Pléthore de candidats

David Lisnard, maire de Cannes
(Photo AFP)

On se trompe si on pense que le joyau le plus convoité de la République, la présidence, aurait perdu de son attrait à cause des difficultés à gérer le pays. Il y aura, en 2027, plus de candidats que jamais.

IL Y A CEUX dont on est sûr qu’ils se présenteront et ceux qui, sans trop exposer leur intention, s’organisent déjà pour la mêlée. Tous pensent probablement qu’il n’est pas difficile de faire mieux qu’Emmanuel Macron qu’ils n’ont épargné ni à droite ni à gauche. Peu semblent avoir compris que le président en exercice est davantage l’héritier d’une République âgée aujourd’hui de 65 ans ans, que le réformateur qui bouscule le peuple.

Longue liste à droite.

À droite, on compte Édouard Philippe, Bruno Le Maire, Gabriel Attal, David Lisnard, Xavier Bertrand, mais la liste n’est pas close et risque de grossir. Au centre, François Bayrou réfléchit au moyen d’oublier l’affaire des emplois fictifs avant de se déclarer. À l’extrême droite, ce sera Marine Pen, dont la cote est la plus élevée, après celle d’Édouard Philippe. Mais qui sait, Jordan Bardella est si élégant et sûr de lui qu’il peut être tenté de tuer la mère. À gauche, Bernard Cazeneuve, ancien Premier ministre de François Hollande, lequel ne s’est pas encore convaincu de se présenter, frustré qu’il est de ne pas avoir accompli de second mandat, comme la loi l’y autorise. Et puis qui ? On ne voit pas un homme ou une femme de sang neuf.

Le précédent Hidalgo.

Les écologistes ne seront pas absents de la compétition. Ils ne pourront pas se passer d’une élection primaire, source de tous les avatars. Ils sont déjà trop nombreux à se considérer comme de légitimes candidats. Et il faudrait une primaire pour les Républicains, mais l’expérience a montré, avec la défaite lourde de Valérie Pécresse en 2022, que les partisans de LR ne choisissent pas le bon cheval, pas plus que les socialistes d’ailleurs, qui se sont offert une bérézina avec Anne Hidalgo, immarcescible maire de Paris qui a envoyé le PS au fond de l’abîme.

Les chances de Philippe.

Les macronistes, eux, ont une voie toute tracée. Leur homme-lige, c’est forcément Édouard Philippe qui, certes, n’appartient qu’à lui-même (il a assez montré son indépendance) mais qui, au-delà des quelques critiques qu’il a adressées au président, garde un vieux fond de macronisme. Ce sera de toute façon le candidat des passerelles, vers LR, et vers les écolos. Il possède la stature du consensus. Sa cote est supérieure, pour le moment, à celle de Marine Le Pen, toujours soupçonnée d’avoir pour Poutine les yeux de Chimène. Comme Jean-Luc Mélenchon, qui se demande encore s’il sera candidat pour la quatrième fois ou s’il est préférable de donner le relais à François Ruffin. Mélenchon et Marine Le Pen sont deux modèles de patience qui ont blanchi le harnais dans des campagnes électorales où ils ont fait bonne figure (on l’a vu avec consternation), en talonnant leur concurrent.

Le mystère du succès.

Il nous faut un homme ou une femme qui sache boucler un dossier sans le laisser pourrir dans la polémique parlementaire ou publique. Il faut agir plus et parler moins. Il y aura des obstacles à franchir, il faut niveler le terrain. Cependant, la façon d’être élu président est importante. La fameuse « rencontre entre un homme et le peuple »  n’est pas fréquente. Dans l’analyse de la conjoncture, dans les sondages, dans les commentaires, n’apparaissent pas ce qui fait la fibre présidentielle, à savoir le rendez-vous populaire. C’est un tel qui est choisi. On trouvera mille raisons pour ce choix, mais peut-être pas la bonne.

RICHARD LISCIA

 

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L’isolement de l’Arménie

Erdogan et Ilham Aliev
(Photo AFP)

Le Haut Karabakh a été phagocyté en un éclair par l’armée azerbaïdjanaise, grâce au soutien des Turcs et à l’indifférence de Poutine. Le schéma urkrainien vient de se reproduire : on change les frontières, ce qui est interdit en droit international.

ON SAIT ce que représentent les souffrances des Arméniens, dont les moyens militairess sont de loin inférieurs à ceux de l’Azerbaïdjan. Erdogan s’efforce de reconstruire à sa manière l’empire ottoman au mépris du droit et en s’appuyant sur le régime fantoche d’Ilham Aliev. On parle énormément de la « lassitude » des Occidentaux à l’égard de la longue guerre d’Ukraine et l’offensive des Azeris peut les conduire en territoire arménien. S’il fallait un événement capable de déclencher un sursaut occidental, le voilà tout trouvé. Car le destin funeste de l’Arménie, déjà victime du génocide ottoman au siècle dernier, est le signe avant-coureur d’une nouvelle conquête russe de la Moldavie et des États baltes.

