Il y a 60 ans, Kennedy…

Jackie et son mari à leur arrivée à Dallas le 22 novembre 1963
(Photo AFP)

Le lecteur sait que je commente rarement les anniversaires qui, en général, n’apportent rien de neuf sinon, peut-être, une leçon d’histoire. Le cas de Kennedy a ceci de particulier qu’il reste d’actualité dans un monde d’une violence inouïe.

JOHN F. KENNEDY a emballé toute une génération de jeunes qui voyaient en lui un symbole de renouveau. Il n’en a pas moins été un politicien classique et il s’est battu contre ses adversaires avec férocité. Élu avec seulement 100 000 voix d’avance sur Richard Nixon, il n’a vraiment acquis se légitimité que lorsqu’il a empêché Khrouchtchev d’acheminer des missiles nucléaires à Cuba en 1962.Le 22 novembre 1963, Kennedy s’est rendu à Dallas (Texas) pour préparer sa campagne électorale en vue d’un second mandat. La mort l’y attendait.

Le rôle de Johnson.

On ne saurait évoquer Kennedy sans parler de Lyndon Johnson, son vice-président, qui a prêté serment dans l’avion qui ramenait la dépouille de Kennedy à Washington. Johnson, loin d’avoir la popularité de son patron, a tout de même appliqué à la lettre son programme, notamment sur le plan des inégalités, favorisant l’accès de millions de Noirs à la fonction publique et dans l’éducation, notamment au moyen du busing, méthode qui consistait à transporter les élèves noirs vers les écoles réservées aux Blancs. Cela ne s’est pas fait sans mal. Les Wasps (White Anglo-Saxon Protestants) se sont rués vers les écoles privées, mais, depuis, la mixité est devenue la normale. Le racisme n’est pas mort. En revanche, les instruments mis à la disposition des Noirs sont nombreux et efficaces, pour peu qu’ils ne tombent pas dans la délinquance.

Image d’Épinal.

Kennedy fut à son zénith quand il lança son ultimatum à Khrouchtchev : pas d’ogives nucléaires à Cuba, l’Amérique était prête à une guerre atomique à propos d’un épisode complètement fabriqué par les Russes. C’est à ce moment là que l’Occident fut rassuré et que Kennedy endossa son costume de héros. L’opinion mondiale commença à l’oublier quand on apprit, après sa mort, qu’il était malade, suite à une blessure de guerre et qu’il avait une affection aux glandes surrénales. Surtout, les révélations sur ses exploits d’alcôve ont mis un terme au souvenir émerveillé d’un président jeune, beau et riche qui avait épousé une dame très distinguée  qui lui donna deux beaux enfants. L’image d’Épinal est depuis longtemps jaunie et oubliée, à part peut-être le souvenir du petit John-John qui fit le salut militaire (à quatre ans) devant la dépouille de son père.

Et Joe Biden ?

Ce qu’on a appris sur Kennedy après sa mort, on l’apprend aujourd’hui sur les présidents en exercice. Le privilège de manipuler la communication a disparu : les présidents doivent rendre des comptes pendant l’exercice de leur mandat. En somme, Kennedy ne mérite ni un excès d’outrages ni un excès de louanges. Il avait une idée très solide de l’ordre mondial mais il appartenait à une période où le silence était roi. Il n’a pas été le meilleur président depuis Roosevelt, pas plus que Barack Obama, encensé et réélu, mais qui laisse aussi un souvenir mitigé, celui d’un président qui ne savait pas prendre ses responsabilités. Il est à la fois curieux et logique qu’un président soit très populaire pendant son mandat mais qu’il soit discuté quand il a quitté ses fonctions. Vous aurez sûrement remarqué que Biden est contesté, moqué, et récusé. Quand il sera parti, qu’il soit réélu ou non, on s’en souviendra comme le meilleur président des États-Unis depuis 1945.

RICHARD LISCIA

 

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Une réponse à Il y a 60 ans, Kennedy…

  1. Jean Vilanova dit :

    Avec la crise des missiles en octobre 1962, le monde a vraiment frôlé l’apocalypse nucléaire et l’on doit à John Kennedy, son frère Robert ainsi qu’à quelques autres de leurs proches dont l’ambassadeur Llewellyn Thompson d’être parvenus à désamorcer la crise avec la Russie. Ces gens-là avaient un flair politique qui pouvait confiner au génie. Pour preuve ce détail de très haute importance. Au plus fort de la crise, Khroutchev adressa deux lettres à la Maison Blanche les 26 et 27 octobre. Dans la première, le chef soviétique faisait preuve de compassion et de sa peine devant le désastre possible à venir. Tout au contraire, le ton de la seconde était extrêmement menaçant. John Kennedy, conseillé par son frère feignit d’ignorer la seconde et ne répondit qu’à la première, sur un ton identique à celle-ci ; la porte ouverte vers un début de détente. Détente qui se produisit enfin lorsque, en échange du démantèlement de leurs bases de missiles, les Soviétiques obtinrent l’assurance que les Etats-Unis n’envahiraient pas Cuba et retireraient – sous le sceau du secret – leurs ogives nucléaires installées en Turquie. Homme certes à la moralité douteuse (mais nous en connûmes aussi sous nos latitudes, et des présidents de bien moindre envergure) nous sommes tous redevables envers Kennedy. Témoignons-lui également notre gratitude en ce qui concerne les avancées qu’il conduisit dans un autre domaine : les droits civiques. Enfin sur la période récente, puisque vous l’abordez M. Liscia, j’en veux beaucoup à Barack Obama qui ne fut qu’une icône falote, symbole du pire de ce que la politique nous propose aujourd’hui : de la com, c’est-à-dire du vide. Du vide vers le pire. En effet, Obama n’ajouta-t-il pas au chaos engendré au Moyen-Orient par les Bush, père et fils par le reniement de sa parole à propos de la Syrie ? Oui, il le fit en renonçant à intervenir alors qu’Assad massacrait une partie de son peuple à coups d’armes chimiques. Et face à une telle lâcheté, quel plus revigorant message envoyé à Poutine tout à ses fantasmes de conquêtes et de grande Russie ! On en voit le résultat aujourd’hui. Il paraît que cet homme en caoutchouc s’est reconverti dans la production cinématographique. Que ne l’a-t-il fait plus tôt, pour le bonheur des Ukrainiens et de tant d’autres avec eux !

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