions, de trahisons, de mensonges, le dossier africain suffit à lui seul à occuper une large partie de l’activité diplomatique du pays. Ce n’est pas en se donnant des présidents fantoches que les Africains obtiendront des gouvernements stables, capables de leur offrir la tranquillité et la prospérité. La manœuvre, pour la France, est à la fois périlleuse et compliquée, car les événements se succèdent à une vitesse imprévue, avec un problème supplémentaire, celui de l’absence de logique des putschs, lancés pour des raisons différentes. Cependant, la nature même du coup d’État qui, selon les putschistes eux-mêmes, ne peut être qu’une forme de transition, l’empêche de durer et vient vite le moment où il faut retourner aux urnes pour élire un gouvernement civil.

À chaud, il ne peut rien se passer : l’après-putsch, c’est toujours un silence embarrassé, sauf quand la jeunesse embrasse avec enthousiasme le changement instantané. Plus tard, les militaires devront, qu’ils le veuillent ou non, quitter la scène. Mais il sera difficile, pour les civils, de prendre les commandes d’un pays encore un peu plus affaibli par la démagogie et la vacuité politique.

RICHARD LISCIA

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