Poutine n’est pas seul.

Depuis 2014 et la reprise de la Crimée sans coup férir par la Russie, c’est toute l’Europe qui peut trembler. Les régimes pro-russes comme celui de Viktor Orban en Hongrie prennent le risque de dîner avec le diable sans avoir pris la précaution de se munir d’une longue cuillère. Non, Poutine n’est pas seul. Il bénéficie du soutien du Brésil et de celui de l’Inde et ainsi se reconstruit un nouveau tiers-monde dont les attitudes cyniques permettent au Kremlin  de faire ce qu’il veut. Certes la fameuse « lassitude » n’est pas aussi prononcée qu’on le dit. Et le terrible revers de l’Arménie a nourri de nouveaux engagements en faveur  du droit international.

Solides Américains.

Mais cela fait des années que les Nations unies sont devenues une coquille vide, à cause du veto russe et chinois. Quitte à me répéter, je rappelle que Poutine ne comprend que le langage de la force et que, quelles que soient les pertubations diplomatiques liées aux élections américaines en novembre 2024, l’aide militaire à Kiev n’est pas remise en question. On peut toujours jouer à se faire peur en imaginant un Donald Trump élu mais en prison, les élus républicains au Congrès  ne sont pas hostiles à l’aide à l’Ukraine sous toutes ses formes, humanitaire, civile et militaire.

Notre chance : l’Ukraine.

Un coup d’arrêt doit être donné aux menées de Poutine et d’Erdogan, vieux complices aux objectifs différents mais complémentaires. Nous ne pouvons pas aller combattre sur place, mais nous comptons, comme d’habitude, sur le sacrifice des Ukrainiens. Ils s’inscrivent dans la reconquête lente de leur territoire et le pire consiste à dire qu’ils sont à bout de souffle, alors que, en réalité, ils sont la meilleure chance de l’Union européenne de garder son intégrité.

La vengeance d’Erdogan.

Erdogan déteste les Européens parce qu’ils n’ont pas souhaité l’accueillir dans leur cénacle ; Poutine hait l’Union parce qu’elle fait de l’ombre à la Russie. On imagine ce qu’aurait pu être la vie sur notre continuent si Moscou abritait un pouvoir démocratique, un leader libre des passions les plus négatives et prêt à consacrer son énergie au développement de son pays au lieu d’envoyer tous azimuts des troupes menaçantes composées de soudards.

Un appel désespéré.

Poutine fait grand cas de la « lassitude » des Occidentaux, qu’il voit bien plus profonde qu’elle ne l’est en réalité. Il a déjà perdu la guerre qui laissera la Russie exsangue. Rien en Russie ne sera comme avant et les jours du maître du Kremlin sont comptés, malgré tous ses efforts pour garder son emprise sur les moyens de décision. Je ne suis pas trop optimiste. Il y a plus de lassitude en Russie qu’ailleurs, les régimes autoritaires sont durs et cruels, mais fragiles ; le rappel incesant que la Russie est une puissance nucléaire n’est que l’appel désespéré d’un régime aux abois qui songe vaguement à détruire un continent pour conserver le pouvoir.

RICHARD LISCIA

 

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49/3 : la routine

Attal candidat ?
(Photo AFP)

Le gouvernement vient d’utiliser l’article 49/3 de la Constitution pour faire adopter la loi de finances. C’est la dix-huitième fois depuis le début du second mandat d’Emmanuel Macron qu’il recourt à cette méthode.

LE TITRE de cette chronique peut passer pour provocateur, mais il reflète un constat : les oppositions dénoncent l’usage d’un article constitutionnel pour une seule raison, parce que c’est le pouvoir qui s’y résigne. Mais une fois au pouvoir, les mêmes imiteraient le gouvernement actuel. Le 49/3 n’est pas une monstruosité inscrite par un juriste  fou dans la loi fondamentale. C’est une nécessité quand les circonstances l’exigent, par exemple une majorité relative. La priorité budgétaire est plus grande que des discussions interminables pour convaincre une poignée de parlementaires. Il faut bien que la France ait un budget.

Les Républicains ne sont pas fous.

La macronie compte plus d’adversaires que d’amis, mais ceux-ci, à leur tour, sont incapables de former une majorité absolue. La motion de censure déposée par la gauche a été balayée par un vote hostile. Autrement dit : l’opposition veut bien s’opposer mais elle ne veut pas déstabiliser le pouvoir. Si les élus  LR, emmenés par l’implacable Olivier Marleix, disent pis que pendre de M. Macron, leur hostilité ne va pas jusqu’à commettre uen faute qu’ils ne sauraient pas expliquer aux électeurs.

