Le piège du cessez-le-feu

Otages israéliens libérés hier soir
(Photo AFP)

La trêve à Gaza a été prolongée et, de toutes parts, fusent des appels à de nouvelles prolongations. Israël doit  donc résoudre un dilemme : soit il reprend les combats, soit il les arrête sine die.

DEPUIS le déclenchement du conflit, le 7 octobre dernier, la tentation est grande, pour le gouvernement israélien, d’obtenir du Hamas le plus grand nombre de libérations, sinon toutes. La rançon, c’est la capacité offerte au Hamas de reconstruire ses forces dans la perspective d’une nouvelle guerre. La pression en faveur d’un cessez-le-feu ne vient pas seulement de l’allié américain, elle vient aussi des familles des victimes.

Maltraitance.

Les otages n’ont pas été bien traités par leurs geôliers. Ils ont été soumis, notamment les enfants, à une torture psychique, mal nourris, contraints de voir les horribles video de l’enlèvement massif, considérés avec mépris. La libération des hommes, puis des soldats, prendra des semaines de trêve, car d’autres factions palestiniennes en détiennent. Plus on s’informe sur ce qui s’est passé depuis le 7 octobre, plus on constate que les otages ont vécu un enfer, notamment les enfants, terrorisés, perdus et pour lesquels la détention n’a pas duré quelques semaines mais plus d’un an.

Deux tâches contradictoires.

Le gouvernement a promis non seulement de libérer les quelque 240 otages, mais de détruire le Hamas. Pour le moment, les deux tâches sont contradictoires. Poursuivre la libération, c’est renforcer le Hamas. Y mettre un terme, c’est trahir la promesse faite aux familles. Joe Biden, Emmanuel Macron, les pays arabo-musulmans sont unanimes à réclamer un processus qui, dans leur conception, doit aboutir à un accord de paix. Ils se situent sur un plan plus politique qu’humanitaire, la compassion pour les civils palestiniens, qui, pourtant, n’ont pas manqué de frapper les otages à mesure qu’ils arrivaient à Gaza, avec une perspective de règlement global.

Le Hamas gagnerait des élections.

Cela pourrait s’appeler mettre la charrue devant les bœufs. Israël a déjà payé un prix très lourd avec les exactions indescriptibles du Hamas et du Djihad islamique. Il ne peut ni oublier les otages ni renoncer à terminer sa riposte. Il en est ainsi pour une raison simple : tout se sait dans l’État juif et les dirigeants ne peuvent agir que dans un totale transparence. Du point de vue des hommes de bonne volonté, la perspective se limite à la création d’un État palestinien, avec Jérusalem-Est comme capitale. Les mêmes croient qu’il est possible de ranimer Mahmoud Abbas, de tenir des élections et de créer un État. Malheureusement, c’est le Hamas qui est le plus populaire et qui emporterait des élections.

Biden embarrassé.

L’alternative est de continuer à bombarder des victimes innocentes, ce qui ruine l’image d’Israël dans le monde. On notera d’ailleurs que les chiffres du nombre de victimes palestiniennes gonflés par le Hamas ne sont désormais plus sourcés et sont présentés comme une réalité indiscutable. Mais, même si en vérité le nombre des victimes est moitié moindre, c’est trop et ce sera toujours trop. Ce qui explique la réaction de Biden, contraint de présenter, à un an des élections présidentielles, un programme de gauche.  On revient sur la présence de Netanyahu au pouvoir, mais il n’existe aucune friction au sein du gouvernement israélien sur la question du cessez-le-feu. Même l’opposition israélienne n’y est pas favorable.

Plat périmé.

Il s’agit, de fait, d’une question de timing. Même une paix fragile ne saurait être conclue pendant une guerre. Simplement, en durant plusieurs semaines, le processus de libération peut conduire à un apaisement qui serait alors présenté comme un cheminement amorcé vers la paix et la création d’un État palestinien au côté d’Israël. La vengeance est un plat qui se mange froid sauf si, avec le temps, le mets n’est plus comestible.

RICHARD LISCIA

 

 

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