Comptez sur Borne

Mme Borne, avec M. Attal pour la rentrée scolaire
(Photo AFP)

Confirmée dans ses fonctions de Première ministre, Élisabeth Borne, ravie de n’avoir pas cédé son fauteuil à Gérald Darmanin en juillet dernier, acquiert de plus en plus d’autorité et n’hésite pas à annoncer discrètement qu’elle utilisera l’article 49/3 de la Constitution pour que l’Assemblée adopte le budget 2023-24.

C’EST Emmanuel Macron qui a pensé à la remplacer par M. Darmanin, c’est le même Macron qui a renoncé au changement de Premier ministre au début de l’été, donnant, involontairement ou non, à Mme Borne, l’envergure à laquelle elle aspirait. Au passage, l’ambition personnelle de Darmanin est apparue aux yeux du grand public, médusé par sa chutzpah et pas forcément convaincu par ses méthodes.

Se méfier de l’eau qui dort.

Pas besoin d’être un politologue pour comprendre qu’Édouard Philippe, actuel maire du Havre et  ancien Premier ministre de Macron, incarne l’avenir de la macronie. Ce qui place les autres prétendants, Bruno Le Maire par exemple, dans la position des sacrifiés. De ce point de vue, Mme Borne représente le nec plus ultra du Premier ministre d’une longue transition (jusqu’à la fin du second mandat de Macron). Encore qu’il faille se méfier de l’eau qui dort : qui sait si la cheffe du gouvernement, qui a, on l’a compris, des caps difficiles à franchir, ne va pas s’enivrer de ses éventuels succès et se demander, si elle fait bien le job,  qu’elle a le droit de transformer l’essai ?

Une féministe.

Pour le moment, elle savoure ce moment où sa discrétion et sa modestie de façade ont été fort bien rémunérées par le chef de l’État, quitte, dans quelque jours, à retourner dans la fournaise parlementaire. Elle est portée en tout cas par son aversion pour les conseils gratuits, surtout ceux qui proposent de gommer sa féminité pour ressembler davantage à un homme. C’est de ce bois-là qu’est faite sa solitude. Les féministes sont le plus souvent à gauche et votent contre la macronie, laquelle n’a pas perdu les rélexes machistes et demeurent obsédés par une femme qui refuse de se « viriliser ».

Élucubrations.

Ces considérations ne changent rien au tableau de la vie politique tel qu’il ressort de la majorité reative, de l’usage du 49/3 (crime ou acte légitime ?) et des dossiers lourds, par exemple le réchauffement de la planète qui exige une action libérée de toute réflexion politicienne. On rappelle souvent que Mme Borne vient de la gauche (elle a dirigé le cabinet de Ségolène Royal), mais l’épreuve à laquelle la Première ministre est confrontée n’a rien à voir avec son passé professionnel. Gauche, droite, homme, femme, toutes ces élucubrations n’ont rien à voir avec une réalité dure, dense, tentaculaire. Dans ses rares moments de pause, et quand elle consent à se confier, elle laisse entendre combien elle souhaiterait que le pouvoir qu’elle a entre les mains et qui est si lourd serait plus agréable à porter s’il était nuancé d’un peu d’humanisme.

Le rempart vaillant du président.

Les oppositions balaieront d’une chiquenaude cette aspiration à la douceur. Ils vont être entraînés dans une bataille qu’ensanglantera le 49/3. Elle est le rempart cabossé mais vaillant qui protège le président de la République. Elle fournit la liste interminable des mesures votées au delà des batailles homériques du Parlement. Les oppositions cachent leur jeu, elles vocifèrent pour garder leurs électeurs, pas parce qu’elles croient ce qu’elles disent. Mme Borne, elle, parle peu mais agit. Encore heureux.

RICHARD LISCIA

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