Le retour de Wauquiez.

Laurent Wauquiez le sait, qui a fait sa rentrée politique en parlant le moins possible. Car il se méfie de lui-même. Il a eu déjà l’occasion de critiquer sévèrement la gestion de Nicolas Sarkozy devant les étudiants d’une école de commerce, il s’en mord encore les doigts. Wauquiez ne sait pas vraiment s’il sera candidat à la présidence. Ses amis LR l’attendent impatiemment, croyant déceler en lui l’étoffe présidentielle, mais, pour le moment, les sondages sont peu convaincants. Une récente étude donne Édouard Philippe en tête, suivi par Marine Le Pen et… Gabriel Attal, ministre actuel de l’Éducation, 34 ans, l’homme qui monte en quelque sorte. Attal est un bébé Macron et tout, chez lui, rappelle le président. Encore cinq ans de macronie ?

Faire barrage au RN.

Le président de la République doit veiller à ce que le nombre élevé de candidats plus ou moins macronistes ne nuise pas à son camp. On ne peut pas choisir entre Philippe et Attal. Un seul candidat peut succéder à Macron et le mieux placé pour le moment est le maire du Havre (et ancien Premier ministre). Motion de censure à la poubelle, ascension de Gabriel Attal, résistance admirable d’Élisabeth Borne, activisme ahurissant de Macron, les macronistes couverts de plaies et de bosses n’en sont pas moins la grande formation qui fera barrage au Rassemblement national.

Charybde et Scylla.

Sûr et certain, ce gouvernement n’est pas idéal, a commis beaucoup d’erreurs, et ne parvient pas à élargir sa majorité. Mais la macronie possède des hommes et des femmes qui, contrairement à l’opinion publique, connaissent bien leur sujet. On peut toujours critiquer un camp et on ne s’en prive pas. Mais on ne doit pas le critiquer jusqu’à le remplacer par une force nuisible pour le pays. Les médias bombardent le pouvoir tous les jours. Ce faisant, ils hâtent l’arrivée de Marine Le Pen à l’Élysée. Ou bien préfèrent-ils Jean-Luc Mélenchon ?

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L’Ukraine trahie ?

Poutine ne comprend que le rapport de forces
(Photo AFP)

« Le Monde » d’hier a publié une tribune signé par nombre de personnalités qui s’inquiètent de la distance que divers commentateurs tentent de mettre entre la guerre en Ukraine et l’Occident. Ce signal d’alarme indique une dérive inacceptable.

CERTES, la guerre est longue ; certes, les combattants ukrainiens ne voient pas le bout du tunnel ; certes, les perspectives électorales dans chacun des pays européens et aux États-Unis n’inspirent pas la fermeté de l’analyse. On n’en est pas moins stupéfait d’assister à une évolution des mentalités, passées en quelques mois de l’adhésion enthousiaste aux choix de Volodymyr Zelenski au paternalisme qui réduirait sa résistance ou l’enverrait à des négociations prématurées.

Le risque américain.

Les États-Unis craignent principalement qu’une victoire (encore possible) de l’Ukraine jette le chaos en Russie, avec l’apparition d’un nouveau dictateur encore moins raisonnable que Poutine. Un débat entre élus américains montre que les Républicains, surtout les trumpistes, sont farouchement isolationnistes. Un sondage récent indique que l’adhésion à l’Ukraine, à 65 % il  y a quelques mois, est tombée à 57 %. En outre, Joe Biden n’est pas assuré de gagner les élections de novembre 2024. Sa défaite laisserait la place à Donald Trump, que Vladimir Poutine sait manipuler, et serait accompagnée par un arrêt complet du soutien américain à Kiev.

Il n’y a qu’une façon de traiter Poutine.

Nicolas Sarkozy, de son côté, est l’ex-président qui a réclamé, dans un entretien retentissant, des négociations immédiates assorties de concessions territoriales de l’Ukraine. Un camp, en France, commence à se former, qui a des vues négatives sur l’aide inconditionnelle à l’Ukraine. Il est donc temps de rappeler quelques principes : Poutine ne connaît que le rapport de forces et il ne négociera que s’il est acculé ; les Ukrainiens, ces derniers mois, ne sont pas restés inertes, ne soufrent que du manque de munitions, de chars et d’avions et c’est le moment d’augmenter l’aide occidentale, pas de la réduire. à noter, à ce sujet, la décision de la France de faore payer à l’Ukraine les matériels français qu’elle souhaiterait obtenir.

Oublier les menaces.

Les menaces de Poutine sont nulles et non avenues. Il peut bien brandir la menace nucléaire, mais il n’est pas fou : il sait que, si la première de ses ogives nucléaires montrait le bout de son nez, tout l’est de la Russie serait aussitôt vitrifié. Ses ultimatums sur les fameuses « lignes rouges » n’ont aucun sens. Il est le premier à franchir ces lignes, tandis que la stratégie ukrainienne consiste à concentrer la guerre sur la Crimée et à porter le fer en Russie même pour que les Russes comprennent enfin ce qu’ils sont en train de faire, à savoir la guerre la plus sauvage et la plus indigne depuis 1945.

Une aide indispensable.

Les Ukrainiens ne nous demandent pas de mourir à leur place. Ils nous demandent des armes, des munitions et de l’argent. L’aide que nous leur apportons nous paraît pesante, mais elle est indispensable si nous ne voulons pas que l’armée russe entre en Pologne et conquiert les États baltes. Négocier aujourd’hui avec Poutine, c’est lui faire un cadeau inespéré. En réalité, notre « lassitude » résulte de nos erreurs d’analyse. Une accélération des livraisons d’armes de haute technologie garantirait la victoire de Zelensky et donc du camp occidental. Encore une fois, il ne faut pas se laisser impressionner par les menaces des Russes. Ils tempêtent, mais s’en tiennent à une guerre conventionnelle.

Notre cause.

Le débat est dans nos têtes. C’est une affaire de conscience. Abandonner l’Ukraine à son sort, c’est commettre un crime dont nous deviendrons, tôt ou tard, les victimes. Nous avons besoin d’elle autant qu’elle a besoin de nous. Et nous sommes informés par l’histoire: nous ne pouvons courir le risque d’avoir à la fois la guerre et l’indignité. Nous avons affaire à un peuple ingénieux, courageux, impavide qui a relevé un défi historique. La cause des Ukrainiens est la nôtre. La quantité de poison que Poutine peut déverser sur l’Occident, sa conviction que nous sommes l’ennemi, sa nostalgie de l’URSS, tout montre qu’il est difficile de faire pire que lui. Sa mort physique ou politique ne serait pas une catastrophe.

RICHARD LISCIA

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Une dette accablante

Bruno Le Maire ne décolère pas
(Photo AFP)

La dette nationale s’élève à 3 013 milliards d’euros et le gouvernement va emprunter l’an prochain 285 milliards d’euros sur les marchés financiers. Le projet de loi de finances sera adopté au moyen de l’article 49/3 de la Constitution.

LE MINISTRE de l’Économie, Bruno Le Maire, n’a pas caché son désarroi. Les déficits sont à ses yeux un crève-cœur. Il préfèrerait utiliser cet argent pour réduire les inégalités sociales. On s’est moqué de lui et on lui a suggéré de faire ce qu’il dit. C’est une raillerie facile : quel parti au pouvoir pourrait effacer d’un trait de plume le recours à l’emprunt ? Il y a une sorte de fatalité de la dette (ce n’est pas d’aujourd’hui que la France emprunte) et le budget n’a pas été mis à l’équilibre depuis une cinquantaine d’années. Nous vivons au-dessus de nos moyens. Ceux qui critiquent la dépense publique sont aussi ceux qui demandent plus de dépenses pour se porter au secours des plus faibles.

Motion de censure.

Le pire, c’est que les partis d’opposition se contentent de dénoncer les acrobaties gouvernementales sans proposer les solutions médianes qui répartiraient mieux les dépenses tout en les diminuant. Il y a des lustres que la France dépense sans compter, des lustres que le niveau de vie moyen s’en trouve amélioré, et nous voici arrivés au point où notre dette équivaut à une année de production. Une chose est sûre : ce n’est pas l’agitation à l’Assemblée, ni le dépôt d’une ou deux motions de censure qui résoudront le problème.

Il nous faut bien un budget. 

Car tout est politique. On a fait au 49/3 une telle réputation que la Première ministre doit livrer, une fois de plus, une bataille homérique au Parlement. Comme si la France pouvait se passer de budget. Il est indispensable, même si le projet de loi est considéré comme « insincère » par la Cour des comptes. Ce n’est donc pas du côté des partis que le pouvoir peut trouver des gens raisonnables. Tous pensent que l’exécutif va mal et que les occasions de le démanteler se multiplient.

L’idée de la sédition.

Une crise de régime ? Et pourquoi pas ? pensent-ils. Dans tous les esprits traîne une idée, celle de la sédition, pour ne pas dire révolution, l’occasion d’écarter Macron du pouvoir et de reprendre les choses en main à la faveur d’élections générales et même, dans le cas de la France insoumise, d’une dissolution de l’Assemblée et de la réunion d’une assemblée constituante chargée d’enterrer la Cinquième République. Voilà Jean-Luc Mélenchon, jamais affaibli par ses observations scandaleuses et ses insultes qui voit midi à sa porte. LR, conforté par les élections sénatoriales, poursuit sa politique du « niet », refuse de coopérer avec le gouvernement en place, se situe au bord de l’abîme avec la meilleure conscience qui soit.

Nous n’avons pas le choix.

L’irresponsabilité financière a trouvé son prolongement normal, l’irresponsabilité politique. Un brusque changement de régime et tout sera à reconstruire ; et ce sont les démolisseurs qui prétendent nous donner un avenir. En réalité, nous n’avons pas le choix, nous devons passer le cap en limitant les dégâts et nous devons attendre la fin du mandat de Macron. Après tout, son projet de budget  prévoit une lente stabilisation et un retour aux critères de Maastricht d’ici à 2027. Nous ne sommes pas les plus mal lotis en Europe, est-il nécessaire de le rappeler ? L’Allemagne a plus de problèmes que nous et, dans une certaine mesure, l’Italie aussi. Nous avons vécu tout ce temps au-dessus de nos moyens. Ne soyons pas surpris si en définitive nous avons un peu plus d’impôts à payer.

Le président jure que nous serons épargnés. Ce qu’il ne dit pas, c’est que nous paierons les factures, nous paierons une contribution plus élevée à l’assurance maladie, nous paierons des péages autoroutiers plus chers. Quarante ans de dépenses et voici qu’arrive le moment d’expier les fautes historiques de la collectivité. Pas besoin de nous expliquer que le « quoi qu’il en coûte » n’est plus le langage du pouvoir.

RICHARD LISCIA

 

 

 

 

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Guerre au harcèlement

Gabriel Attal : du pain sur la planche
(Photo AFP)

Dans la totalité des écoles et lycées, les cas de harcèlement atteignent 10% des élèves, agresseurs et agressés confondus. Le gouvernement lance aujourd’hui son plan pour remédier à ce fléau. Il sera fondé sur l’éducation des écoliers ou lycéens, la formation des enseignants et le soutien des parents d’élèves.

IL FAUT s’y prendre très tôt pour corriger les comportements agressifs ou les choix d’un bouc émissaire. Dès la maternelle. Ce dont il est question, ce n’est pas l’ordre qui doit régner dans les classes, c’est l’avenir de ces enfants soumis à la brutalité de leurs congénères. Le plan réussira s’il s’inspire de l’éducation civique et morale qui n’est pas autre chose qu’un exercice de prévention des bousculades, coups et brimades infligés aux victimes.

Tout dépend des parents.

Il s’agit d’une tâche de longue haleine dont la complexité ne doit pas décourager le réformateur. La vie dans la cité est l’alpha et l’oméga de la société où nous souhaitons vivre. Aux inégalités sociales habituelles s’ajoutent des comportements susceptibles de détruire un avenir. La réussite du plan dépendra des parents : ceux dont l’enfant est brimé doivent s’en rendre compte très vite et prendre sa défense face aux enseignants ; ceux dont la progéniture dérive vers la violence doivent apprendre à ne pas la défendre à tout prix. Ce n’est pas un concours de vertu. C’est un désordre grave qui peut être authentifié et combattu par des méthodes douces, pour peu qu’on s’en donne la peine. Le harcèlement ne sera éliminé que par un immense effort de persuasion.

Un effort collectif.

La France s’inspire des Pays-Bas, où la lutte contre le harcèlement est devenue un système qui fonctionne fort bien et produit des résultats convaincants. Il s’agit donc de laisser au vestiaire la sensibilité des parents et l’indifférence ou la paresse des professeurs. Il s’agit d’un effort collectif, national, sans lequel le harcèlement scolaire ne cessera de réapparaître à l’occasion des récréations. Le présent commande l’avenir : des enfants amenés à résipiscence seront un jour des patrons ou des employés désireux de ne maltraiter personne ; la vie de l’entreprise est donc directement concernée par l’enseignement de la compassion aux petits et même aux tout-petits.

C’est politique, comme le reste.

On souhaite bien du courage à nos dirigeants, condamnés à faire de la pédagogie aux pédagogues.  Il y a, dans cette affaire, des éléments qui relèvent de la société idéale où la plupart de nos concitoyens souhaitent vivre, en accord avec la nature et avec la garantie que la sécurité de tout enfant est assurée par un  réseau de vertus, instinctives ou apprises. Nous ne sommes pas, ici, dans une bande dessinée pour les sept-huit ans. Il y aura des échecs, des dérives, des insuffisances de résultats. Ce qui ne signifie pas non plus qu’il faille rester les bras ballants. Il ne fait pas de doute que la classe politique doit montrer l’exemple. Elle en est loin. Les slogans barbares du genre « la police tue » n’invitent les enfants ou adolescents ni à la prudence ni à la raison.

RICHARD LISCIA

 

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L’écologie selon Macron

Macron dimanche
(Photo AFP)

Les annonces du président de la République relatives au plan écologique qu’il entend appliquer au pays ont recouvert d’autres informations sur la crise nigérienne et les difficultés budgétaires  et le projet de loi de finances pour la sécurité sociale. 

EMMANUEL MACRON envoie à ses concitoyens un message qui rappelle qu’il gouvernera jusqu’au dernier jour de son second mandat présidentiel. On le voit sur tous les fronts, lui qui a annoncé le retour de l’ambassadeur au Niger et le retrait des troupes françaises de ce pays, qui condamne le sort fait aux arméniens par l’Azerbaïdjan, qui soutient la progression des forces ukrainiennes vers la Crimée. C’est un stakhanoviste de la diplomatie et de l’économie. On exprime ici et là son scepticisme sur la faisabilité de ses mesures, on souligne la défaite humiliante au Niger, mais son plan pour réduire les effets des gaz à effet de serre a été reçu avec toute l’attention qu’il mérite.

Faire plus vite.

Le président veut parvenir à une réduction de 55 % en France des gaz à effet de serre entre 1990 et 2030 ; et il veut le « faire plus vite « ; il veut reprendre le contrôle des prix de l’électricité et ne jure plus que par la pompe à chaleur, qui nécessite de gros investissements. On ne sait pas encore qui financera des travaux aussi importants ni si les Français vont consentir allègrement un effort financier auquel ils ne sont guère préparés. On ne peut pas nier néanmoins la détermination du chef de l’État qui est plutôt communicative.

De la pure politique.

Cependant, les mesures annoncées par le président correspondent à un virage en épingle à cheveux qui place la France en tête des pays décidés à réduire les gaz à effet de serre. Ce n’est pas uniquement de la communication. C’est un effort en profondeur pour que la société française change de mentalité de manière irréversible. Les mesures relèvent de la politique bien plus que de l’économie.  Nous n’avons pas le choix : ou bien nous les adoptons, ou bien nous brûlerons en enfer. Et même si d’autres pays, plus grands et plus peuplés, ne nous suivent pas dans cette aventure, au moins aurons-nous donné un exemple salutaire.

Un marathon.

Comment l’État parviendra-t-il à concilier l’austérité budgétaire avec des décisions coûteuses, c’est une autre affaire. « Aller deux fois plus vite » dans le nettoyage de la planète, c’est prendre la tête d’un marathon long et épuisant. M. Macron ne surprend personne : il est dans la droite ligne de ses ambitions qui l’ont souvent conduit à engager des plans qui ne sont pas nécessairement suivis d’effet. On note néanmoins que, cette fois, il est écouté. Pendant que les médias examinent le contenu et la faisabilité de ses mesures, il imprime au pays une dynamique qui sera sans retour en 2027, dernière année de son second mandat.

Épisode « historique ».

D’un seul coup hier, nous sommes passés de positions virtuelles à des engagements multiples, réels et coûteux. On peut compter sur Macron pour les défendre bec et ongles pendant les trois ans qui viennent : et il n’y aura pas de candidature sérieuse à la présidentielle de 2027 qui ne proposera pas la poursuite et même le développement du plan Macron. Cet épisode est historique, mot certes galvaudé mais utile pour désigner un événement capital. Je préfère l’enthousiasme qui accompagne les décisions du chef de l’État à l’éternel septicisme, à la douche froide qui conduit à la stérilité. « Le plan est illisible », clame « le Point », toujours à l’avant des forces de la démolition. Lisez une seconde fois.

RICHARD LISCIA

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Police et peuple

Le rodéo est interdit
(Photo AFP)

Une manifestation contre les violences policières devrait attirer beaucoup de monde aujourd’hui. La police française fait l’objet d’une vaste polémique qui se nourrit à la fois de ses dérapages et de son utilité.

DANS UN CAMP où il a déjà été dit que « la police tue », le procès de nos forces de l’ordre a déjà fini par une condamnation. Façon d’ignorer qu’aucune action de répression n’a lieu sans un défi, un délit ou un acte de violence. On attaque les commissariats au mortier, on passe sur le corps des policiers pour tenter de les fuir, on  organise des rodéos ultra dangereux pour les passants et on voudrait que les « gardiens de la paix » restent inertes.

On tue des policiers.

Les comportements policiers sont commentés en permanence, de sorte que les arguments se croisent à propos d’un système voué au rétablissement de l’ordre, mais avec une série de contraintes qui ne tiennent aucun compte de l’agitation des délinquants. Les uns voudraient que la répression soit encore plus implacable, les autres souhaitent la multiplication les zones de non-droit. On ne fait pas l’unité d’une société sur des bases aussi fragiles. Le temps où les flics faisaient peur est terminé. On les défie, on les attaque, on les assassine, comme le couple de policiers à Magnanville. Ils exercent désormais un métier qui ne les laisse jamais en sécurité. Ils peuvent rentrer chez eux et être exécutés.

La police ne fait plus peur.

Bien entendu, les médias s’en mêlent, qui n’ont pas un préjugé favorable aux gendarmes et policiers. Il est facile et démagogique de dire que le jeune Nahel, qui, au début de l’été, enfreignait répétitivement le code de la route en pleine ville, ne devait pas payer ses actes de sa vie. Il est moins simple de démontrer qu’il n’a pas été été la victime des flics mais celle de ses propres errements. On a fait un triomphe à sa mère sans lui demander si elle faisait parfois des recommandations de prudence à son fils. C’est le monde d’aujourd’hui : la police n’inspire aucune peur aux délinquants, les innocents se soumettent à toutes les formalités.

Les choux gras de l’extrême droite.

Il ne s’agit ni de faire une ovation à la police, ni d’ignorer les droits de chaque citoyen. Il s’agit d’empêcher des actes qui mettent en danger les passants. De leur montrer qu’ils sont protégés. Il s’agit de donner une signification à la quiétude de la vie civile, de s’opposer à la privation de liberté qu’une délinquance minoritaire produit infailliblement sur l’immense majorité de la population. C’est une affaire politique dont la prise en charge par l’État est indispensable car une police et une gendarmerie en colère est un facteur de déstabilisation de la société. Pour l’exécutif, la manœuvre est délicate. Il craint, en réprimant à tout va, de trop ressembler à l’extrême droite qui, elle, fait ses choux gras avec le sentiment d’insécurité.

Pourtant, il ne s’agit que d’appliquer la loi, qui n’est pas née aujourd’hui et régit depuis toujours la vie des collectivités. Nahel est certainement une victime, mais son épopée routière n’a pas eu lieu sans inquiéter des milliers de piétons et d’automobilistes. À ceux-là, le gouvernement doit un gage, une promesse, celle d’empêcher des violences auquelles un fatalisme prématuré nous a progressivement habitués.

RICHARD LISCIA

PS- Pas de blog lundi. Je vous retrouve mardi, si cela vous convient.

R. L.

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Le Sénat résiste

Gérard Larcher, président du Sénat
(Photo AFP)

Des élections sénatoriales auront lieu dimanche. Elles renouvelleront pour moitié la composition de la chambre haute. Elles ne  réduiront pas l’hégémonie des Républicains sur l’institution.

LE SÉNAT comprend 348 membres. Ils ne sont pas élus au suffrage universel mais par un collège de personnes déjà élues, au nombre de 162 000. Tous les trois ans, une moitié des sénateurs se soumettent à la décision des urnes. Le mode d’élection et les particularités du Sénat font qu’il  a souvent été contesté, certains estimant que le scrutin, étant circonscrit à des élus, n’est pas légitime. Quand il était le Premier ministre de la cohabitation avec Jaques Chirac, Lionel Jospin a envisagé de supprimer le Sénat purement et simplement. Mais pour prendre cette mesure, il lui fallait le concours des principaux intéressés, qui la refusèrent avec virulence.

Le cas Trump.

L’élection du Sénat français rappelle par certains aspects l’élection présidentielle américaine mais par un collège électoral de 578 personnes censées traduire le vœu exprimé par le peuple. Un dysfonctionnement majeur s’est produit en 2016 quand Donald Trump, qui avait obtenu 3 millions de voix populaires de moins qu’Hillary Clinton, l’a emporté grâce à sa majorité au collège,  le principe du winner takes all, qui signifie qu’il emporte un État plutôt que la majorité dans cet État, s’appliquant en l’occurrence.

Une fonction confortable.

Le Sénat n’est pas un organisme inutile. Ses débats policés et courtois sont bien plus efficaces que ceux de l’Assemblée nationale. Son pouvoir est limité puisque, en cas de différend entre les deux chambres, c’est l’Assemblée qui finit par l’emporter. Mais il arrive souvent que les amendements produits par les sénateurs soient retenus par les députés ou qu’ils lancent une proposition de loi. La position des sénateurs est confortable. Beaucoup d’avantages sont accordés à la fonction , notamment pour les retraites et la chambre haute dispose d’une cagnotte confortable.

Club privé.

Une réforme en profondeur reste néanmoins indispensable. Il serait logique d’élire les sénateurs au suffrage universel tous les six ans et en une fois. Ils en acquerraient la légitimité qui leur est encore contestée aujourd’hui. Pour le moment, la forme du scrutin fait trop penser à une partie de cartes réservées à un club privé. Toutefois, dans ce pays chamailleur et tourmenté, un tel projet donnerait lieu à une bataille homérique, qu’il soit lancé par l’exécutif actuel ou par le successeur de Macron. On est là au cœur de la politique, des décisions essentielles, de la vie des institutions. Les réformes sont des montagnes presque impossibles à franchir.

Peur de la réalité.

Tout, en France, se passe comme si l’essentiel se situe davantage dans les arrière-pensées que dans les actes. Des quantités considérables d’élus nous ont déjà fait la leçon à plusieurs reprises. Une peur viscérale du changement nous détourne d’objectifs qui seraient salutaires s’ils étaient enfin atteints. Macron à lui seul incarne la volonté d’agir, de bouger, de mettre en mouvement la société. Il a remporté quelques victoires et essuyé au moins autant d’échecs. Mais sa détermination à agir en dépit des multiples oppositions et du sentiment des protestataires qui, en définitive, sont épouvantés par la réalité, est louable.

RICHARD LISCIA

 

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Les deux rois

Les deux couples
(Photo AFP)

Entre une monarchie indéboulonnable et une République qui donne au président des pouvoirs peut-être excessifs, sont nées des affinités. La visite du roi Charles III en France souligne un rapprochement que le Brexit ne peut pas affaiblir.

POUR Charles, son séjour en France assure une légitimité que les Britanniques ne sont pas prêts à contester ; pour Emmanuel Macron, c’est la preuve que, bien qu’il ne soit pas éligible pour un troisième mandat, son second est actif et utile. Le déploiement des fastes royaux de la République, qui passe forcément par un dîner de très haute tenue dans les splendeurs du château de Versailles, contribue à renforcer, sinon la popularité des deux chefs d’État, leur légitimité : ils ne jouent que dans la cour des grands.

Discours émouvants.

Ce qui, bien sûr, n’efface pas les obstacles que tous  deux rencontrent dans la gestion interne de leurs pays et dans un monde en pleine crise qui, parfois, semble au bord de  l’abîme. L’alliance France-Royaume-Uni, de ce point de vue, n’est pas négligeable car il s’agit de deux puissances nucléaires totalement d’accord sur la façon de traiter les provocations de la Russie et de la Chine. Emmanuel et Charles ont prononcé, de ce point de vue, les discours émouvants de deux leaders que peu de choses séparent.

Ces Anglais masochistes.

On n’ira pas jusqu’à comparer la somme des difficultés du royaume et celle de la République. Il semble néanmoins que la Grande-Bretagne ait une pente plus rude à grimper. On peut bien révéler un secret de Polichinelle : le Brexit aura été un désastre historique qui a placé les Britanniques dans une situation inextricable d’où ils ne savent pas sortir. Rishi Shunak, le Premier ministre, n’a pas l’intention de recourir au référendum, le roi n’a pas le pouvoir exécutif et les Anglais sont capricieux. Les adeptes du Brexit sont encore nombreux, même s’ils en souffrent. L’Angleterre, comme tant d’autres pays, a un côté masochiste que le suffrage universel, hélas, a renforcé.

Ce qui nous rapproche.

Mais nos deux pays sont unis dans la défense de l’Ukraine et l’idée que les envahisseurs doivent être écrasés  par les envahis ; la démocratie est leur religion commune ; et Charles a déjà appris au moins une chose, à savoir que le grand large n’est pas  aussi séduisant que l’Europe, toujours conspuée, critiquée, malmenée, mais toujours miraculeusement solide. Sept ans de réflexion ont conduit nos amis britanniques à la conclusion qu’il faut y réléchir à deux fois avant d’entrer dans un virage de l’Histoire en épingle à cheveux. Naguère, le bruit courait que la reine Élisabeth était pro-européenne, mais qui peut en fournir la preuve ?

Il a tant attendu.

Charles n’imitera pas sa mère. Elle avait acquis, avec la guerre, les Malouines et la mort de Diana, une expérience exceptionnelle. L’infirmière qui conduisait une ambulance sous les bombardements nazis s’est muée en chef d’État mûr. Pour Charles, les dossiers sont les menaces venues de l’Est, l’environnement, le Brexit dévastateur.  Il a tant attendu son trône qu’il a eu tout le temps de préparer la gestion de son pays. Peut-être, dans la limite de la délégation de pouvoirs dont il bénéficie, nous surprendra-t-il. Hier, dans son discours, à la fois humble et amical, il a montré qu’une bonne entente avec la France ne nuirait pas à la santé du Royaume-Uni. Ne comptons pas chichement notre coopération.

RICHARD LISCIA

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